C’EST ARRIVÉ PRÈS DE CHEZ VOUS

C’EST ARRIVÉ PRÈS DE CHEZ VOUS

Rémy Belvaux, André Bonzel, Benoit Poelvoorde, 1992

LE COMMENTAIRE

Nous sommes tellement gavés de violence que nous n’y faisons même plus attention. Immunisés au son des revolver et du sang qui gicle parce que nous l’avons trop vu. Intégrés dans notre mental comme une possibilité finalement pas si inquiétante dans la mesure où elle est totalement dissociée de notre réalité.

LE PITCH

Une équipe de journalistes fait un reportage sur le quotidien d’un tueur en série.

LE RÉSUMÉ

Benoît Patard (Benoît Poelvoorde) exécute ses victimes en direct devant la caméra. Il partage ses techniques et fait référence aux classiques du genre:

André! Rémy! Ça n’vous rappelle rien ? Le vieux fusil! Philippe Noiret!

Benoît le professionnel travaille surtout les classes moyennes et les personnes âgées.

Des vieux pauvres j’n’en connais pas hein.

Il y a aussi Benoît l’homme, qui se raconte sur un plan plus personnel. Il parle de la vie, il parle des femmes et d’amour. En tant que contemporain, il n’hésite pas non plus à donner son opinion sur le monde qui l’entoure.

Comment peut-on construire des habitations sociales sans la moindre recherche esthétique ?

Dans une usine désaffectée, c’est l’incident. Patrick, le preneur de son, reçoit une balle. Les risques du métier. L’équipe endeuillée décide néanmoins de continuer le projet et soupçonne Benoît d’avoir peur de travailler sur de plus gros poissons. Vexé il décide d’aller tuer une famille bourgeoise dans un quartier résidentiel, à regret.

Y’a rien ici, c’est vraiment du travail bâclé hein, des cartes de crédit ? Ben autant appeler les flics tout de suite!

À court de budget, l’équipe du film demande un crédit à Benoît. Dans sa cachette, ils se font débusquer par Ricardo Giovanni qui abat Franco, le nouveau preneur de son.

L’équipe se retrouve de nouveau chez Malou pour noyer son chagrin dans des Petit Gregory et enchaîner par une ronde de nuit qui se finira par un viol collectif doublé d’un meurtre.

C’est le début de la fin. Valérie reçoit une menace des frères de Ricardo Giovanni: un rat empalé. Benoît ne semble pas inquiet outre mesure mais se blesse dans un combat de boxe. À sa sortie de l’hôpital, il est moins performant. I

l essaie d’attaquer un facteur avant que celui-ci ne s’échappe et porte plainte. Benoît doit passer devant les tribunaux au pire des moments car la fosse dans laquelle il déversait tous ses cadavres s’est asséchée, laissant apparaître des dizaines de squelettes.

Condamné, Benoît parvient à s’évader de prison. Entre temps Valérie a été sauvagement assassinée par les Italiens qui l’ont abandonnée sur son lit avec sa flûte traversière dans les fesses. Quelques minutes plus tard, Benoît a l’horreur de découvrir la dépouille de sa mère, avec cette fois un balais dans les fesses.

Elle était pas musicienne ma mère c’est ça qu’tu veux savoir ?! Elle avait juste un bête balais!

Benoît décide de retourner à sa planque où il se fait tuer par les Italiens, qui liquident au passage l’équipe de tournage. Le projet est terminé.

L’EXPLICATION

C’est Arrivé Près de Chez Vous, c’est une triste réalité.

La première est que les tueurs en série peuvent être des gens normaux. On l’oublie. Plutôt, on préfère l’oublier. Penser les meurtriers comme des détraqués, exceptionnellement monstrueux, plutôt que des gens comme nous (cf Memento, Joker).

On ne s’autorise pas à penser qu’ils puissent être nos voisins (cf Prisoners). Quelle horreur de se dire qu’on connaît peut-être des tueurs en série ou qu’on a pu échanger des blagues avec Marc Dutroux sans le savoir ?

La seconde réalité macabre c’est que le crime est à la portée de tout le monde (cf We need to talk about Kevin). L’équipe de tournage qui suit Benoît par curiosité malsaine finit par se prendre au jeu. Rémy passe de l’autre côté de la caméra en frappant un cadavre puis en participant au viol collectif.

Arrête gamin! Ça commence comme ça, et après tu prends goût.

Benoît est un parfait tueur en série, efficace et méthodique. Il finit par baisser sa garde et commettre des erreurs en trahissant ses principes.

Je n’ai pas peur des gros mais je n’aime pas ce qui fait des vagues. Alors je préfère travailler petit et que ça rapporte beaucoup!

Il met aussi le doigt sur une autre réalité macabre qui est la complicité du système.

Un ptit quidam ça ne fait pas de vague. Tu tues une baleine t’auras les écolos, t’auras Greenpeace, t’auras l’Commandant Cousteau sur le dos. Mais décime une ban de sardines j’aime autant de dire qu’on viendra t’aider à les mettre en boites.

Dès que Benoît travaille différemment, il perd pied. D’abord il commence à avoir des scrupules.

Ce qui est malheureux c’est pour les trois innocents, ça ne devrait pas arriver des choses comme ça hein.

Il sait pertinemment que ce qu’il vient de faire ne sert à rien et ça l’agace.

Je n’aime pas l’infanticide. L’enfant ne rapporte rien. Théoriquement, il n’est pas solvable.

Enfin il subit de manière indirecte les foudres de sa mère qui lit la nouvelle dans les journaux.

Moi je te garantis on ferait ça à un de mes enfants, je l’égorge!

Benoît finit par devenir tout ce qu’il a critiqué auparavant. Sa fosse se tarit.

La loi de l’éternel provisoire. C’est des économies de bout de chandelle et après les murs se fissurent…

La dernière réalité macabre c’est que Benoît est avant tout une victime. Il est un jeune homme sous l’influence de ce qui l’entoure.

C’est les briques! Les briques rouges. Et le rouge c’est quoi ? C’est la couleur du sang, C’est la couleur des indiens, c’est la couleur de la violence!

Nous sommes tous des caméléons et finirons tous par ressembler à notre environnement.

Regarde moi ça : dans 10 ans cette petite garce sucera des bites comme sa mère.

Benoît est victime de Malou et de son alcool. Victime de ces journalistes qui le poussent à la faute. Des femmes qui ont piétiné son cœur.

Oui les femmes m’ont fait souffrir. Je leur ai donné des choses. Elles m’ont donné des choses. Et à un moment euh tu remets en question tout celà à cause de cette petite porte. (…) Le cœur des femmes parfois tu n’es parfois même pas conscient que la porte est ouverte et qu’il faut soit rajouter une graine, soit foutre le camp.

Benoît est un personnage sympathique: gangster certes, surtout finaud, polisson et généreux à ses heures. Et n’oublions pas qu’il n’est rien d’autre qu’un enfant rieur que la société a perverti. Parce que tout cela, c’est magouille et compagnie.

Que cela nous plaise ou non.

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

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