LE LOUP DE WALL STREET

LE LOUP DE WALL STREET

Martin Scorsese, 2013

LE COMMENTAIRE

Une civilisation prospère quand ses succès profitent à tous. Les richesses sont réparties. La corruption est maîtrisée grâce au souci de servir le collectif avant ses intérêts personnels. Bizarrement, ils semblent que ceux qui profitent le plus du système aujourd’hui sont aussi ceux qui prennent un malin plaisir à le baiser. Paradoxalement, ces profiteurs ne sont pas ceux que l’on croit.

LE PITCH

Un apprenti trader se transforme en magnat de l’embrouille.

LE RÉSUMÉ

Jordan Belfort (Leonardo DiCaprio), jeune louveteau de 22 ans, déjà appâté par l’argent, pose ses valises à Wall Street. Il s’y fait dépuceler par Mark Hanna (Matthew McConaughay). Victime du lundi noir de 1987, Jordan va découvrir le chômage ce qui va paradoxalement lui acérer davantage les canines.

I’ve been a poor man, and I’ve been a rich man, and I choose rich every fucking time!!

À la recherche désespérée d’un job, il recommence tout en bas de l’échelle dans une petite compagnie de Long Island spécialisée dans des penny stocks à moins d’un dollar. Ce nouveau départ va en fait lui permettre de révéler son ingéniosité. Vendeur redoutable, il ne supporte pas de perdre.

Never take ‘no’ for an answer.

De succès en succès, il va rapidement monter sa propre entreprise de courtage: Stratton Oakmont. Avec une armée de commerciaux composées de Donnie Azoff (Jonah Hill), Brad Bodnick (Jon Bernthal), Nicky Koskoff (P. J. Byrne), il va monter un empire. Putes, alcool, cocaïne et autres malversations plus tard, le triomphe fulgurant de Jordan fait des jaloux.

L’agent du FBI Patrick Denham (Kyle Chandler) finit par le torpiller. Belfort perd tout: sa fortune, sa femme-trophée (Margot Robbie) et son enfant.

Après un petit tour en prison, Jordan continuera de vivre de ses techniques de vente, les paillettes en moins, en tant que coach.

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L’EXPLICATION

Le Loup de Wall Street, c’est le produit de la dérégulation.

Dans l’Amérique ultra-libérale qui applaudit chaleureusement Emmanuel Macron quand il lui rend visite, on ne peut compter que sur soi – et son téléphone.

Pick up the phone and start dialing!

En qualité de gourou, Jordan est le responsable de l’hécatombe provoquée par la finance (cf Inside Job). Son défaut est de trop aimer la vente pour la vente. Rien de tel qu’un client qui achète, peu importe ce que le client achète. Un stylo? C’est tout ce qui obsède Jordan.

Il prend du plaisir à baiser ses clients en leur vendant n’importe quoi et s’amuse de leur naïveté. S’il a le nez poudré et les yeux encore translucides à cause des quaaludes, la vente est sa vraie drogue.

En fait, Jordan Belfort n’est pas un méchant garçon, il veut juste se mettre à l’abri et profiter. Qui pourrait le lui reprocher? Surtout dans ce monde capitaliste qui est le notre et dans lequel nous travaillons pour gagner notre liberté.

Jordan prend les commandes, bien qu’il ne soit pas un très bon pilote. Il est même plutôt un très mauvais pilote qui manque de se tuer en hélicoptère.

En fait, il est plutôt un outil. Une sorte de puissant bazooka employé à mauvais escient, un peu comme s’il était chargé avec des boules puantes. Alors que si on le chargeait avec des fleurs à la place, le monde serait au moins plus joli, à défaut d’être plus respirable.

À quoi pourrait ressembler un Jordan Belfort reprogrammé ? Puisqu’il peut tout vendre, comment s’y prendrait-il pour vendre l’écologie ou la modération ? La COP21 en deviendrait certainement plus sexy.

Pour arriver à ses fins, Jordan a une technique infaillible, il s’appuie sur une triste vérité:

People want to get rich and they want to get rich quickly.

Parce qu’il sait pertinemment qu’il ne s’adresse pas à des bouddhistes ou des Amish, mais à des gens normaux. Jordan profite de la faiblesse du monde pour vendre un rêve bassement matérialiste et superficiel : une Porsche avec sur le siège passager une blonde ou une brune du moment qu’elle a de gros seins.

Il offre la facilité. Cela marche. Parce que le matérialisme, le superficiel, et les gros seins font effectivement rêver – et donc vendre. Rappelons-nous que pour certains, la perspective d’aller faire la fête au Fouquet’s (cf La Conquête), ou à un degré moindre à la Rotonde (cf Le casse du siècle), est une raison suffisante pour participer et gagner une élection présidentielle.

Jordan Belfort est un tchatcheur (cf Thank you for Smoking) qui se sera bien goinfré dans les années 80 à l’image de toute une génération (cf Les Sous-Doués). Un succès de courte durée car son bagou de marchand de tapis ne lui aura pas permis de passer la barre du millénaire. On aimerait espérer qu’il représente le symbole d’une époque désormais révolue, comme celle de la pub des années 80.

Cette pub pleine de mauvais goût qui faisait promettre aux femmes d’enlever le bas la semaine suivante pour garder l’attention des mâles. On croise les doigts pour que Jacques Séguéla s’en aille mourir discrètement dans son cimetière d’éléphants, aussi discrètement que possible.

Le vrai problème de Jordan est qu’il est bien trop gourmand, en bon capitaliste. Comme tous ceux qui se mettent bien pendant le réveillon, il va finir par avoir mal au ventre. Car les abus finissent toujours par être punis.

Le personnage de Jordan est néanmoins fascinant. Un leader charismatique qui a le don d’électriser ses collaborateurs. Si son sens de l’éthique est approximatif, il a pour lui de ne pas être un hypocrite. Il se soucie de ses équipes, dans la mesure où celles-ci lui permettent de gagner plus d’argent.

Il est un vendeur invétéré. Quand les autorités lui proposent de passer un deal, son ego ne peut pas le supporter:

It’s me taking ‘no’ for an answer, it’s them selling me, not the other way around.

Reconnaissons-lui d’être finalement assez droit dans ses bottes. Il avoue devant ses troupes qu’il ne peut pas renier ses principes, même si cela doit l’envoyer en prison. En cela il est admirable.

Cette meute de loups représente le dérapage américain. Pas de mauvais bougres, juste une bande d’adolescents qui font un peu trop la fête pendant que les parents ne sont pas là (cf Projet X).

THE WOLF OF WALL STREET

Les principes ont été mis de côté. Il n’y a plus de limite.

This is obscene.

Ça prend ton Audi, ça prend ta gadji, ça prend ta CB.

Gober des poissons rouges et pisser dans la piscine. Pas très classe. Des faux airs de décadence Romaine. Le vrai souci ne vient pas de ces enfants attardés mais plutôt des parents déserteurs qui leur ont laissé les clés de la Lamborghini.

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

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