FULL METAL JACKET

FULL METAL JACKET

Stanley Kubrick, 1987

LE COMMENTAIRE

L’armée a une logique implacable qui repose sur l’esprit de corps. Une mécanique bien huilée. Aucun crâne ne doit dépasser. Avec un bel esprit de famille : chacun doit se sentir responsable de son copain. Si le copain fait une bêtise, alors les autres paient. Ce qui permettra au groupe de mieux faire comprendre au fautif de ne plus faire de bêtise. Le message passe toujours mieux de cette manière.

LE PITCH

De jeunes recrues font leurs classes à Parris Island avant de partir au Vietnam.

LE RÉSUMÉ

Les premières classes James Davis (Matthew Modine), Robert Evans (Arliss Howard) et Leonard Lawrence (Vincent d’Onofrio) subissent les foudres du sergent instructeur Hartman (R. Lee Ermey) dont la mission est de les préparer au combat.

If you ladies leave my island, if you survive recruit training, you will be a weapon. 

Promesse alléchante.

Le sergent donne le ton (cf Whiplash) : absolument personne ne va se marrer.

I am hard but I am fair. There is no racial bigotry here. I do not look down on niggers, kikes, wops or greasers. Here you are all equally worthless.

Davis est rebaptisé Joker pour son impertinence, Evans se fait appeler Cow-Boy pour ses origines texanes et Lawrence prend le surnom de Baleine à cause de sa corpulence (cf The Whale). Hartman va d’ailleurs se montrer particulièrement sévère avec Baleine, n’hésitant pas à monter le groupe contre lui.

Remember, this was all just a bad dream, fat boy!

Baleine est finalement breveté. Il a néanmoins perdu les pédales. Leonard tue froidement son sergent instructeur avant de se suicider avec son M-14.

Au Viet-Nâm, Joker rejoint les rangs de Stars and Stripes en tant que journaliste. Toujours aussi impertinent, il se dispute régulièrement avec son chef au sujet de la propagande. Puni pour son effronterie, Joker est aussitôt envoyé au casse-pipe à Phu Bai.

Joker retrouve par hasard son copain Cowboy. Il va suivre sa division alors qu’elle progresse vers Hué. La patrouille se fait tirer dessus par un tireur Viet-Cong embusqué, perdant tour à tour Crazy Earl, Blackboule, Doc Jay ainsi que Cowboy touché à la poitrine. C’est la Brute (Adam Baldwin) qui mène l’offensive.

Le groupe finira par trouver le sniper qui se trouve être une jeune fille. Lors de l’assaut, Joker perd le contrôle de son fusil et se fait sauver par son collègue le première classe Rafterman (Kevyn Major Howard). Grièvement blessée, la jeune fille agonise. La Brute qui voulait la laisser mourir à petit feu autorise finalement son exécution à la condition que Joker s’en charge. Il lui tirera une balle dans la tête.

Les Marines retournent à leur base en entonnant The Mickey Mouse March.

Joker avoue que bien qu’il soit dans un monde de merde, il est content d’être en vie. Et il n’a pas peur. En tout cas, c’est ce qu’il dit.

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L’EXPLICATION

Full Metal Jacket, c’est prendre du galon.

Davis se fait bizuter. En se faisant raser le crâne, sa personnalité disparait (cf Jarhead). On lui met un label sur le front comme un produit. Il devient Joker. Comme un bon soldat, il fait le parcours du combattant, subit une pluie d’ordres et d’insultes, compte les morts parmi lesquels son pote, se ballade le long de la rivière des Parfums jusqu’aux champs de bataille où il devra lui même tirer sur l’ennemi – féminin. La totale.

Joker n’est pourtant pas n’importe qui. Il est loin d’être le guignol qu’on décrit. Plus qu’un soldat, c’est un jeune homme sensible et intelligent (cf La Ligne Rouge). Contrairement à la plupart de ses camarades, notamment la Brute, il sait pourquoi il est là. C’est un romantique éclairé.

I wanted to see exotic Vietnam… the crown jewel of Southeast Asia, I wanted to meet interesting and stimulating people of an ancient culture… and kill them, I wanted to be the first kid on my block to get a confirmed kill!

L’intelligence n’a plus de place dans ce monde. Joker est bien plus malin que la moyenne, son Colonel y compris. Il cite Carl Jung (cf A Dangerous Method). Son supérieur ne comprend rien.

I think I was trying to suggest something about the duality of man, sir.

The what??

L’expérience est frustrante pour Joker car il évolue dans un monde complexe rendu binaire, dans lequel la violence n’a pas besoin d’être justifiée, où l’on se moque pas mal de la vérité et où il n’est rien d’autre qu’un pion (cf Munich). Il a encaissé les efforts et la discipline mais il a plus de mal à digérer la mauvaise foi de son rédacteur en chef. Et surtout il n’est pas encore allé au feu. Joker ne l’admet pas. Il veut aussi se prouver des choses. Le champs de bataille c’est son épreuve ultime. Il est puceau.

Well, you seen much combat?

I’ve seen a little on TV.

Il répond avec humour. Or la guerre ignore les sarcasmes et la subtilité. C’est un monde impitoyable, un world of shit dont Baleine n’aura pas réussi à se sortir.

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Hartman disait de lui-même qu’il était dur mais réglo. Tout le monde aura effectivement droit à sa part de tarte, sans exception.

It’s a huge shit sandwich, and we’re all gonna have to take a bite.

Il s’agit enfin d’un monde d’action, où l’on agit plutôt qu’on ne parle. Malheureusement pour Joker, pas besoin de réfléchir.

You talk the talk. Do you walk the walk?

Dans ce monde, Joker le cérébral teste ses limites et doit se forcer à déconnecter jusqu’à tirer sur un ennemi sans défense et féminin. Joker fait le dur apprentissage de la réalité. Il apprend à se débrouiller, rampe dans la boue. Il se dégoûte aussi. À la guerre comme à la guerre. Que le plus important est de rester vivant (cf Le Pianiste).

The dead only know one thing : it’s better to be alive. (cf The Jacket)

Ce soldat se convainc que cette expérience aura fait de lui un homme sans peur, sur le chemin du retour il entonne comme les autres une chanson d’enfants. Le conflit qui nivelle par le bas n’aura pas eu raison de sa sensibilité. Tout n’est pas perdu. Joker est effectivement encore en vie. À la veille de la montée du populisme qui précède en général le nationalisme et les guerres, il est plus que temps de rêver d’un monde meilleur, comme l’imaginait le philosophe Alain Chabat.

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

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