LA MULE

LA MULE

Clint Eastwood, 2018

LE COMMENTAIRE

Pendant de longues années, les impérialistes ont maltraité les minorités, comme des invités indésirables. Aujourd’hui, les mêmes impérialistes maudissent la prophétie de Céline Dion : que les choses ont changé, que les fleurs ont fané, que le temps d’avant… c’était le temps d’avant. Désormais, ils se retrouvent bien ennuyés de devoir leur rendre des comptes (cf American Factory).

LE PITCH

Un herboriste émérite s’improvise chauffeur pour les cartels.

LE RÉSUMÉ

Earl Stone (Clint Eastwood) est plus apprécié par la communauté que par sa propre famille. Son ex-femme (Dianne Wiest) l’a quitté, jalouse du temps qu’il consacrait à ses satanées fleurs. Sa fille (Alison Eastwood) ne lui parle plus depuis qu’il a snobé son mariage. Le business florissant de Earl a fini néanmoins ruiné par internet. Maudit progrès! 

Lors de la fête d’anniversaire de sa petite-fille, Earl débarque en qualité de SDF (cf Une époque formidable). Il est accosté par un membre des cartels qui lui propose de conduire une voiture d’un point A à un point B sans poser de question et contre une somme d’argent. Earl accepte puisqu’il n’a plus rien à perdre.

Son sale caractère et ses blagues racistes lui permettent de gagner la sympathie des gangsters. Surtout, il fait le boulot. Les voyages suivent et se ressemblent et avec eux les enveloppes de cash money.

Personne ne se méfie du grand père qui s’offre d’abord un joli pickup tout neuf, puis qui reprend possession de sa maison. Earl a ensuite l’occasion de rénover le centre des vétérans de la guerre de Corée. Il va payer les études de sa petite-fille. En résumé, Earl redistribue l’argent de la drogue. 

Ses allers et retours finissent par attirer l’attention de Laton (Andy Garcia), le big boss, qui veut rencontrer ce chauffeur si efficace. Earl est invité au Mexique où de jolies jeunes prostituées volontaires se chargent de lui faire passer du bon temps. La vie est belle. 

L’agent special de la DEA Colin Bates (Bradley Cooper) infiltre un gang de Chicago et donne du fil à retordre aux cartels. Laton est supprimé. Les règles changent. La jeune garde prend le pouvoir et intimide Earl pour mieux se faire respecter. 

Malgré les avertissements, Earl prend pourtant le risque de disparaitre de la circulation quelques jours afin d’aller assister aux derniers jours de son ex-femme et faire son mea culpa.

For what it’s worth, I’m sorry for everything.

En son absence, les cartels s’arrachent les cheveux, tout comme l’agent James. À la suite d’une course poursuite infernale le long de l’autoroute moyennant plusieurs voitures de police ainsi qu’un hélicoptère, le chauffeur se fait finalement coincer comme un héros en bout de course.

Au tribunal, Earl n’en fait qu’à sa tête – de mule. Il plaide coupable car il estime qu’il est temps pour lui d’aller faire un tour en prison (cf Flight). Là-bas, il aura le plaisir de retrouver ses chères fleurs.

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L’EXPLICATION

La Mule, c’est le pouvoir des fleurs.

Earl est un homme qu’on pourrait qualifier de romantique puisqu’il est sentimental. En effet, ce sont les fleurs qui lui ont donné le goût de l’éphémère.

Comme tous les romantiques, il est aussi solitaire (cf Mad Max). C’est bien normal : les road trips s’apprécient davantage lorsqu’on est seul (cf Locke).

Les romantiques sont des incompris, encore plus dans ce nouveau monde de jeunes loups qui savent tout sur tout, qui ont toutes les réponses avant même qu’on leur pose une question et qui ne font aucun cadeau aux dinosaures (cf No Country for Old Men).

Jusqu’où les fleurs peuvent-elles mener un homme ?

Earl a peut-être toujours été sensible aux pétales mais il s’est véritablement réfugié dans sa serre après avoir vécu l’horreur de la guerre. C’est en Corée qu’il a constaté que les armes ne font pas régner le bonheur. Dès lors, il a choisi le jasmin et les lilas comme ses divisions, ses soldats ; persuadé qu’on peut changer les choses avec des bouquets de roses. Ce qui fait de lui un idéaliste, en plus d’un fan de Laurent Voulzy.

En réalité, Earl n’est pas qu’un doux rêveur. Il a aussi le sens du devoir. C’est un bon Américain (cf American Sniper) qui fait ses choix et qui s’y tient. Les fleurs sont sa priorité, tant pis pour sa femme et sa fille. Tant qu’il se tient à ses décisions, rien ne peut le faire se sentir prisonnier. Ni la menace d’un revolver pointé sur lui, ou encore le manque de confiance que lui renvoie Julio (Ignacio Serricchio) chargé de l’escorter.

Earl a un fond de socialisme puisqu’il rend à la communauté ce que la communauté lui a donné. Sa générosité n’est pas questionnable. Il vient au secours d’un couple qui a crevé sur le bord de la route alors qu’il est censé ne pas s’arrêter. Il les traite de nègres au passage mais bon, c’est parce qu’il est d’une autre génération. Ce n’est pas méchant (cf Get Out). Ce n’est jamais méchant (cf Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu).

Earl réalise au crépuscule de sa vie qu’il a vécu comme un égoïste. Alors il cherche à se rattraper en assistant sa femme dans ses derniers instants.

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Earl est donc vraiment un mec bien, même s’il couche avec des professionnelles qui ont l’âge d’être sa petite-fille.

En fonction de la personne, cela dégoûte. Dans le cas de Earl, apparemment cela rassure. Sans doute le charme du fleuriste. Un homme à femmes (cf Shame), un charmeur.

Toujours est-il que la frontière qui sépare le papy pervers dégoûtant du papy cochon sympathique est très fine.

Earl est donc un mec bien, en dépit de ses dérives racistes. Il a transporté de la drogue mais n’a pas utilisé l’argent pour son profit personnel. Ce héros mérite donc d’être capturé comme tel, au coucher du soleil sur une autoroute bloquée par toute une section de la DEA. Certainement pas au petit matin dans un motel miteux.

Earl doit se faire cueillir les cheveux ébouriffés, avec toute la classe que ses quatre-vingt dix printemps lui procurent. Au tribunal, il coupe la plaidoirie de son avocate pour plaider coupable, non pas pour impressionner la galerie mais par sens du devoir républicain.

Il est vraiment un mec bien, sur toute la ligne. Un bon soldat cher à Clint Eastwood (cf American Sniper). Un héros Américain (cf Sully).

Les fleurs ont finalement mené Earl jusqu’en prison qui prend soudainement des allures de case départ puisqu’il revient à ses premiers amours.

On dit que les prisons sont surpeuplées (cf Un Prophète) mais on peut malgré tout y cultiver son potager

La guerre au vent. L’amour devant. 

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

6 commentaires

  • Et si jamais on était pris de sympathie pour Earl, n’oublions pas que sans son arrestation il aurait été assassiné par le cartel pour le punir de son escapade. Et puis plaider coupable c’est un moyen de ne pas avoir à témoigner et donner des infos sur le cartel qui risquerai de s’en prendre à sa famille… Il retrouve ses fleurs, il se réconcilie avec sa famille et la prison, il s’en fout vue qu’il est à la fin de sa vie. Happy end. (https://fr.wikipedia.org/wiki/Happy_End_(film,_2017))

    • Merci Cédric. On peut effectivement avoir de la sympathie pour ce vieux bonhomme qui honore ses obligations envers son pays, son employeur, et son ex-femme finalement puisque ses absences répétées sont effacées par sa présence au moment le plus critique. Il prend ses responsabilités en allant en prison, protégeant sa famille.

      On pourrait également expliquer La Mule comme une manière de vivre sa vie, sans pression. Earl vit comme un homme libre. Même en prison, il est libre…

  • LUCY • Explication de Film

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