PONYO SUR LA FALAISE

PONYO SUR LA FALAISE

Hayao Miyazaki, 2008

LE COMMENTAIRE

Pendant des siècles, on nous a rabattu les oreilles avec les performances de Jésus qui ressuscitait les morts, changeait l’eau en vin et marchait sur l’eau. Depuis, les filles ont fait beaucoup mieux puisqu’elles font battre le coeur des hommes et qu’elles courent à toute vitesse sur l’océan.

LE PITCH

La folle histoire d’amour entre un petit garçon et un poisson rouge.

LE RÉSUMÉ

Sous la mer, le sorcier Fujimoto prépare sa revanche contre le monde des humains qu’il a fini par quitter, déçu par le manque de respect envers la nature. Sa petite fille, un poisson rouge nommée Brunehilde, s’échappe. Vers la côte, elle aperçoit Sôsuké, un petit garçon de son âge vivant dans une maison juchée sur la falaise. Brunehilde ne fait pas attention et se retrouve coincée dans le filet d’un chalutier.

Sôsuké lui vient en aide et se coupe. Le poisson lui lèche le doigt pour l’aider à cicatriser. Le petit garçon le baptise Ponyo.

Fujimoto parvient à récupérer sa fille, brisant au passage le coeur de Sôsuké dont la maman reste philosophe.

On ne va pas changer le destin. C’est très dur parfois mais il faut l’accepter. Ponyo est un poisson, il est né dans la mer et il y est retourné parce que c’est son élément.

En l’occurrence, Ponyo est en train de se transformer en petite fille! Elle développe des mains et des pieds, puis échappe de nouveau à son père pour retrouver son amoureux. Les éléments se déchaînent. La mer monte pour atteindre son niveau de l’époque du Dévonien. Fujimoto est en stress. Sa femme, la déesse des mers, tente de le rassurer.

Allons, calme toi.

Si Sôsuké l’aime vraiment, Ponyo deviendra une petite fille et perdra ses pouvoirs magiques. Sinon, elle sera transformée en écume. Pas de panique, c’est la vie.

Après toutes ces aventures, Sôsuké fait la promesse d’aimer Ponyo pour toujours quelle que soit sa forme : poisson, mi-humaine mi-poisson ou complètement humaine. Sous toutes ses coutures (cf Phantom Thread).

Tout rentre dans l’ordre. Le niveau des mers redescend. Fujimoto s’excuse puis serre solennellement la main de son gendre. Ponyo peut embrasser Sôsuké. Tout le monde songe déjà au mariage (cf Marriage story).

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L’EXPLICATION

Ponyo sur la falaise, c’est la réconciliation avec la nature.

Cela fait trop d’années que le monde marche sur la tête, obsédé par l’idée d’atteindre ses objectifs de rentabilité économique et par le pognon de dingue. Avec tous les dérèglements environnementaux que cela implique. On pense aux marées noires provoquées par les plateformes pétrolières mal entretenues (cf Deepwater).

Tous ces requins blancs qu’on extermine pour que nos surfers puissent profiter de la mer sans se faire croquer les chevilles (cf Les dents de la mer). Nos centrales nucléaires qui déversent leurs déchets radioactifs dans les rivières (cf Pandora).

C’est de pire en pire.

On a beau être conscient de ces dérives, rien ne change véritablement. Les activistes continuent de poser des bombes qui n’ont aucun impact. Du côté politique, les présidents s’empruntent les belles formules pour sauver la planète alors qu’ils ne cherchent eux aussi qu’à surfer sur les sondages. C’est rageant. Fujimoto est parti en urgence pour que les choses changent.

Vous ne comprenez pas ? Il n’y a plus de temps à perdre.

Ce terroriste des fonds marins prépare la revanche des océans. Son plan est certainement radical car il n’a rien d’un Steve Zissou.

Les humains ne font que voler la vie de la terre.

Brunehilde aimerait trouver une autre solution plus pacifique. Un compromis. Sous l’emprise de son père, elle étouffe. Il est est grand temps d’aller voir ailleurs.

Je veux sortir!

Elle fait bien car à la surface, les humains ne sont pas tous si mauvais (cf Knock at the Cabin). Elle trouve par exemple quelqu’un comme elle en la personne de Sôsuké : curieux, prévenant, altruiste… Entre eux, c’est le coup de foudre (cf Suzume).

Ponyo aime Sôsuké!

On pourrait se dire que les choses vont peut-être un peu vite. Ils se connaissent à peine. Vont-ils pouvoir s’aimer sur la durée ? Il est possible que Ponyo soit encore sur Tinder (cf Newness) et que Sôsuké ait une haleine de chacal le matin. Autant de facteurs qui pourraient conduire à leur rupture. Les deux enfants n’ont pas ce genre de considérations puériles. Ils sont simplement contents d’être ensemble, sans se poser plus de question parasite. Pas de prises de tête (cf Avatar : la voie de l’eau).

Cette attraction inquiète malgré tout Fujimoto pour qui c’est chacun chez soi. Ce papa craint déjà le pire (cf Mon beau-père et moi).

Notre fille Ponyo me créée bien du tracas. Elle a ouvert une brèche entre les deux mondes. Le pire c’est qu’elle n’a conscience de la conséquence de ses actes. (…) Le chaos a déjà commencé!

Heureusement que sa femme intervient, avec toute la sagesse qui la caractérise.

Il faut retrouver notre calme.

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En amour, il est nécessaire de garder la tête froide. Fujimoto est un peu trop soupe au lait. La déesse des océans pense qu’il faut donner sa chance au produit. Elle accepte la vie telle qu’elle est. Les sentiments de Ponyo envers Sôsuké sont respectables. Le petit garçon devrait avoir le droit de montrer qu’il est à la hauteur de Ponyo. Si ce n’est pas le cas, l’eau coulera sous les ponts. Rien de bien grave. La vie continue.

Nous sommes nés de l’écume et retournerons à l’écume.

Au final tout rentre dans l’ordre car les humains et les amibes s’aiment profondément (cf La forme de l’eau). Ils peuvent oeuvrer ensemble à la construction d’un monde meilleur ou les petits garçons se contenteraient de naviguer sur des bateaux à moteur pop-pop. Les poissons accepteraient de se transformer en filles, même si cela implique de perdre leurs pouvoirs magiques.

Tout serait possible. Les océans n’auraient plus besoin de déclencher des tsunamis pour punir les humains. On sait que l’amour permet de tromper le temps (cf Interstellar), peut-être peut il préserver la barrière de corail et régler les problèmes liés à l’empreinte carbone ?

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

3 commentaires

  • J’irai meme plus loin, Ponyo c’est une esthétique du réchauffement climatique. Il faut dire que les images de catastrophes naturelles ne donnent jamais envie, sans compter le discours culpabilisateur et les paroles apocalyptiques qui vont avec. Alors que dans Ponyo, la tempête n’a jamais été aussi belle, le typhon aussi majestueux, le monde après les inondations aussi enchanté. On en vient à regarder la nature et à apprendre à l’aimer avec douceur et poésie. On rêverait presque que Greta se transforme en poisson rouge!

    • Merci pour Delphine pour ce commentaire. Effectivement, il est intéressant de noter que dans l’esthétique Japonaise le rapport à la nature est complètement différent du notre. Des épisodes climatiques ne sont pas vus comme des « catastrophes » et bien que leurs conséquences soient graves, ils ne sont pas perçus comme menaçants. Une belle tempête. Un typhon majestueux. Il s’agit d’une autre manière de regarder la nature et pouvoir l’aimer comme elle est, « avec douceur et poésie » comme vous le dites très joliment.

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