LE DERNIER ROI D’ÉCOSSE
Kevin Macdonald, 2006
LE COMMENTAIRE
Un poing levé n’a pas tout à fait la même signification. Quand il s’agit de briser les murs, sans que cela ne fasse peur, tout va bien. Tandis que lors que des dictateurs brandissent leur poing, le monde peut trembler.
LE PITCH
Un chien fou part à l’aventure en Afrique.
LE RÉSUMÉ
Nicholas Garrigan (James McAvoy) s’ennuie dans sa vie de jeune médecin. Il plaque l’Écosse pour une mission humanitaire en Ouganda. Là-bas, il y rejoint le Dr. David Merrit (Adam Kotz) et sa femme Sarah (Gillian Anderson) qui refuse poliment ses avances.
Idi Amin (Forest Whitaker) prend le pouvoir. Garrigan place beaucoup d’espoir en ce nouvel homme fort, persuadé qu’il va réaliser de grandes choses pour son pays. Sarah a plus d’expérience. Son enthousiasme est plus mesuré.
Garrigan est appelé sur les lieux d’un accident. La voiture du président a percuté une vache. Le jeune homme soigne la main de Idi Amin puis abat l’animal blessé avec beaucoup de dextérité, impressionnant au passage le président Ougandais.
Let me tell you, if I could be anything instead of a Ugandan, I would be a Scot.
Il propose à Garrigan de devenir son médecin traitant ainsi que moderniser le système de santé du pays. Rien que cela. Nicholas est exalté de faire partie d’un projet si ambitieux.
Au fur et à mesure qu’il gagne la confiance du président, il est exposé à des scènes de violence. Il souscrit néanmoins à la propagande du dirigeant Ougandais qui lui promet que réprimer l’opposition est nécessaire pour le maintient de la paix.
Garrigan se rapproche de Kay (Kerry Washington), l’une des nombreuses femmes de Idi Amin. Elle va lui ouvrir les yeux. Quand Nicholas veut s’enfuir il est déjà trop tard. Son passeport lui a été confisqué.
My name is Nicholas Garrigan, and I’m from Scotland. I need to go home now.
Your home is here.
L’ambassadeur (Simon McBurney) est presque content de le voir s’enliser.
You know what they’re calling you? His ‘white monkey’.
Garrigan recevra une protection de la part de l’ambassade s’il assassine Idi Amin. Facile à dire.
Kay tombe enceinte. Si Idi Amin le découvre, son sort est scellé.
Garrigan accepte de s’occuper de son avortement mais il est retenu lors d’une conférence de presse et ne peut se rendre au rendez-vous. Kay décide d’aller se faire avorter dans un petit village. Elle est capturée par les hommes du dictateur. Garrigan la retrouvera démembrée.
Dégoûté, l’Écossais accepte finalement la proposition de l’ambassadeur. Il tente d’empoisonner le père de la nation mais échoue lamentablement, ce qui lui vaudra d’être suspendu à des crochets de boucher. À l’ancienne.
They take you to a tree and hang you by your skin. Each time you scream the evil comes out of you. Sometimes, it can take three days for your evil to be spent. Pull him up.
Le Dr Junju (David Oyelowo) vient à son secours afin qu’il puisse quitter le pays et faire éclater la vérité au grand jour. Le monde doit savoir.
I am tired of hatred, Doctor Garrigan. This country is drowning in it. We deserve better. Go home. Tell the world the truth about Amin. They will believe you, you are a white man.
Junju paie cette effronterie de sa vie.
Idi Amin mourra lui de nombreuses années plus tard, en Arabie Saoudite.
His regime had killed more than 300,000 Ugandans.
L’EXPLICATION
Le Dernier Roi d’Écosse, c’est faire le dur apprentissage de la vie.
Nicholas Garrigan est un idéaliste (cf La Firme) qui n’a encore rien vu. Il pense que le monde a beaucoup à offrir, ce en quoi il n’a pas tort. Normalement, les aventuriers dans son genre comprennent bien vite que l’herbe n’est pas plus verte ailleurs. Parfois ils n’en reviennent même pas (cf Into the Wild).
Malheureusement pour Nicholas, il va avoir l’illusion de trouver cette vérité qu’il cherchait tant. En rencontrant Idi Amin, il devient l’élu (cf Matrix), la favorite de la Reine.
Dès lors, comment ne pas tomber dans le piège ? Lui qui n’était personne en Écosse devient quelqu’un en Ouganda. Après tout, mieux vaut régner en enfer que de servir au Paradis.
Garrigan est d’abord séduit par le charisme de Idi Amin.
I know who you are and what you are, I am you, I am the father of Africa!
Le jeune homme s’enorgueillit de recevoir autant d’attention de la part d’un homme si important. Il croit y discerner une sorte d’authenticité. Idi Amin ne lui dit que ce qu’il a envie d’entendre, à savoir que les Britanniques sont des pourris. Garrigan s’est d’accord. C’est pour cela qu’il est n’est pas resté en Grande-Bretagne.
I come from a very poor family, I think you should know this. My father left me when I was a child. The British Army; became my home. They took me as a cleaner, in the kitchens, cleaning pots, they used to beat me. « Beat this wall, Amin. » « Dig the latreen, Amin. » And now, here I am. The President of Uganda. And who put me here, huh? It was the British.
Puis le docteur découvre que tout n’est pas si rose. Car rien ne l’est jamais. Chaque lune de miel a une fin.
Did you think this was all a game? ‘I will go to Africa and I will play the white man with the natives.’ Is that what you thought? We are not a game, Nicholas, we are real. This room here, it is real. I think your death will be the first real thing that has happened to you.
Pourtant Garrigan n’a encore rien compris. Fidèle à sa ligne de conduite idéaliste, il croit être en droit de pouvoir dire ses quatre vérités au dictateur.
You’re a child, you have the mind and ego of an angry, spoiled, uneducated child. And that’s what makes you so fucking scary.
Il aurait été plus inspiré d’écouter les conseils de son entourage, à commencer par ceux de Sarah Merrit.
Puis il enchaine les erreurs stratégiques grossières en misant sur le mauvais cheval. Couchant avec la femme de son patron. Elle tombe enceinte. Il rate leur rendez-vous.
Garrigan trahit des valeurs auxquelles il avait fait voeu d’allégeance. La punition sera sévère.
C’est de cette façon qu’on apprend la vie, pendu par la peau. La violence de ce monde sauvage permet au jeune loup de comprendre qu’il est temps pour lui de rentrer dans le rang. Il a la chance de pouvoir rentrer au bercail. Qu’il en profite pour réfléchir à deux fois avant de suivre un joueur de flûte.
Une bonne occasion de mettre sa petite arrogance dans sa poche, et ne plus faire de vague.
Kay c’est Kerry Washington qui la joue.
Comme tout les blancs qui apportent leur assistance mortelle (référence au documentaire de Raoul Peck) dans les pays pauvres, ils sont heureux de jouir des richesses (femmes compris) mais quand la situation se conplique ils prennent la fuite
Merci Ney pour la précision ainsi que pour cette autre explication. Un regard différent mais aussi très pertinent sur ces rêveurs qui partent en mission pour sauver le monde, en Afrique ou ailleurs. Puis qui finissent par lâcher l’affaire dès lors que les choses se compliquent. De ce point de vue, Diane Fossey (cf Gorilles dans la brume) est un bon contre-exemple.
Un vrai miroir aux alouettes cette histoire.