ROOM 237
Rodney Ascher, 2012
LE TRAILER
Le labyrinthe est un symbole de complexité. Rempli de fausses pistes et d’impasses qui finissent par perdre ceux ou celles qui s’y aventurent souvent dans l’intention de s’y abandonner, le labyrinthe est un attrape-nigauds qui se pensent plus malins que les autres. Rares sont ceux ou celles qui parviennent à atteindre le coeur du sujet. Ils y font alors la découverte du Minotaure. Et le piège se referme sur eux.
LE PITCH
Quelques fans du film Shining partagent leurs interprétations.
LE RÉSUMÉ
Shining est un film plus complexe qu’il n’en a l’air.
It is a masterpiece but not for the reason that most people think.
Shining pourrait être une dénonciation du génocide dont a été victime l’Amérique des vrais natifs (cf Gangs of New York). Les colons firent le ménage de la côte Est jusqu’à la côte Ouest, de Portland Maine à Portland Oregon. Les références aux Améridiens sont omniprésentes dans Shining, notamment via les boîtes de conserve Calumet.
Shining pourrait être une référence à l’Holocauste et la bureaucratie Nazie avec sa machine à écrire de marque Adler, l’Aigle en Allemand. Un symbole du régime qu’on retrouve derrière M. Ulmann puis sur le T-Shirt de Jack. Le chiffre 42 sur le pull de Danny ferait référence à l’année où les Nazis ont mis en oeuvre la solution finale. 42 c’est aussi le chiffre qu’on obtient lorsqu’on multiplie les trois numéros de la chambre interdite (2 x 3 x 7). Les petits cochons seraient en lien avec l’antisémitisme bien connu de Walt Disney. Lors du dernier plan, le fondu des cheveux de Jack sur son visage rappellerait la moustache du Führer.
Shining pourrait traiter du passé, de ses malheurs et de leurs conséquences: la trace qu’on laisse derrière soi que mentionne Dick Hallorann, les fantômes, les couloirs labyrinthiques du temps:
How can we awake from the nightmare of history?
Shining pourrait parler du refus d’admettre ce qui est arrivé, comme Jack Torrance qui préfère se réfugier dans l’alcool ou se cacher derrière des excuses lorsqu’il discute avec Wendy, Lloyd ou Grady.
This movie is very much about denial.
Une autre théorie voudrait que Kubrick ait laissé des indices suggérant que les vidéos de la mission sur la lune étaient fausses et qu’il en était le responsable: Danny se lève comme une fusée avec « Apollo » sur son pull, la distance de la terre à la lune de 237,000 miles expliquerait le numéro de la chambre, tout comme les paroles de Jack à Wendy au sujet de son employeur Mr Ullman aux faux-airs de JFK.
On pourrait essayer de regarder Shining dans un miroir pour mieux y trouver sa vérité. Redrum devient Murder: on y voit Wendy surimposée sur les jumelles puis Jack fixant Grady surimposé sur le meurtre des jumelles.
La légende voudrait que Kubrick se soit rapproché de publicitaires de Madison Avenue pour comprendre l’influence des images subliminales et mieux les disséminer dans ses films, comme ce symbole érectile lorsqu’Ullman et Torrance se serrent la main.
Inside the Shining there are hundreds of subliminal messages.
On sait que Kubrick était un maître du détail. La coccinelle rouge retrouvée sous un camion est clairement un message à l’attention de Stephen King pour lui signifier qu’il s’agit bien là de son adaptation et pas d’autre chose.
Les incohérences de Shining pourrait prendre des allures de pièces d’un puzzle imaginé par le maître.
By that time I knew enough about Kubrick that most anything in his films can’t be regarded as arbitrary.
La taille de l’hôtel, qui est beaucoup plus petit vu de l’extérieur. Si l’on suit les plans de l’hôtel, il ne peut pas y avoir de fenêtre dans le bureau de Ullman tout comme le parcours de Danny ne peut pas le mener là où les jumelles sont mortes. Les chaises disparaissent d’un plan à l’autre, tout comme le personnage de Simplet sur le mur. La moquette s’inverse lorsque Danny reçoit la balle de tennis. Dans quel but ? La question subsiste.
Why would he make the movie so complicated?
L’EXPLICATION
Room 237, c’est l’explication qui se regarde le nombril.
Le film de Kubrick, de par sa complexité artistique, permet toutes sortes de lectures. Il devient sujet d’analyses et conversations qui justifient tout l’intérêt de l’exercice: trouver le pourquoi.
Kubrick would often end his films with a puzzle so he forces you to go out of the theatre saying what was that about?
On se laisse aller à imaginer les explications les plus improbables. Parfois surpris par certaines interprétations qui peuvent ouvrir de nouvelles portes à la réflexion. Comme un cadavre exquis, on complète le dessin en espérant peut-être résoudre l’énigme.
Il existe néanmoins des portes ouvertes qu’on enfonce inutilement et d’autres qui conduisent à des pièces qui ne sont tout simplement pas recommandées.
Room 237 pointe donc les dérives piégeuses, voire quasi-masturbatoires, d’un exercice qui tourne parfois sur lui-même. On pense à celui qui explique les résultats du tiercé à posteriori: « Le 6 c’est 9, plus 2 ça fait 11, donc 2! ».
À la fin, on en revient toujours à la case départ – ce qui nous arrange.
Quand on ne bascule pas carrément dans la théorie complotiste (cf Everything is a rich man’s trick). Room 237 est un peu comme une collection de vidéos Youtube sur le 11 Septembre. Si l’on peut convenir qu’il est effectivement étrange que le motif de la moquette change d’un plan à un autre, le danger réside dans la croyance que tout ait pu être pensé pour une raison bien précise.
Réfléchir de cette manière revient à croire qu’il est possible d’avoir réponse à tout. Ce qui n’est pas possible. Sinon les scientifiques gouverneraient le monde.
Le diable est dans les détails. Ce qui veut dire qu’il faut faire attention à tout, mais que cela peut également rendre fou. Admettons que le film puisse traiter du passé et donc de l’Holocauste, un thème cher à Kubrick, à la rigueur pourquoi pas ?
Voir des Minotaures sur les posters, le visage de Stanley Kubrick dans les nuages, ou penser que le réalisateur ait pu monter son film de manière à ce qu’il soit synchronisé avec sa version en marche arrière… c’est s’approcher d’un cap qu’on ferait mieux de ne pas franchir.
Écoutons plutôt la sagesse de Dick Hallorann et restons loin de cette chambre maléfique. Continuons à rouler sur notre tricycle sans nous soucier du reste. Heureux celui ou celle qui profite du voyage. Bien triste est celui ou celle qui ne s’intéresse qu’à la destination.
Chacun voit midi à la porte de sa chambre, peu importe son numéro.
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