SCHUMACHER
Hanns-Bruno Kammertöns, Vanessa Nöcker, Michael Wech, 2021
LE COMMENTAIRE
Pour peu que l’on accepte la part de compétition en soi (cf There will be blood), alors il est nécessaire d’aller le plus vite possible pour finir sur le podium – sans se mettre à la faute. Jouer des coudes. Surtout ne pas rater son virage. Envoyer son voisin dans le décor si besoin.
LE PITCH
Le destin cruel d’un pilote exceptionnel.
LE RÉSUMÉ
Comme beaucoup de pilotes de F1, Michael Schumacher a fait ses grands débuts dans le karting. À l’époque, il concourrait au Luxembourg – faute de moyens.
Les courses qualificatives en Allemagne coûtent cher.
Le garçon se fait remarquer lors du championnat du monde des voitures de sport et gagne le droit d’entrer en Formule 1. Eddie Jordan lui donne sa chance en 1991. C’est en Belgique que Michael Schumacher éclabousse le monde de la course automobile de son talent pour la première fois.
Flavio Briatore le recrute l’année suivante chez Benetton. Deux ans plus tard, l’Allemand talonne déjà Ayrton Senna. Leur rivalité s’affirme de plus en plus au fil des grands prix.
Tous les lions sentent quand le jeune lion arrive…
Suite à la mort tragique du Brésilien à Imola (cf Senna), Schumacher prend le pouvoir. Double champion avec Benetton, il décide de rejoindre Ferrari. Le prestige de la scuderia masque cependant mal son retard mécanique.
Pendant un moment, on ne voyait pas à quel point la voiture était nulle.
Le défi est à la hauteur de l’ambition. Les quatre premières années sont plutôt délicates. Les experts doutent de la capacité de l’Allemand à inverser la tendance, mais s’il réussit le tour de remporter quelques courses en sublimant sa machine. Il reste toujours désavantagé face aux Williams de Damon Hill et Jacques Villeneuve, quand il ne court pas après la McLaren Mercedes de Mika Häkkinen.
À force d’acharnement, et supporté par son équipe de mécaniciens, Schumacher finit par décrocher le titre en 2000. Le début d’une longue série. Cinq championnats du monde en poche plus tard, celui qui est devenu le Baron Rouge passe la main. Il a rendu ses lettres de noblesse au cheval cabré.
N’ayant plus rien à se prouver, l’Allemand se retire du circuit pour profiter de la vie. Faire la fête avec ses amis. Sauter en parachute avec Corinna. Faire du cheval avec Gina Maria et Mick. Il fait son retour à la compétition chez Mercedes Petronas pour trois saisons.
En 2013, il est victime d’un accident de ski à Méribel qui le plonge dans le coma. Depuis, Schumacher suit un traitement en Suisse à l’abri des regards indiscrets. Sa famille le protège de cette attention médiatique qu’il a toujours détesté.
Ce qu’il recherchait c’était une vie normale.
Sa femme et ses enfants souhaitent préserver l’image de l’homme, du mari et du père.
L’EXPLICATION
Schumacher, c’est la préservation du mythe.
Les grands champions laissent une trace sur le bitume. Ayrton Senna était agressif, comme tous les pilotes de ce niveau. Parfois à la limite de la régularité. C’est surtout son style romantique qui a fait sa légende. Michael Schumacher a pris la suite du Brésilien, dans un autre genre. En effet, l’Allemand était moins flamboyant mais plus méticuleux encore. Un véritable bourreau de travail.
On n’obtient que ce qu’on n’investit.
Schumacher est parti de très loin pour arriver jusqu’au firmament. Il lui a fallu faire deux fois plus d’efforts que les autres pour percer. Ce sportif donnait tout pour être au summum.
Dès l’enfance il s’entrainait déjà comme un champion du monde, il savait ce qu’il voulait, il faisait tout pour atteindre les sommets, il était investi d’un grand professionnalisme.
Le mythe de Schumacher est donc celui du perfectionnisme, jusqu’à la paranoïa comme en témoigne les pilotes qui l’ont côtoyé à l’époque comme Mark Webber.
Il se battait contre lui-même.
Ce mythe a pris du plomb dans l’aile à Méribel, écorné par un regrettable accident de ski. Il est sorti de la piste et a heurté un rocher, malgré son bon niveau. L’enquête à révélé que la vitesse n’était même pas en cause.
C’était juste de la malchance.
L’histoire de Schumacher rappelle ainsi que tout peut basculer en un instant, comme le fait remarquer Jean Todt de manière fataliste :
D’une minute à l’autre, tout ça s’est écroulé.
Même les sportifs les plus exigeants sont exposés. Ce sont toujours les meilleurs nageurs qui se noient. Schumacher a pris tous les risques dans sa carrière. Il a frôlé la mort.
J’ai vu les choses différemment, subitement. J’ai fait le tour du circuit en voiture de route et j’ai pensé : c’est un endroit où je pourrais mourir. Il y a tant d’endroits où je pourrais me crasher et trouver subitement la mort. Je ne pensais qu’à ça.
Donc il savait faire la part des choses.
Il faut être prudent, comme avec tout ce qu’on aime. Ressentir cette limite sans la franchir.
Malgré tout, ce génie de la maîtrise a fait une erreur qui l’a condamné à vivre le restant de ces jours dans un état qu’il ne supporte pas (cf Mar Adentro).
La perfection à 100%. Je ne pourrais pas vivre en deçà.
Sa famille a fait le choix de défendre sa vie privée bec et ongle. C’est pourquoi absolument rien n’a fuité sur l’état actuel de Schumacher, de façon à préserver le mythe. Respecter la dignité de cet athlète qui se battait pour être toujours à son meilleur niveau.
La préservation du mythe permet d’inspirer Mick, qui est bien le fils de son père. Prêt à faire tapis pour réaliser ses rêves.
Je serais prêt à renoncer à tout.
Inspirer des millions de fans, parmi lesquels Sebastian Vettel pour qui Schumacher était aussi un modèle.
Faire en sorte que la volonté d’atteindre la perfection garde un sens bien que la vie puisse s’arrêter sur un accident.
Donner l’envie à beaucoup de continuer de s’accrocher malgré la difficulté.
Michael n’abandonnait jamais.
Honorer la mémoire de ce champion minutieux et à l’énergie contagieuse.
Éviter que des chauffeurs de taxi Marseillais vantards ne puissent se référer à l’icône qu’il fut, en traitant n’importe quel conducteur Mercedes de Choumaquère (cf Taxi).
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