LA VAGUE
Dennis Gansel, 2008
LE COMMENTAIRE
Questionnons les personnes charismatiques qui se permettent de montrer la voie aux autres sans qu’on ne leur ait rien demandé. Ne buvons pas leurs paroles bêtement. Essayons d’éviter de copier tous leurs faits et gestes. De la même manière, méfions nous de celles et ceux qui s’habillent en blanc, surtout quand ils prennent des apéros ensemble.
LE PITCH
Un professeur rebelle se voit contraint d’enseigner les principes de l’autocratie à ses élèves.
LE RÉSUMÉ
Pendant une semaine, des lycéens Allemands suivent des cours visant à leur faire prendre conscience des bénéfices de la démocratie à travers l’étude d’autres régimes.
Rainier Wenger (Jürgen Vogel) aurait volontiers enseigné l’anarchie, son thème de prédilection. À son grand regret, il hérite de l’autocratie (cf Avengers l’ère d’Ultron) – qu’il déteste par ailleurs.
Face au scepticisme de ses élèves qui semblent convaincus que le fascisme est définitivement mort et enterré en Allemagne, Wenger décide d’employer une méthode alternative. Il va mener une petite expérience afin de leur montrer comme il est facile de manipuler les masses.
Tout d’abord, il commence par instaurer des règles autoritaires et suggère aussi un code vestimentaire uniforme. Les étudiants adhèrent au projet et décident qu’ils ont besoin d’un nom: La Vague. Ils se rendent à des fêtes où l’on admet seulement les membres de la Vague. Là, ils y tyrannisent d’autres élèves se trouvant en dehors de leur petit groupe.
Tout le monde se trouve sur un pied d’égalité. Tim (Frederick Lau), vilain petit canard, atteint un certain degré de popularité pour la première fois de sa vie. Il prend les choses très à cœur. Anke, la femme de Wenger (Christiane Paul), s’inquiète des proportions que cette affaire commence à prendre.
Rainer I don’t think you have this under control anymore, not at all.
Les membres de la Vague deviennent de plus en plus violents. Wenger décide alors de convoquer sa classe le lendemain. Il se sert de Marco (Max Riemelt) comme d’un exemple pour montrer aux membres de la Vague à quel point ils se sont laissés embrigadés.
Lorsqu’il émet l’idée de tout arrêter, Tim panique et sort son arme. Il tire sur Bomber (Maximilian Vollmar) puis se suicide plutôt que de perdre ce mouvement sans lequel il ne peut vivre.
Les étudiants sont choqués et Wenger est arrêté par la police.
L’EXPLICATION
La Vague, c’est un tsunami.
Le tsunami, on en parle sur les panneaux d’avertissement. On en ignore les consignes de sécurité. Le vent se lève. On le voit arriver, on ne s’éloigne pas assez rapidement pour l’éviter, et il finit par tout emporter sur son passage (cf Twister).
À la base, un terrain fertile permet à la colline de s’embraser sur la base de la présomption. La première erreur vient de Werner qui tel un skieur faisant du hors-piste, oublie tout simplement le principe selon lequel ce sont toujours les meilleurs nageurs qui se noient. Il est trop sûr de son fait. Sans s’en rendre compte, il va se faire renverser par sa propre ambition.
Les élèves eux aussi sont persuadés qu’ils sont à l’abri. Le nazisme, c’est bien fini (cf Allemagne Année Zéro). On ne les y reprendra pas deux fois. En l’occurrence plutôt trois, pour peu que l’on considère l’Empire Allemand comme autocratique.
Personne ne voit le danger arriver. L’océan s’est retiré, le vent souffle. On est en sécurité. Le tsunami, c’est pour les autres. Comme le nuage de Tchenorbyl. Et puis la France c’est différent. C’est pas comme le Royaume-Uni ou les États-Unis. Absolument rien à voir du tout. On est mieux.
So you don’t think there could be another dictatorship in Germany?
No, we are too enlightened now.
L’autre facteur qui permet à l’autocratie de prendre racine, c’est l’ennui. Les élèves ne sont plus motivés par rien. Personne n’est impliqué. Plus personne ne vote. Les leaders font défaut.
Cette passivité ambiante permet au professeur de sortir tout le monde de sa torpeur, prendre un contrôle total sur sa classe et imposer de nouvelles règles. Surtout, Wenger donne un but à ses élèves, une raison de venir en cours.
What our generation lacks is a common goal that hold us together.
La technique de Wenger s’inspire des maîtres dictatoriaux. Il détruit les identités en supprimant tout ce qui permet l’expression d’une personnalité. De cette manière, il peut installer son autorité et nourrir le culte du chef. En uniformisant, il atteint son but. L
e groupe s’approprie le projet par la dotation d’un nom et d’un symbole. Wenger a gagné. On ne réfléchit plus. Les ordres sont exécutés. Marcher au pas. Le groupe a pris le pas sur l’individu.
La vague est une boule de neige ou fait tâche d’huile. L’instinct grégaire des élèves se réveille. De plus en plus d’élèves sont intrigués par ce qui se passe et veulent faire partie de l’aventure à mesure que le mouvement prend de l’envergure. C’est d’ailleurs un phénomène grisant pour Tim qui se sent plus fort que jamais.
Wenger lui-même est dépassé par ce qu’il vient de créer.
You should just see how motivated they are.
La vague est aussi le pouvoir qui échappe à celui qui pense le détenir pour lui tout seul. Wenger va l’apprendre aux dépens de ses élèves. Le tsunami est passé par dessus la digue qui est censé le contenir. Wenger n’a pas vu arriver le point de non-retour. L’expérience tourne mal, même si le cours est un succès. Nul doute que les élèves sauront se rappeler de cette expérience et ne pas tomber dans les travers du fascisme.
La leçon est qu’on ne peut pas faire l’expérience de l’extrême en espérant s’en sortir indemne. On ne peut pas vivre sur la côte en étant persuadé qu’on n’aura jamais les pieds dans l’eau un jour. Pas de shoot d’adrénaline, pour voir (cf Panique à Needle Park).
En tout cas, pas sans risque. Tout comme on ne peut pas voter pour un·e candidat·e un peu farfelu·e type pour voir ce qui se passe ou dans le but de préserver son petit confort.
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