L’ÉVEIL

L’ÉVEIL

Penny Marshall, 1990

LE COMMENTAIRE

Les misères de l’existence paraissent interminables pour certains. Pour d’autres au contraire, les joies de la vie filent beaucoup trop vite. Il ne tient qu’à nous que de nous offrir quelques moments de répit et les apprécier. Apprendre à les faire durer éternellement.

LE PITCH

Un physicien ramène à la vie un patient dans un état léthargique.

LE RÉSUMÉ

Fin des années 60, le Dr Malcolm Sayer (Robin Williams) intègre un hôpital du Bronx où il doit s’occuper de patients qui furent victimes d’une épidémie d’encéphalite dans les années 20 et dont l’état est catatonique. Le Dr Sayer expérimente et va tester un traitement à base de L-Dopa sur l’un d’entre eux, Leonard Lowe (Robert de Niro). La molécule fait des miracles. Leonard se réveille.

It’s quiet.

Yes, everybody’s sleeping.

I’m not.

Il réapprend à marcher, à parler, et revient doucement à la vie.

Leonard et Sayer ont quasiment le même âge et vont se lier d’amitié. D’autres patients profitent du traitement du Dr Sayer. Ils sortent eux aussi de leur coma.

Leonard prend goût à la vie et se rapproche de Paula (Penelop Ann Miller) qui vient régulièrement rendre visite à un membre de sa famille. Se sentant prisonnier, Leonard montre alors des velléités d’indépendance. Il découvre qu’il n’est pas tout à fait libre et menace de vouloir quitter l’hôpital. Les réveils sont parfois douloureux pour certains.

Yeah, how do you feel?

Well, my parents are dead. My wife is in an institution. My son has disappeared out west somewhere. I feel old and I feel swindled, that’s how I feel.

Le miracle se révèle être de courte durée. L’état de Leonard se dégrade rapidement. Le Dr Sayer essaie d’augmenter les doses mais rien n’y fait. Leonard perd le contrôle petit à petit. Il se met à trembler de plus en plus jusqu’à retourner dans un état végétatif. La belle histoire prend fin. Sayer va malheureusement voir celui qui est devenu son ami disparaitre à nouveau. Il reprend le travail là où il avait commencé, avec la planche ouija qui lui avait permis d’établir le premier contact.

awakenings

L’EXPLICATION

L’Éveil, c’est une parenthèse.

L’éphémère nous rappelle à quel point il est important de savoir profiter de la vie. Rien n’est éternel, nous ne faisons que passer. Par conséquent, le temps est précieux et devrait être apprécié à sa juste valeur. Leonard a passé tant de temps en veilleuse que lorsqu’il revient à la vie, il déborde d’enthousiasme. Il bouillonne. Son appétit de vie est énorme. Il veut se faire le porteur d’un message épicurien, en répétant au Dr Sayer :

They need to be reminded of what they have and what they can lose.

À croire que le travail de Leonard a payé car la même année, le Dr Sayer déguisé en Professeur Keating (cf Dead Poets society) n’aura de cesse de marteler à ses élèves de profiter du jour présent.

Contrairement à Leonard, trop sûrs de notre fait, nous nous sommes assis à la table de la vie comme on s’installe à un buffet à volonté. Nous nous sommes goinfrés. Au point que nous n’avons parfois plus d’appétit, même pas pour un petit dessert. Un petit moelleux au chocolat, avec un coeur fondant. Avec une petite boule de glace vanille et une note de confiture framboise… Même pas!

Nous avons une capacité inouïe à passer à côté de notre vie sans même nous en rendre compte.

Il faut presque tout reprendre à zéro. Sayer utilise la planche Ouija pour permettre à Leonard de composer des mots. Leonard va lui indiquer les références d’un poème de Rilke.

His vision, from the constantly passing bars, has grown so weary that it cannot hold anything else. It seems to him there are a thousand bars; and behind the bars, no world.

La panthère enfermée tente de voir le monde extérieur depuis sa cage mais finit par ne voir qu’une succession de barreaux.

On pourrait penser que la panthère, c’est Leonard enfermé dans sa paralysie. Pourtant c’est bien Leonard qui permet à Sayer d’ouvrir les yeux le premier. Car Sayer est un peu une panthère asociale lui-aussi. Le médecin va s’inspirer de Leonard pour finalement se rapprocher d’Eleanor, l’infirmière qui l’aide dans sa tâche. Le bonheur était sous son nez, ou plutôt sur son nez (cf Her).

Where are my glasses?

They’re on your face.

La bonne nouvelle est qu’un train peut en cacher un autre. Rater le sien ne veut pas dire qu’on ratera nécessairement le suivant. Des trains partent toutes les vingt minutes. Les trains ne manquent pas, en dehors des périodes de grève bien sûr. Ces parenthèses peuvent se multiplier. La preuve avec ces patients qui s’éveillent et qui, malgré leur cinquantaine, n’ont parfois pas plus de vingt deux ans dans leur tête.

éveil

On pourra déplorer que Leonard ait besoin de drogue pour sortir de notre sommeil. Après tout, on a parfois besoin d’un petit coup de pouce pour sortir de l’enlisement. Pas de contrôle anti-dopage dans la compétition de la vie. Beaucoup d’artistes ont également recours au LSD pour trouver l’élévation. Chacun sa méthode.

Il s’agit bien de moments de révélation. Des courtes illuminations qui permettent à Sayer et Leonard de dépasser leur condition. Cette relation qui conduira à l’éveil de l’un et de l’autre. Sayer et Leonard sont Voltaire et Rousseau. Le kinésithérapeute et son patient font de petits progrès qui procurent une satisfaction immense (cf à propos d’Henry).

Tout comme le professeur de maths jouit de voir l’étincelle dans l’œil de son élève qui trouve la solution. Ou le psy qui aide son patient à se débloquer (cf Will Hunting). Pour y parvenir, il faut de la patience. Un travail de longue haleine, fait de nombreuses frustrations (cf Shutter Island). Ce genre de relations nécessite un engagement permanent.

Elles le méritent. Le Dr Sayer ne laissera pas tomber son ami.

Il essaie, il y arrive. Parfois, il n’y arrive pas. Alors il se relève et recommence. Il reprend depuis le début.

Let’s begin…

Si seulement nous pouvions reprendre chaque jour avec la même fraicheur. Regarder le monde avec un regard toujours neuf. À la manière d’éternels débutants. Il faut imaginer Sisyphe heureux.

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

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