AFTERSUN

Charlotte Wells, 2022

LE COMMENTAIRE

Qu’est-ce qui caractérise des vacances mémorables ? Des photos qui finissent sur les réseaux sociaux ? Pas sûr. Plutôt un moment. La météo, malgré tout. Rien ne vaut un peu de soleil arrosé de rakomelo. On regrettera peut-être la pluie dans quelques années, qui sait. La mer, évidemment. Un gyros, ou un souvlaki. En bonne compagnie. Un souvenir.

LE PITCH

Une jeune femme se rappelle d’un homme.

LE RÉSUMÉ

Sophie (Frankie Corio) et son père Calum (Paul Mescal) partent quelques jours au soleil, en Turquie (cf Mon Père ce Héros). La chambre n’est pas celle qu’il avait réservée. Il manque un lit. Tant pis. Calum se plaint timidement à la réception, pour obtenir un lit d’appoint.

À l’époque on filme tout sur caméscope, miniDV. Pas encore de smartphone, mais déjà l’envie de tout documenter.

When you were 11, what did you think you’d be doing now?

Elle a onze ans. Il a une petite trentaine. Un peu perdu. Sans beaucoup d’argent.

Sophie retrouve Michael (Brooklyn Toulson) à la salle de jeux. Elle traine un peu avec des ados anglais qui passent leur temps à jouer au snooker, se rouler des pelles ou boire des bières.

Calum masque sa dépression derrière quelques gestes de Tai chi. La journée, il fait semblant. Le soir, il se cache. Sophie ne voit rien de la détresse de son père. Elle n’a rien à voir.

Il a un coup de coeur pour un tapis persan qu’il achète malgré le prix exorbitant.

Un soir de karaoké, Sophie descend seule sur scène pour chanter sur REM.

I think I thought I saw you try. That was just a dream.

Calum n’ose pas la rejoindre. Elle lui en veut. Il va se coucher. Elle rentre tard.

Le lendemain, il s’excuse platement. Elle ne lui en veut plus, mais quand même. C’est dommage.

No, it’s a big deal.

Sophie lui prépare une surprise. Dans un amphithéâtre, elle prévient tous les touristes qu’il s’agit de l’anniversaire de son père. For He’s a Jolly Good Fellow. Un peu plus tard dans sa chambre, Calum fond en larmes. Une carte postale signée de sa main où il lui rappelle qu’il l’aime, et à ne jamais l’oublier.

Le dernier jour il se lance sur la piste de dance, sur Under Pressure (cf Bohemian Rhapsody). Parce qu’il adore danser, même si cela fout la honte à Sophie.

Oh my god dad! Stop!!

Des années plus tard, Sophie (Celia Rowlson-Hall) regrette son père. Dans une rave party, elle a l’impression de le voir dans la foule. Son naze de père. Elle aimerait pouvoir le prendre à nouveau dans ses bras.

I wish we could have stayed for longer.

Me too

I mean why cant we?

Ces vacances ont passé trop vite.

L’EXPLICATION

Aftersun, c’est la vie qui passe trop vite.

La vie comme de bonnes vacances, sans que l’on puisse vraiment s’en extasier. On ne peut pas passer sa vie à s’en décrocher la mâchoire. En plus, pas vraiment de raison de s’extasier pour des vacances qui n’ont rien d’exceptionnelles : un village en Turquie, avec d’autres Anglais·es. Même pas de quoi se payer un tour de moto en jeux vidéos. Quelques sites touristiques sans relief.

Des vacances banales avec son père qui n’a rien de plus spécial non plus.

Why is he so weird sometimes?

Un mec gentil, quoi qu’un peu raté. Les épaules tombantes et les oreilles décollées. Il s’est retrouvé père sans doute un peu trop tôt (cf Vivarium). Séparé, comme tout le monde (cf Marriage Story). Pourtant Calum joue le jeu. Il fait mine de s’intéresser…

How are you and your mum getting along?

En vrai, il s’en moque. Peut-être pas car il aime sa fille. Prêt à dormir par terre s’il le faut. Mais il a aussi ses problèmes. Il s’en veut terriblement de ne pas avoir eu le courage de descendre chanter avec elle. Encore une belle occasion manquée de rendre sa fille heureuse. Il ne gâche pas tout, sinon il serait vraiment un père indigne. Calum gâche juste ce qu’il faut. Il est médiocre.

Pourtant, son devoir de père lui tient à coeur. Il manie les blagues de papa à la perfection. Sert à Sophie les phrases un peu clichées sur tout ce qu’elle pourra plus faire plus tard.

You never know where you’ll end up.

Calum inspire plein de belles choses à sa fille. Elle en fait de la poésie. Se plaît à regarder le ciel en se disant qu’elle et son père se le partagent comme un trait d’union.

I think it’s nice we share the same sky.

C’est très commun et joli à la fois, malgré tout.

Ce père n’est pas du genre qu’on ne supporte pas. Il se fond bien dans le décor. Par contre, on a comme un petit pincement au coeur lorsque l’on doit lui dire au revoir à l’aéroport. Il fait partie de ces gens qu’on ne remarque pas toujours, puis qui nous manquent vite lorsqu’ils ne sont plus là. C’est à cause de lui qu’on a l’impression que la vie est passée trop vite.

Une étoile cachée par les nuages, qui brûle longtemps, même quand on passe de l’après-soleil.

Calum n’est pas parfait et n’aspire pas à l’être. Encore qu’il le voudrait qu’il ne pourrait pas l’être. Tout ce qu’il souhaite est de pouvoir se mettre à la disposition de sa fille. Qu’elle puisse le voir au moindre problème.

I want you to feel like you can talk to me about anything.

Même si parfois, il doit s’éclipser pour ne pas montrer cette autre partie de lui dont il a honte.

Il fait simplement ce qu’il peut, comme tout le monde.

Il est un père qui ment bien finalement.

You have time.

Sur cette vie du quotidien à laquelle on ne prête pas suffisamment attention.

Celle qu’on passe son temps à vouloir fuir sans y parvenir.

Are you excited for tomorrow?

Puis qui s’échappe sans qu’on lui ait donné la permission.

Qui ne nous laisse que des souvenirs.

Et que l’on cherche à retrouver désespérément.

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.