BALADE MEURTRIÈRE
James Ashcroft, 2021
LE COMMENTAIRE
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, la nature n’est pas un refuge. Inutile de chercher à fuir ses problèmes. En s’éloignant de la civilisation, on se rapproche de l’état sauvage (cf La Chasse). Si l’on ne voit personne autour de nous, alors ce sont les barbares du passé qui se chargent de nous faire signe.
LE PITCH
Une petite randonnée familiale se finit en road trip de nuit.
LE RÉSUMÉ
Hoaggie (Erik Thomson) et Jill (Miriama McDowell) prennent le SUV pour emmener leurs deux garçons faire un tour dans la campagne Néo-Zélandaise. Rien de tel que d’aller marcher au grand air pour se retrouver.
Leur après-midi est vite contrariée par l’arrivée de deux rôdeurs (cf Funny Games): Mandrake (Daniel Gillies) et son acolyte Tubs (Matthias Luafutu). Les deux hommes ont l’air menaçant. Mandrake braque la famille de son fusil et réclame les clés de la voiture, ainsi que les téléphones portables.
Fait du hasard ou coïncidence, il semble que Hoaggie lui rappelle quelqu’un.
Une voiture passe au loin puis s’éloigne. Mandrake oblige tout le monde à faire semblant que tout va bien.
Happy campers…
Puis il tue les deux adolescents et assomme Jill.
At least they didn’t have to suffer, unlike some…
Une fois la nuit tombé, les deux hommes prennent la route en compagnie de leurs deux prisonniers.
Where are you taking us?
Home.
En chemin, les langues se délient. Il semble que Mandrake ait croisé Hoaggie dans une institution pour mineurs où Hoaggie enseignait. Apparemment un sale endroit, où les enfants subissaient de nombreux sévices en tout genre (cf Sleepers).
Hoaggie affirme d’abord n’être au courant de rien. Puis il reconnait avoir vu des choses.
I saw things.
Il avoue son impuissance.
I just stood there. It wasn’t my place. What could I have done?
Avant de finalement admettre, qu’il a également participé à certaines de ces fameuses procédures.
I just thought you deserved it.
Dégoûtée, Jill saute de la voiture en marche avant de se jeter carrément dans le vide. Peu importe. Mandrake n’en avait pas après elle. Hoaggie est au centre de son attention.
I want you to talk about you.
Ce qui reste de l’institution constitue la fin de la balade. Le clou de ce spectacle funèbre. C’est l’endroit où Mandrake souhaite que Hoaggie expie ses fautes. Finalement Tubs abat son collègue, puis lit à haute voix l’inscription que Mandrake avait laissée sur un mur lorsqu’il était pensionnaire.
I hate this place.
Sentiment que Tubs semble partager.
Il épargne Hoaggie, à qui il reste encore l’enfer à vivre.
Tubs se lave les mains. Après quoi il s’en va contempler le lever de soleil sur le bord des falaises – les larmes aux yeux.
L’EXPLICATION
Balade Meurtrière, ce sont les souvenirs qui surgissent des ténèbres.
Hoaggie mène une petite vie tranquille. L’air de rien. Un couple de professeurs qui font la leçon aux enfants. Deux beaux garçons en pleine crise de l’adolescence.
I’m personally not craving a sense of community.
Une femme avec qui il se dispute de temps en temps. Absolument rien à signaler.
Ils partent en balade, comme n’importe quelle famille. Quand ils sont tous ensemble, ils ont un sentiment d’invulnérabilité. Rien ne peut les atteindre. Ils sont accomplis. Le monde leur appartient presque.
The whole place to yourselves…
Ils souhaitent immortaliser ce moment de grâce. La photographie est presque parfaite.
Presque car il existe malgré tout une ombre au tableau : Mandrake et Tubs. Ces deux hommes ne sont pas dans le décor par hasard, contrairement à ce que l’on pourrait croire.
This is business as usual. Just a happy coincidence.
Ils hantent la conscience de Hoaggie (cf Cape Fear). Eux dont Hoaggie a essayé de s’éloigner toute sa vie mais qui finissent par le rattraper là où il se croyait peut-être le plus à l’abri (cf The Guilty).
Mandrake fait le ménage. Son souvenir commence à déconstruire ce que Hoaggie avait commencé à tricoter.
I’m a magician, I make things disappear.
La vie de Hoaggie disparait en quelques minutes : Ses enfants sont liquidés, son mariage est rompu. Sa femme passe par la balustrade. À l’inverse, les flash du passé réapparaissent soudainement.
Hoaggie est fait prisonnier par ce qu’il a laissé faire subir à Mandrake. Il fut le témoin passif de l’horreur, comme beaucoup d’entre nous. Et il n’a pas levé le petit doigt. Toujours une bonne excuse. Responsable mais pas coupable.
It was a procedure.
Puis il a oublié, par facilité. La nuit, tous les chats sont gris.
Are you absolutely sure about this..?
Comme beaucoup d’entre nous, il a tenté de mettre la poussière sous le tapis comptant sur le fait que personne n’essaierait de faire le ménage.
Let’s just leave it in the past.
Rattrapé par la patrouille de ses propres scrupules, Hoaggie refuse d’abord d’endosser la faute. Il ne veut pas assumer son rôle dans cette souffrance. Mandrake se compare lui-même à une sorte de créature de Frankenstein mais Hoaggie nie toute forme de paternité.
I didn’t make you.
Au terme de son road trip nocturne, Hoaggie passe aux aveux. Des aveux de circonstance qui n’apaisent en aucune façon Mandrake. Une porte de sortie un peu facile. La confession arrive trop tard et ne peut conduire au pardon.
I should have helped you.
We were all the same to you.
Finalement c’est Tubs qui punit Hoaggie de la pire des manières : en le laissant vivre. Il ne lui reste plus rien. Sa punition ne fait que commencer. Oublier cette putain de pluie. La nuit est finie (cf It comes at night). Par contre demain ne lui appartient certainement pas. Plus permis de fermer l’oeil et d’ignorer ce qui s’est passé.
Tubs en arrête avec le carnage. Trop de sang a coulé, trop de douleur. Il est temps de se laver les mains une minute pour aller apprécier la beauté du monde. Car tout n’est pas si horrible. En tout cas, il faut le souhaiter. Tubs a laissé Mandrake et Hoaggie derrière lui. En espérant que cela puisse lui permettre de croire en des lendemains meilleurs.
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