ÇA : CHAPITRE 2
Andrés Muschietti, 2019
LE COMMENTAIRE
Tout est fait pour nous pousser à dépenser plutôt qu’à réfléchir. Des publicités plein les réseaux sociaux qui nous incitent à acheter de manière compulsive des articles pas forcément indispensables, mais qui répondent à notre besoin de satisfaction immédiate. Dans un sens, la carte de crédit nous évite bien des prises de tête, mais nous lie à jamais avec le clown dans la vitrine.
LE PITCH
Un groupe d’amis exorcise les fantômes de l’enfance.
LE RÉSUMÉ
En 2016, Adrian Mellon (Xavier Dolan) est victime d’une agression homophobe dans la ville de Derry. Passé à tabac puis jeté dans la rivière. Un clown (Bill Skarsgård) lui porte secours sur la rive, puis lui dévore le coeur.
Mike Hanlon (Isaiah Mustafa) se rend sur les lieux du crime et découvre des indices qui le renvoient vingt sept ans en arrière (cf Ça). Il appelle ses amis dans la foulée : Bill Denbrough (James McAvoy), Ben Hanscom (Jay Ryan), Beverly Marsh (Jessica Chastain), Richie Tozier (Bill Hader), Eddie Kaspbrak (James Ransone), and Stanley Uris (Andy Bean). Le groupe des losers.
Des losers sont tous devenus célèbres dans leur domaine. Ils s’étaient faits la promesse que si ça revenait, il retourneraient à Derry.
Ça est revenu, alors ils se retrouvent ensemble dans un restaurant chinois.
This meeting of the Losers Club has officially begun.
Seul Stan manque à l’appel.
Les amis se rappellent des souvenirs heureux. Puis soudainement, ils ont des visions d’horreur au moment du dessert. Après quoi leur réflexe est de vouloir partir.
Don’t you think the smartest thing we can do is just get the hell out of Derry ?
Stan est mort, il a préféré s’ouvrir les veines dans sa baignoire pour éviter de rejoindre le groupe et mener la bataille. Malgré tout, les losers restent soudés.
Chacun va devoir faire le travail individuel de se replonger dans un moment pénible les liant à Derry, pour affronter le clown et se rappeler de l’importance de le combattre – car de nouveaux enfants meurent par sa faute.
The past is buried. But you’re going to have to dig it up.
L’affrontement final a lieu sous une maison abandonnée de Neibolt Street. Grippe-Sou le clown prend plusieurs formes monstrueuses et utilisent des techniques mentales pour faire craquer les membres du groupe, comme prendre l’apparence de Georgie (Jackson Robert Scott) – le petit frère de Bill.
For 27 years, I’ve dreamt of you. I craved you. Oh I’ve missed you! Waiting for this very moment… TIME TO FLOAT!
Finalement les losers parviennent à éteindre les lumières mortes de Grippe-Sou.
Turn light into dark.
En se rappelant sans cesse qu’il n’est qu’un clown, ils parviennent à lui arracher le coeur.
A dumb fucking clown, a clown with a scared beating heart.
Eddie meurt dans la bataille. Richie part se recueillir sur un banc où il avait écrit ses initiales avec celles de son ami. Beverly comprend que Ben a toujours été amoureux d’elle et que le poème qu’elle croyait être de Bill était en fait de lui. Pour la peine, le couple décide de se marier.
Les losers reçoivent une lettre posthume de Stan qui leur donne du courage.
I lived my whole life afraid. Afraid of what would come next, afraid of what I might leave behind. Don’t. Be who you want to be. (…) If you find someone worth holding on to, never ever let them go.
Mike peut finalement quitter Derry à son tour.
We’re losers, and we always will be.
L’EXPLICATION
Ça : chapitre 2, c’est ne pas se laisser pourrir par le passé.
Le passé laisse forcément des traces, comme lorsque l’on brûle un toast (cf Shining). Les succès du passé construisent notre identité actuelle. On se construit une légende.
Memory, it’s a funny thing. People want to believe they are what they choose to remember; the good stuff, the moments, the places – the people we all hold on to.
Il n’y a pas que les succès dans le passé, on compte aussi des échecs, des erreurs ou des traumatismes (cf Il est revenu), que certain·es essaient d’oublier. La poussière sous le tapis ne disparait pas. Comme disait Fabe, ça fait partie de mon passé. Cependant, en faisant mine que le passé n’a pas existé, on se définit plus que jamais en fonction de lui.
But sometimes, we are what we wish we could forget.
C’est le cas de Bill et compagnie, qui quitte Derry en ayant vaincu le clown. Leur promesse leur semble loin derrière eux, au point que vingt sept ans plus tard tout a disparu. Le passé ne s’efface pas en fermant les yeux, avec les années.
I just don’t think that goes away because we get older.
Le retour à Derry est violent.
Something happens to you when you leave this town. The farther away, the hazier it all gets. But me, I never left. I remember all of it.
Derry leur colle aux chaussures, ou plutôt ce qui s’est passé à Derry. Partir ne résoudrait rien. Le groupe des losers a quelques casseroles qui continueraient à les empoisonner où qu’ils aillent.
You know what they say about Derry. No one who dies here ever really dies.
Grippe-Sou joue avec l’angoisse que représente ce passé qui fait bégayer Bill ou dans lequel se retrouve emprisonnée Beverly. Il fait du chantage à Richie. Chacun a ses dossiers…
You wouldn’t want anyone to know what you’re hiding. I know your secrets!
Les losers vont devoir affronter ce passé peu glorieux pendant lequel ils ont été harcelé·es ou moqué·es par leur entourage. Quelques kilos en trop, un style grotesque (cf Les beaux gosses), des angoisses dans tous les sens. Derry fait partie d’eux, quoiqu’ils en disent. Ce Derry tout pourri où le malin incarné en clown frappe les plus fragiles et les minorités à travers des personnes comme Henry Bowers (Teach Grant) ou des groupes homophobes.
Pour autant, les losers ne se résument pas qu’à Derry non plus. Ces enfants qu’ils étaient ne représentent pas une faille honteuse qu’il leur faudrait cacher. Ils ne sont pas faibles, bien au contraire.
You’re braver than you think.
Quand l’esprit de Grippe-Sou revient à la charge, les losers se rappellent de tout. Ce qui leur permet de ne pas sombrer dans les lueurs mortes du passé.
C’est le sens du message de Stan qui s’est sacrifié pour que le groupe puisse continuer à avancer. Ne pas ignorer le passé, mais ne pas se laisser parasiter par le passé non plus. De toute façon, rien ne dure éternellement.
Nothing lasts forever.