AMERICAN GANGSTER

AMERICAN GANGSTER

Ridley Scott, 2007

LE COMMENTAIRE

Le gangsterisme est une profession au même titre que le football, la politique ou la chirurgie esthétique. Dans tout métier, ce qui compte est d’avoir du style. C’est à dire une identité. C’est de cela dont l’Histoire finit toujours par se rappeler. Elle se rappelle du gangster qui braque l’autre en regardant ailleurs, l’air de rien, presque comme s’il faisait une passe aveugle en basket. Ce qui fait la différence entre les mafieux en costards de Harlem et ceux de Naples, en slips (cf Gomorra).

LE PITCH

Un gros bonnet de la drogue joue au chat et à la souris avec un petit inspecteur.

LE RÉSUMÉ

À la fin des années 60, Frank Lucas (Denzel Washington) est l’homme de main de Ellsworth « Bumpy » Johnson (Clarence Williams III), un boss connu et respecté dans Harlem. À sa mort, c’est Frank qui reprend les affaires en suivant les grands principes de Bumpy.

The most important thing in business is honesty, integrity, hardwork… family… never forgetting where we came from.

Frank va y ajouter un zest d’ambition. Il trafique de la drogue qu’il va chercher lui-même jusqu’en Thaïlande et qu’il fait revenir au pays via des avions cargo de l’armée américaine empêtrée au Viet-Nam (cf Apocalypse Now). Comme un roi du marketing, il fait le branding de son produit. La Blue Magic.

Cette héroïne fait fureur sur le marché car elle est de meilleur qualité que les autres et moins cher. Frank Lucas casse le marché. Il conquiert rapidement New York, se diversifie sur les Casinos et la prostitution. Au point qu’il peut s’offrir une mansion gigantesque où il installe toute sa famille, pour le plus grand bonheur de sa mère (Ruby Dee).

Cerise sur le gateau, Frank tombe amoureux d’une princesse (Lymari Nadal). Lui qui insiste pour rester discret finit par se faire remarquer.

His seats were phenomenal better seats than Dominic Cattano, Joe Louis shook his hand, who the fuck is this guy?

Ce succès fulgurant n’est pas longtemps ignoré par les parrains en place comme Dominic Cattano (Armand Assante) qui n’aime pas ceux qui prennent des raccourcis. Ils vont mettre des batons dans les roues de Frank.

C’est pourtant un petit détective du New Jersey qui va le faire couler. Richie Roberts (Russel Crowe) hérite de l’enquête après que son partenaire ne fasse une overdose à la Blue Magic. Il se fait remettre à sa place par Nick Trupo (Josh Brolin), un flic ripoux. Frank Lucas est un gros poisson qui fait tourner une boutique énorme qui profite également à la police.

We need to keep this cash cow alive.

Roberts a des principes lui aussi. Il est un flic honnête (cf Serpico).

You know what we do here? Cops… arrest… bad guys.

Il s’accroche et finit par réussir à faire tomber Lucas qui lâche quelques noms pour alléger sa peine. Lorsqu’il s’agit de flics verreux, cela ne compte pas. Les trois quarts de la brigade des stupéfiants tombe. Trupo se suicide. Roberts passe son examen du barreau. Lucas sera son premier client.

D’abord condamné à 70 ans de prison, il n’en fera que 15.

Business!

denzel

L’EXPLICATION

American Gangster, c’est le business à l’Américaine.

Des gangsters, il en existe partout et de toutes les cultures. Les Slaves n’ont absolument aucun état d’âme (cf Little Odessa), les Scandinaves n’en ont pas beaucoup plus (cf Pusher), les Allemands ne sont pas des gangsters, ce sont des Nazis (cf La Vague). Quant aux Suisses, ils sont des gangsters qui agissent sous la couverture confortable du secret bancaire (cf The Wolf of Wall-Street). Les Italiens sont démonstratifs (cf Donnie Brasco).

Chez les Islamistes, on aime faire l’actualité sur BFMTV. Les Anglais ne parlent pas beaucoup (cf Sexy Beast), les Français restent plutôt des garçons idéalistes et turbulents (cf Les 400 Coups) qui peuvent éventuellement finir en Révolutionnaires (cf Jacques Mesrine), les Africains sont précoces (cf Blood Diamond). Au Mexique, on pend les morts sur la place publique (cf Sicario). En Asie, les Japonais se font toujours la guerre avec les Chinois pour savoir lesquels sont les plus impitoyables (cf Sonatine). Les Israéliens sont rancuniers (cf Munich).

À New York, on fait du business.

Ce qui veut dire que si par devant ils font un sourire aux enfants, par derrière ils leur volent leurs sucettes (cf Octobre Rouge).

Frank Lucas n’est pas différent. Il a grandi à la dure.

Normal is seeing the police ride up to my house, dragging my 12 year old cousin out and tying him to a pole, shoving a shotgun in his mouth so hard they bust his teeth, then they bust two shotgun shells in his head, knocking it off. That’s what normal is to me. Didn’t give a fuck about no police then… Don’t give a fuck about no police now.

AMERICAN GANGSTER

Il a grandi sous l’influence socialiste de son prédécesseur, un truand qui redistribuait les richesses, comme Robin des Bois en quelque sorte. Un homme qui avait le sens du service.

This is the problem, this is what’s wrong with America. It’s gotten so big, you just can’t find your way. The grocery store on the corner is now a supermarket, the candy store is a McDonald’s. And this place, a super fucking discount store. Where’s the pride of ownership, where’s the personal service?

Lucas a retenu la leçon. Il a vu aussi ce qui était pourri au royaume de Bumpy. L’Amérique est une contrée capitaliste où la propriété privée reste un concept fondamental. Il ne fait pas bon être locataire aux États-Unis. Alors Frank veut être sa propre entité. C’est un auto-entrepreneur dans l’âme.

Nobody owns me, though. Because I own my company. 

Pour y arriver, il est obligé de ménager la chèvre et le choux comme Malik qui jongle entre les Corses et les Barbus (cf Un Prophète). Un peu comme un Président pourrait prétendre être pote avec Trump et Putin pour mieux tirer son épingle du jeu. Frank essaie de réconcilier l’impossible: s’élever sans faire de bruit.

The loudest one in the room is the weakest one in the room.

Frank est un gangster à l’Américaine au sens où il est avant tout un pragmatique bourré de contradictions. Par exemple il fixe des règles auxquelles il n’hésite pas à faire entorse si nécessaire. Il aime sa mère mais frappe sa femme. De manière surprenante, il se pose contre les monopoles, sauf lorsqu’il s’agit du sien. Il vit dans un pays où l’on ne tolère pas la démission, à moins d’être au sommet.

It’s not in my best interest to say this Frank, but quitting while you’re ahead, is not the same as quitting.

Il a un code de l’honneur qu’il finit par jeter à la poubelle en passant un marché avec la police. L’Amérique est un pays où l’on ne plaisante pas avec les balances, sauf celles qui donnent des flics peut-être.

Pas besoin de chercher à comprendre. C’est la fameuse Amérique de Joe Dassin. On roule des mécaniques et on ne va pas au bout de sa peine. Du gros pipeau.

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

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