NO COUNTRY FOR OLD MEN
Ethan Coen, Joel Coen, 2007
LE COMMENTAIRE
La vie se joue à rien : des poteaux carrés, un millième de seconde, un petit bout de salade coincé entre les dents, une braguette pas complètement fermée, une pièce qui retombe du mauvais côté (cf Match Point). Ce ne sont toujours que des détails qui finissent par compter le plus. Le genre de détail qui fait la différence entre Javier Bardem, Didier Bourdon et Mireille Mathieu.
LE PITCH
Un shérif, un détective et un psychopathe courent après un cow-boy.
LE RÉSUMÉ
Llewelyn Moss (Josh Brolin) tombe par hasard sur un gros pactole lié au trafic de drogue. Autant d’argent finit toujours par manquer à quelqu’un à un moment ou un autre. Llewelyn le chasseur se retrouve dans le rôle du traqué. Alerté par tous les cadavres qu’Anton Chigurh (Javier Bardem) laisse derrière lui, le shérif Bell (Tommy Lee Jones) tente de retrouver Llewyn le premier – pour le mettre à l’abri.
Malheureusement il arrive trop tard pour le sauver des cartels.
Chigurh se débarrasse de Carson (Woody Harrelson) et Carla Jean (Kelly Macdonald), la femme de Moss. Le shérif finit à la retraite, seul avec ses cauchemars – et sa femme.
L’EXPLICATION
No Country For Old Men, c’est un rendez-vous raté.
Ed Tom sent le poids de l’âge. Il souffre de la maladie de Cabrel et montre des signes évidents de c’était mieux avant. Le temps que Ed Tom regrette est celui de l’ancien monde où les vieux étaient respectés et consultés. Les vieux étaient tellement inspirants que dans certaines civilisations, les jeunes étaient presque impatients de vieillir pour profiter de l’expérience et donc avoir du recul. On consultait les anciens pour leur sagesse (cf Merlin l’enchanteur, Star Wars) parce que fut un temps, on cherchait encore à s’inscrire dans une continuité.
You can’t help but compare yourself against the old timers.
Les temps changent.
Aujourd’hui, être au fait de ce qui se passe est plus important que de comprendre ce qui se passe. La fièvre du FOMO a gagné la jeunesse aux cheveux verts. Aujourd’hui, il n’y a rien de pire que d’être vieux. Cela veut dire qu’on a mal partout, qu’on a des rides, qu’on est nécessairement corrompu. Surtout, cela veut dire qu’on n’est plus dans le coup. #old. Plus armés pour la violence gratuite du monde de demain.
Told me he killed somebody for as long as he could remember. Said if they turned him out, he’d do it again.
Ce monde cauchemardesque auquel appartient malheureusement Ed Tom, c’est le Texas de George W. Bush et l’Amérique de Donald Trump. Désertique. Sans règle (cf The Purge). Ed Tom a attendu toute sa vie que Dieu lui fasse un signe mais Dieu a quitté El Paso depuis longtemps pour aller s’installer à la Guadeloupe. C’est l’anarchie complète.
Comme dans une classe désertée par son enseignant, chacun est livré à lui-même. La mort est au coin de la rue à l’image de Chigurh qui frappe comme bon lui semble, de manière complètement imprévisible. Jouant la vie des gens à pile ou face.
What’s the most you’ve ever lost on a coin toss?
Chigurh ne montre aucune émotion. Totalement increvable, soignant lui même sa jambe tel un chirurgien avec des moyens de fortune ou quittant la scène d’un accident de voiture une fracture ouverte du radius en bandoulière. Insaisissable. Il échappe au policier qui l’avait pourtant fait prisonnier et disparaît de la chambre d’hôtel de manière mystérieuse avant qu’Ed Tom ne puisse lui mettre le grappin dessus. Il échappe aussi à Carson qui ne comprend pas ses fulgurances spirituelles.
Do you have any idea how crazy you are?
Car Chigurh est un Terminator philosophe, à mi-chemin entre Schwarzenegger et Montesquieu. Il est le néant qui nous fait nous demander quel est le sens de l’histoire, si tant est qu’il existe (cf Monty Python).
If the rules you followed brought you to this, of what use is the rule?
La question semble être hors-contexte. Il s’agit pourtant d’une question de fond. On passe notre vie à suivre des règles sans réfléchir, en pensant qu’elles s’imposent à nous. En réalité, elles ne nous empêchent pas de nous mettre nous-mêmes dans de sales draps, voire de mourir du jour au lendemain. Carson, à l’image de la jeunesse, est très attachée à la vie. Face au vide, il se dégonfle. Comme quoi, plus on se raccroche à la vie plus on est faible. Ou alors on implore son bourreau.
You don’t have to do this.
Llewelyn incarne une autre facette de cette jeunesse qui ne vit que pour le moment: l’insouciance. Il brave tous les dangers. S’imaginant increvable.
Pour cela, Chigurh le respecte – autant qu’il puisse respecter quelqu’un. Llewelyn pense qu’il peut tromper la mort. Se battant comme un beau diable avec l’audace d’un adolescent qui pense qu’on peut ramasser un gros paquet, envoyer sa femme se planquer à Odessa et que le tour sera joué sans en payer le prix. Cela ne l’empêche pas de se faire prendre par la patrouille mexicaine (cf Sicario).
C’est un monde de chasseurs. Ed Tom n’y a clairement plus sa place. Il est le justicier qui arrive toujours en retard. Comme un Zorro dépassé, qui se serait transformé en lapin blanc d’Alice au Pays des Merveilles. Plus dans le rythme. Ed Tom rêve de passer les canyons pour retrouver son père de l’autre côté et finit toujours par se réveiller au mauvais moment, dans un monde qu’il ne comprend plus.
I knew that when I got there he’d be there. Then I woke up.
Personne ne semble pouvoir éviter le destin de la pièce à deux faces (cf The Dark Knight). Tout le monde se fait rattraper par son âge (cf Benjamin Button), malgré les pansements de la chirurgie esthétique.
De la même manière que les gagnants du loto se font rattraper par les impôts, comme Llewelyn se fait prendre par les Mexicains.
You can’t stop what’s coming. It ain’t all waiting on you. That’s vanity.
La mort est le seul rendez-vous que personne ne manquera.
Un psychopathe philosophe de plus ds un exercice de commentaire …
Merci Alex.
je souhaite de tout cœur que vous ayez honte un jour ou vous serez un peu plus « mature » en relisant votre « analyse »
Ben moi je souhaite pas!
au passage c’est quand meme un comble que les commentaires soient soumis à la modération alors que ce dechet remplie d’ineptie passe au travers des mailles du filet…
Tu vois, malgré la modération, j’hérite de commentaires truffés de fautes d’orthographe et de conjugaison…
J’arrive sur ce site après avoir vu le film car j’en cherchais un éclairage n’étant pas un expert du décryptage. Et un éclairage est un point de vue subjectif et donc chacun a le sien il me semble. C’est pour cela que je ne comprendrai jamais ce genres de commentaires rageux dont j’ignore toujours le but (peut-être de la jalousie, de la vanité, de l’égo ou un manque d’ouverture d’esprit ou de bienveillance, pensant être le meilleur critique cinématographique. Je trouve ça plutôt pitoyable qu’autre chose mais cela me fait bien rire au moins. Certain doivent être bien malheureux ou ne pas avoir de vie pour écrire ce genre de » commentaires ». Ou alors écrivez le votre car avoir différentes visions est intéressant il n’y a pas de vérité immuable pour ce genre de chose me semble-t-il? Mais pour qui vous prenez-vous?
Donc merci pour ton point de vue sur ce film Basile qui m’a permis de l’interroger autrement.
Merci Raph pour ce commentaire. Comme tu l’as très bien compris, le principe est effectivement d’interroger le film en partageant / confrontant des points de vue. Je t’invite d’ailleurs à partager le tiens : comment as-tu interprété No Country for Old Men?
Vous, vous êtes un génie, je le sens. Un avis à partager sur le film, de votre côté, ou bien il s’agit juste d’être un pathétique emmerdeur de base ?
Je viens de finir le film et cette critique le complète parfaitement, merci 👍
Merci pour ce commentaire Romain.
De bons éléments d’analyse qui nous ont permis de nous éclairer sur le sens, le but et la visé de ce film intriguant.
Merci pour ce commentaire.
J aime votre analyse éclairante, sinon j aime aussi le commentaire de Ralf, bravo à vous
Merci beaucoup pour cette analyse et ce décryptage! Je suis actuellement en recherche d’informations concernant le pourquoi du titre de ce film pour le traiter en vidéo sur Youtube et je ne manquerai donc pas de citer cet article en sources. Merci encore! 🙂
Merci pour ce commentaire. On peut imaginer que le titre fait référence au sentiment qu’ont les vieux de ne plus appartenir à ce monde, comme Ed Tom. Il se sent constamment en retard. Il ne parvient pas à arriver à temps pour sauver Llewelyn. Tout comme il n’arrive pas à retrouver son père à temps dans son rêve. Les vieux sont largués.