LA CHUTE

LA CHUTE

Oliver Hirschbiegel, 2004

LE COMMENTAIRE

Il parait que chacun aurait en soi la force de changer. Michael Corleone se l’est répété toute sa vie sans être capable de quitter les affaires (cf Le Parrain 3). Céline Dion est beaucoup plus catégorique sur le sujet : on ne change pas. Point. Elle n’a pas complètement tort. Quand on a aboyé toute sa vie, comment être capable de faire quoi que ce soit d’autre? Le chien menace de mordre jusqu’à son dernier souffle.

LE PITCH

Le Reich qui devait durer mille ans s’éteint dans un bunker Berlinois.

LE RÉSUMÉ

Avril 1945. L’Allemagne prend l’eau sur tous les fronts. À l’Ouest, les Américains ont réussi des percées significatives et approchent de Berlin. Tandis qu’à l’Est, les Soviétiques de Staline sont déjà au porte de la capitale Allemande. Adolf Hitler (Bruno Ganz) est reclus dans son abri sous-terrain.

Malgré le caractère désespéré de la situation, le Führer veut encore croire à la victoire finale. Ses généraux sont embarrassés et ne savent pas comment lui faire comprendre que la guerre est perdue. Hitler enrage.

The military has been lying to me. Everybody has been lying to me, even the SS! Our generals are just a bunch of contemptible, disloyal cowards.

I can’t permit you to insult the soldiers.

They are cowards, traitors and failures!

My Führer, this is outrageous!

Our generals are the scum of the German people! Not a shred of honour! They call themselves generals. Years at military academy just to learn how to hold a knife and fork! For years, the military has hindered my plans! They’ve put every kind of obstacle in my way! What I should have done… was liquidate all the high-ranking officers, as Stalin did!

Les propos sont confus ou incohérents, les décisions irrationnelles.

The Führer has lost all sense of reality. He moves divisions that only exist on his map.

Autour de lui ne restent plus que ses plus fidèles généraux parmis lesquels Wilhelm Keitel (Dieter Mann), Hans Krebs (Rolf Kanies) ou Wilhelm Burgdorf (Justus von Dohnányi). Martin Borman (Thomas Thieme) joue ses dernières cartes. Eva Braun (Juliane Köhler), la maitresse d’Hitler, est là également.

Les hauts dignitaires du régime Nazi ont déserté. Hermann Göring, Heinrich Himmler (Ulrich Noethen) et Albert Speer (Heino Ferch) sont accusés de traitrise. C’est la débandade.

Même s’il finit par reconnaitre sa défaite, Hitler refuse d’être fait prisonnier par les Rouges.

It’s time to end this spectacle.

On commence doucement à parler de suicide dans le bunker.

The war is lost… But if you think that I’ll leave Berlin for that, you are sadly mistaken. I’d prefer to put a bullet in my head.

La bataille de Berlin fait rage. Les jeunes troupes de la jeunesse hitlérienne sont décimées, tout comme les miliciens ou les membres de l’armée de réserve. Ce n’est plus qu’une question d’heures. Hitler et Eva Braun prennent tous les deux une capsule de cyanure. Le Führer y ajoutera une balle dans la tête. Les corps sont brûlés dans la cour de la Chancellerie.

Joseph Goebbels (Ulrich Matthes) tente en vain de négocier avec l’ennemi. Il se suicide à son tour, avec toute sa famille.

I won’t use my final hours as Reich Chancellor to sign a statement of surrender!

L’EXPLICATION

La Chute, c’est ce qu’on doit retenir.

On aime à dire que le voyage compte plus que la destination. Alors que pourtant, un récit n’a de valeur que par son dénouement final. La chute est le moment que tout le monde attend afin de mieux comprendre ce qui a été raconté. Elle permet de prendre la mesure de l’ensemble.

En politique, l’accession au pouvoir est une chose (cf Macron a l’Elysée : le casse du siècle, la Conquête). Elle met notamment en scène le talent de l’ambitieux dans son machiavélisme.

Le règne du souverain en est une autre (cf Gladiator). You’re only king for a day. Le monarque prend conscience de l’envers du décors. Gouverner, c’est avant tout beaucoup d’ennuis. Durer n’est pas si évident.

La manière dont on quitte la scène reste peut-être le plus important. S’il faut faire une sortie, qu’on la fasse en beauté! (cf Batman) C’est effectivement la conclusion qu’il faut soigner puisque ce n’est souvent que de la fin dont on se souvient le mieux.

Certains se font sortir trop tôt (cf JFK) tandis que d’autre n’arrivent pas à passer la main (cf Nixon). Toute la différence entre l’élégance et la médiocrité.

Pour ce qu’il s’agit d’Hitler, le petit Caporal hargneux aura peut-être électrisé les foules mais il aura surtout terrorisé des millions d’Allemands, fait exterminer des millions de Juifs et conduit son peuple dans une impasse.

Ses fanatiques lui pardonnaient tout.

It seems he doesn’t want anyone to see inside him. I mean deep inside. In private, he can be such a caring person. But then he says… such brutal things.

Beaucoup de ses soldats lui vouaient une admiration sans limite.

There is no one who will replace him! The Führer is the Führer!

Et pourtant, la chute d’Hitler rappelle à quel point cet homme était fou. Il a emporté toute une nation avec lui d’un délire de grandeur vers les bas-fonds de l’Histoire.

Sa chute n’a rien eu de grandiose contrairement à ce que certains ont pu affirmer. Un capitaine de bateau qui n’abandonne pas son navire en train de couler (cf Titanic).

You must be on stage when the curtain falls.

Au contraire, sa chute fut absolument minable.

Lente. Pénible. Dans son bunker, il laisse éclater sa paranoïa, sa vulgarité, son agressivité, son égoïsme jusqu’au bout. Mauvais perdant. Son empire s’effrite. Petit gouvernant qui laisse des enfants et des retraités se faire charcuter par des bouchers slaves au nom d’une idée ridicule : le fantasme d’une race supérieure (cf Requiem pour un Massacre).

Ce qui devait arriver est arrivé : Hitler a pris le pouvoir (cf L’étau de Munich). Puis il a pitoyablement échoué dans la mission qu’il s’était fixé. Il n’a absolument rien assumé de sa déroute puisqu’il a demandé à Speer de tout effacer. Puis il a démissionné en se tirant une balle dans la tête. Un vrai salaud au sens Sartrien.

Il a menti à son peuple, n’hésitant pas à abandonner les siens.

Hitler fut véritablement pathétique, du début à la fin.

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

8 commentaires

  • Super article comme toujours mais les citations en anglais, c’est pas possible !!! 😆🤣

    • Merci Louise. Je comprends… Vous auriez préféré les citations en Allemand. 😄

  • Sans être mauvais, je trouve cet article un peu creux. Aussi, j’aimerais y apporter mon point de vue, car j’ai versé des larmes en voyant ce film. Je trouve que ce n’est pas tant un film sur la fin d’Hitler que sur celui de son entourage et de la population berlinoise. C’est la fin, pas que pour le Führer, pour toute la troupe. Au début du film, tout est droit et souriant. Au fur et à mesure que la situation se dégrade, les sourires laissent place à la peur et au cynisme. Cela se remarque jusque dans les costumes qui se font de plus en plus débraillés pour la plupart des protagonistes.

    La Chute, comme vous l’avez dit, c’est un film qui traite du final, du dernier chapitre de l’histoire. Sénèque disait « La vie est une pièce de théâtre, peu importe l’entrée pourvu qu’on ne rate pas la sortie ». Et si la sortie d’Hitler est effectivement assez pathétique, ce n’est pas le cas de tous ses proches. On y trouve de tout. Les fanatiques qui tuent leur famille entière parce qu’ils ne peuvent pas accepter une vie sans parti national-socialiste. Les opportunistes bien dégueulasses qui vont tenter de se placer dans l’Allemagne de demain et de négocier leur non-condamnation. Les généraux inflexibles qui tentent envers et contre tout de maintenir la barre dans tout ce capharnaüm. Et enfin ceux qui tenteront de limiter la casse comme ce médecin dont j’ai oublié le nom qui se retrouve à utiliser son grade de SS pour sauver des vies humaines. Ironique, n’est-ce pas ?

    Et au-milieu de cette anarchie militaire, il y a les berlinois. Et on peut dire que ce n’est pas mieux. J’ai d’ailleurs été surpris que Hitler propose à ses secrétaires de prendre leur dernier avion pour évacuer, tout en sommant ses officiers de rester car comme dit plus haut : le capitaine coule avec le navire. Pendant ce temps, c’est la guerre dans les rues. L’infanterie allemande ne soucie plus des ordres du Führer, ils ont trop à faire avec l’Armée Rouge qui les déborde de tous les côtés, ils tentent simplement de faire leur boulot. Et il y a les enfants-soldats fanatisés et prêts à se faire trucider. Je n’oublierai jamais cette jeune fille à la tresse blonde, refusant le mot « défaite » devant son canon. Un peu plus tard, lors d’une scène muette, on la voit, sous le feu de l’ennemi, jeter son arme devant son chef (probablement aussi jeune qu’elle), avant de faire le salut hitlérien en hurlant deux mots que l’on identifie sans peine. Le pauvre sous-officier de fortune la flingue, médusé, avant de se tirer une balle dans la tête.

    En fait, je trouve que cette scène résume bien le film. C’est une œuvre sur la fin, c’est vrai, mais pas n’importe laquelle. On parle de la fin de l’empire Nazi, un régime sous lequel l’espoir est un mot qui n’existe pas. Car rien ne lui subsiste. L’absence d’espoir porte un mot parlant : désespoir. Toute cette franche de la population qui avait cru à ce nouveau système est désespérée. Il n’y a plus rien ensuite, autant mourir. Et c’est là la tragédie du film. Cette détresse palpable est touchante, et donne même aux dirigeants Nazis les plus virulents un visage humain. Avez-vous déjà imaginé le chef de la Gestapo ou de la SS fondre en larmes en voyant la fin arriver ? C’est pourtant ce qui se produit, l’effondrement est là. Pas étonnant que le film ait été blacklisté pendant longtemps en Europe, il rappelle que même les pires ordures ne sont que des êtres humains avec leurs peurs.

    Et c’est pour ça que j’aime ce film. Il est dur, très dur même. Les acteurs sont fantastiques, la direction est impeccable et les plans sont magistraux (encore une fois, ça reste mon avis). Il montre des humains embarqués sur une torpille sans marche arrière qui sont livrés à une fin probablement sans issue. Chacun réagira à sa manière. Vous glissez souvent des extraits pour illustrer vos propos alors je vais faire de même avec cette citation de Darkest Dungeon : « The human mind, fragile like a robin’s egg ». Le navire a coulé avec le capitaine. Maintenant, reste à voir ce qui adviendra de l’équipage.

    Post Scriptum : le film n’est pas totalement exact au niveau historique mais il reste un bijou de recherches bien au-dessus du cinéma moyen. D’ailleurs la scène où Hitler rencontre le garçon est presque historique. Il fait allusion à la dernière photo du Führer où on le voit avec un enfant-soldat. En effet, sa dernière sortie de son bunker a été une remise de médailles à une équipe de la Flak. Bref, merci de m’avoir lu.

    • Merci pour ce commentaire. Il semble que vous êtes plus sensible à la réaction de toutes ces personnages en plein naufrage. Humains dans leur monstruosité, pour certains. Tandis que je me suis plutôt concentré sur le responsable du désastre.
      Qu’avez-vous pensé de Titanic?

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