L’ÉTAU DE MUNICH
Christian Schwochow, 2022
LE COMMENTAIRE
Les enfants sont jetés dans le grand bain à un moment ou un autre (cf Le Stratège). Leur vie n’était jusque là qu’un petit tour de chauffe. À présent, ils jouent dans la cours des grands. On ne peut pas lui échapper. Fini les balivernes.
LE PITCH
Deux étudiants étrangers se retrouvent prisonniers des événements.
LE RÉSUMÉ
Hugh Legat (George MacKay) fête son diplôme de Oxford en compagnie de Paul von Hartmann (Jannis Niewöhner) et sa petite amie Lena (Liv Lisa Fries), alors que les national-socialistes haussent le ton en Bavière. Paul s’apprête à rentrer à Munich.
I’ll never abandon Germany.
Ce patriote est d’ailleurs plutôt emballé à cette idée.
There’s a new age beginning. (…) We can look forward to that.
Six ans plus tard, Hartmann déchante. Les Nazis se révèlent être des brigands qui prônent la violence et la xénophobie au nom de la Grande Allemagne. Il a vu ce qu’ils étaient capables de faire à son amie Lena après avoir découvert qu’elle était Juive.
Désormais bien placé au Ministère des Affaires Étrangères, il complote en compagnie d’un général de la Wehrmacht pour renverser le Fürher (cf Valkyrie).
À Londres, Legat travaille pour le Neville Chamberlain (Jeremy Irons) qui fait tout son possible pour préserver l’équilibre en Europe au moment où la guerre menace. Hitler (Ulrich Matthes) a pris les Sudètes comme prétexte pour annexer la Tchécoslovaquie toute entière. Une provocation de plus de la part du Chancelier Allemand à l’égard de ses voisins Anglais et Français.
La diplomatie se retrouve à Munich pour négocier.
Hartmann a mis la main sur des documents secrets explicitant la volonté d’Hitler de faire main basse sur l’Europe. Il compte bien partager cette information avec son ami Legat, et peut-être même rencontrer Chamberlain en personne pour le convaincre de ne ratifier aucun accord. S’il a l’occasion de se retrouver en tête à tête avec le Führer, il envisage carrément de l’abattre.
Les efforts de Harmann sont vains. Chamberlain éconduit l’Allemand et sacrifie la Tchécoslovaquie.
I applaud your courage young man but I have to give you a lesson in political reality.
Il rentre à Londres où il est accueilli en triomphe. Avec un ton rassurant, il annonce qu’il a même signé un pacte de non-agression symbolique entre le Royaume-Uni et l’Allemagne.
The settlement of the Czechoslovakian problem which has been achieved is in my mind merely a prelude to a larger settlement, which, for all Europe, may bring peace.
Legat regarde déjà au ciel avec inquiétude. Il rentre auprès de sa femme (Jessica Brown Findlay) et lui annonce la couleur.
When war comes I need to be useful. Don’t laugh but I think I might join the RAF.
À Munich, Hartmann a eu l’occasion d’abattre le monstre. Sa main est finalement restée tétanisée.
I could have shot Hitler. (…) But my hand would not move.
Do you know why?
What would give me the right?
Il fond en larmes. Son amie Helen (Sandra Hüller) le prend dans ses bras.
Winter is coming…
L’EXPLICATION
L’Étau de Munich, c’est se préparer au pire.
Maxime le Forestier chantait qu’on ne choisit ni ses parents, ni sa famille. Pas plus qu’on ne choisit les trottoirs de Manille, de Paris ou d’Alger pour apprendre à marcher. Le poète parlait déjà là de prédétermination.
On ne choisit pas non plus son époque.
We don’t choose the times we live in.
Ce n’est pas la jeunesse sacrifiée sur l’autel du covid qui dira le contraire – encore qu’elle peut remercier de ne pas être née un siècle plus tôt.
Même si nous souhaitons toujours avoir le choix, force est de reconnaître que l’Histoire choisit parfois pour nous. Bien que la situation soit explosive à la maison, Legat est prié par Sir Horace Wilson (Alex Jennings) de se rappeler du sens des priorités (cf Raison d’État). En l’occurrence, ça chauffe en Europe! Le divorce attendra.
There are times when one’s family has to take a back seat. Now is such a time.
Le temps s’impose à nous tout comme il conditionne la manière dont nous réagissons au présent. La Première Guerre Mondiale est encore présente dans les consciences. Chamberlain est marqué par les horreurs de la guerre. Les sympathiques poilus étaient surtout les terribles gueules cassées (cf Au revoir là-haut). Le gaz moutarde. Les tranchées (cf Les Sentiers de la Gloire). Il s’en rappelle.
Plus jamais! Chamberlain est prêt à tout pour éviter le pire, quitte à négocier avec un fou furieux.
I should do anything, sacrifice anything, to maintain the peace. This is sacred to me. (…) I fear for the spiritual wellbeing of our people if they don’t see their leaders doing absolutely everything to prevent another conflict.
Car le pire ne s’évite pas toujours. Au mieux, il se retarde.
It’s coming. Sooner or later.
Tout ce que nous pouvons faire est de nous préparer (cf Take Shelter).
The only choice we have is how we respond.
Chamberlain essaie de gagner du temps. Une petite année pour prendre une dernière respiration avant l’apnée.
If he breaks his word, the world will see him for what he truly is! It’ll unites the allies. Might even bring the Americans on board. If I’m made to look like a fool, well it’s a small price to pay.
Les jeunes loups voient la tempête arriver et réagissent de manière différente. Hartmann a lu l’avenir. Il est paniqué et veut, tout comme Chamberlain, éviter le pire. Utiliser la force pour maitriser le mal. Tuer Hitler avant qu’il ne devienne ce qu’il va devenir (cf Dead Zone). Legat a vu l’avenir lui-aussi, mais espère qu’une issue soit possible par le dialogue.
We need to talk.
I have to fight.
There’s always hope.
Eux aussi sont pris en otage, impuissants.
Rien n’empêchera cependant ce qui va se produire (cf Lawrence d’Arabie). Comment pouvait-on empêcher la suite ? Les Anglais n’étaient pas encore prêts pour Churchill (cf The Darkest Hour). À croire que certains événements sont incontournables.
Le mieux que nous puissions faire est d’être conscient que le pire est toujours à venir. Si cela peut nous aider à profiter tant qu’on peut.