ANATOMIE D’UNE CHUTE

ANATOMIE D’UNE CHUTE

Justine Triet, 2023

LE COMMENTAIRE

Après une vie à affronter la pénibilité du jugement d’autrui au quotidien, on pourrait s’estimer prêt·e à affronter le tribunal – le vrai. Rien ne prépare cependant à devoir faire face à son propre jugement. Lors de ce moment dernier où l’on se retrouve seul·e avec soi-même.

LE PITCH

Une femme est accusée d’avoir tué son mari.

LE RÉSUMÉ

Sandra (Sandra Hüller) est romancière. Elle accueille une étudiante (Camille Rutherford) venue l’interviewer pour parler de son travail. À l’étage, Samuel (Samuel Theis), le mari de Sandra, fait des travaux dans le chalet. Il monte volontairement le volume d’une version rappelant P.I.M.P. de Fifty Cent.

Ça devient difficile là….

Sandra, agacée, ajourne l’interview. L’étudiante s’en va.

Daniel (Milo Machado Graner), leur fils malvoyant depuis un accident à l’âge de quatre ans, sort son chien Snoop. Lorsqu’il revient au chalet, son père git au sol.

Sandra contacte son avocat, Vincent (Swann Arlaud). Quatre scénarios sont considérés :

  • Accident
  • Meurtre commis par un tiers
  • Meurtre commis par Sandra
  • Suicide

L’autopsie conclut que la lésion aurait été créée antérieurement au choc avec le sol. Sandra est inculpée. Elle affirme pourtant qu’elle dormait au moment du drame.

Je ne l’ai pas tué!

Ce n’est pas la question…

Je pense qu’il est tombé.

Personne ne le croira.

Vincent se repose sur la présomption d’innocence et va défendre la thèse du suicide de Samuel.

Sandra est Allemande. Lors du procès, elle devra faire l’effort de s’exprimer en Français.

En l’absence de témoin, la justice doit s’appuyer sur les faits. Pour ne pas que Sandra puisse influencer Daniel, une psychologue (Jehnny Beth) reste en permanence avec l’enfant.

L’avocat général (Antoine Reinartz) essaie de montrer qu’il y a une combinaison d’un coup violent et d’une impulsion pour faire chuter la victime. Vincent parvient à montrer qu’il ne s’agit que d’une hypothèse. Sa contre-expertise met en doute la possibilité d’un meurtre. L’avocat général riposte avec la même stratégie.

Toutes ces données rendent cette thèse très improbable…

Mais pas impossible.

Sandra évoque une tentative de suicide de son mari dont personne n’a été témoin. Samuel voyait un psy. Elle l’a retrouvé un matin après qu’il ait vomi des somnifères.

On n’est pas plus avancé. Il va falloir aller fouiller dans la relation du couple.

Samuel travaillait lui-aussi sur un projet d’écriture (cf Shining). Depuis quelques temps, il enregistrait des scènes de leur vie quotidienne pour s’en inspirer. Le tribunal procède aux écoutes de ces enregistrements, dont une dispute datant de la veille. Tout le monde espère des réponses.

La cour découvre que le couple s’entre-déchirait depuis l’accident de Daniel. Samuel se sentait responsable. Sandra lui en voulait, à juste titre. Il était également frustré de ne pas réussir à faire décoller sa carrière d’écrivain, soit disant par manque de temps. Elle lui reprochait de jouer les victimes. Tous les deux faisaient chambre à part. Elle le trompait. Il lui reprochait de tout faire en fonction d’elle, bien qu’ils vivaient en France. Elle était violente physiquement avec lui.

Cependant, la dispute ne prouve absolument rien.

C’était une dispute. On exagère, on déforme…

Daniel assiste à toutes les sessions. Perturbé par ces révélation et parasité par les médias, l’enfant ne sait plus. Il se rappelle que Snoop s’était senti mal au moment où son père aurait fait cette tentative de suicide. Daniel donne des somnifères à son chien – afin de vérifier si sa mère dit vrai. Puis il tranche.

Si j’imagine ma mère qui fait ça, je comprends pas. Alors que si j’imagine mon père, je crois que je peux comprendre. 

Il insiste pour apporter un dernier témoignage lors duquel il évoque une conversation avec son père, suggérant qu’il était effectivement suicidaire.

La présidente (Anne Rotger) finit par prononcer l’acquittement.

Sandra peut rentrer chez elle libre. Son esprit n’est cependant pas libéré.

Je croyais que je me sentirais soulagée. (…) C’est juste fini.

Elle embrasse son fils puis va se coucher avec Snoop, qui s’en est sorti lui aussi.

L’EXPLICATION

Anatomie d’une chute, c’est essayer de comprendre comment on en est arrivé là.

Dans les contes pour enfants, les couples vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants. Cette conclusion intervient en général juste avant la lune de miel pour clore l’histoire, en forme de pirouette. Aucune preuve de ce bonheur n’est apportée. On veut y croire. Il faut y croire. C’est tout.

Dans la réalité, les couples galèrent (cf Les Noces rebelles, Blue Valentine, Snow Therapy, Vivarium, The Beta Test). Cela ne ressemble pas à un long fleuve tranquille mais plutôt à une longue chute (cf Le Chat). Les sentiments s’érodent avec le temps. L’amour ne suffit plus. Les disputes empoisonnent la vie. Elles ne présentent aucune résolution. Dans l’impasse, le couple finit souvent par s’écraser (cf Marriage Story).

Sandra est très consciente de la difficulté.

Le couple est chaotique.

Son couple a été mis à l’épreuve de l’accident tragique de Daniel (cf La Guerre est déclarée). Puis il a souffert de ses ambitions inassouvies de Samuel. Il a été miné par les besoins de fonctionnement de Sandra. Le projet qu’ils s’étaient construit est tombé du troisième étage.

Cette mort de Samuel pourrait n’être qu’une représentation d’une séparation brutale.

Le procès sert à comprendre ce qui s’est passé pour attribuer une responsabilité. Ce qui va remuer des souvenirs douloureux. Sandra le sait.

Il va falloir que j’affronte des choses.

On passe du temps à faire l’anatomie de cette chute, sous tous ses angles, sans comprendre.

Quand il manque un élément, il faut chercher autour. On est obligé de se demander pourquoi la chose est arrivée.

L’analyse présente une limite puisque les torts sont clairement partagés. L’enregistrement de la dispute donne l’impression d’un tie-break dont personne ne ressort vainqueur. Chacun se donne coup pour coup. Le couple chute ensemble.

La vérité n’est ni dans un camp, ni dans l’autre.

Ce n’est pas simple.

Puisqu’il faut bien clore les débats, Sandra est acquittée – par défaut. Elle garde la chute de son mari sur la conscience. C’est également la sienne. Il lui faudra vivre avec.

Parfois on essaie de comprendre, et on n’y parvient pas. Quand la justice ne parvient pas à statuer, il faut se faire une religion. Sandra sait ce qu’il s’est passé. Daniel a besoin de choisir sa vérité (cf Memento).

Parfois on essaie de comprendre, et cela ne suffit pas.

En absence de témoin et d’aveu, on est forcé d’interpréter ce qu’on a…

La vie continue, sans Samuel. Maintenant il va surtout falloir continuer à écrire des bouquins tout en finissant les travaux du chalet, et surtout éviter de reproduire des expériences dangereuses avec le chien. Parce que les animaux n’ont pas à payer les pots cassés pour leurs maîtres.

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

20 commentaires

  • Louais…Heureusement que toutes les vies de couple ne ressemblent en rien à ce schéma négatif. Pas plus qu’une maison ne se résume à la fosse sceptique. Et Heureusement que tous les parents ne ressemblent pas à ceux-là : la mère, en particulier, est tout à fait abjecte. Le fait qu’elle vive en France et ne fasse même pas l’effort de parler français en dit long sur sa personnalité…et la mentalité plus que malsaine de cette bourgeoisie bobo ayant acclamé ce film. Que pour ma part j’ai trouvé aussi lamentable sur la forme que sur le fond.

    • Merci pour votre commentaire. Vous semblez vous intéresser davantage au rôle de Sandra dans cette histoire.
      Comment avez vous interprété « Anatomie d’une Chute »?

  • Bonjour. J’y ai vu avant tout un laborieux exercice de style (pseudo) cinématographique, du mauvais cinéma d’auteur germanopratin et une illustration frappante du narcissisme d’une partie de cette bourgeoisie bobo sur le plan artistique comme sur le plan moral. Des personnages narcissiques dans un film du « cinéma d’auteur » nombriliste et acclamé par le milieu le plus narcissique et nombriliste qui soit.

    J’avoue ne pas avoir une très haute opinion du cinéma français voire occidental contemporain.( Exceptions mises à part)
    Le plus triste c’est qu’il existe certainement de jeunes réalisateurs et scénaristes français très talentueux…Mais il doit leur être extrêmement difficile de percer dans ce milieu (nivellement par le bas, politiquement correct, entre-soi etc..)

    Bonne journée.

    • Merci Oliv pour ce lien vers une autre explication, qui serait que l’on ne dit jamais tout ce que l’on pense – accréditant la thèse du meurtre. Comme pour beaucoup de films à la fin ambigüe (cf Inception, La Route), il me semblait plus amusant de chercher une autre signification plutôt que de simplement prendre position pour un camp ou l’autre.
      Par ailleurs, je ne pense pas que le propos féministe soit la raison pour laquelle le film soit nommé et récompensé. Il me semble qu’Anatomie d’une Chute est avant tout un film dans l’air du temps et qui utilise un ressort narratif passionnant puisqu’il met les spectateurs dans la peau des jurés – sans qu’on leur donne clairement la réponse sur ce qui s’est effectivement passé. On retrouve cette approche dans Rashomon, ou plus récemment dans la série The Affair.

  • Ce film raconte oh combien il peut être difficile d’être reconnu innocente lorsque l’ on est compagne, femme, autrice à succès, étrangère, avec le vide du manque de témoins crédibles aux yeux de la justice (dans un premier temps). On voit avec brio comment l’avocat de l’accusation, par le ton, s’acharne pour prouver sa vérité et décrédibiliser tout ce qui va intervenir en preuve contraire, le témoignage du fils mais aussi le témoignage de l’étudiante. On voit ici clairement le profil que l’avocat souhaite dépeindre : une femme violente, égoïste, alcoolique, infidèle qui a certainement tué son mari de sang froid en se donnant des airs de Sainte. On sépare la mère de l’enfant par la présence d’ une psychologue tierce pendant toute la durée du procès. Et même l’avocat de la défense, qui plus est clairement amoureux de l’accusée ne semble pas véritablement croire en son innocence.
    Rattrapée également par ses livres que l’avocat et les journalistes reprennent, sans en considérer l’aspect fictif, comme un aveux d’une potentielle préméditation de meurtre.

    Dans cette tempête accusatoire, Sandra, se battera pour prouver son innocence en refusant dans un premier temps la théorie du suicide, puis en acceptant par la suite d’emmener la cour vers cette théorie, aucune autre n’étant réellement plausible mise à par sa propre culpabilité. On y voit la peine mêlée à l’incompréhension face à la déformation par l’avocat de l’accusation sur tous les aspects de leur vie. Quelques questionnements sur ses mensonges au début concernant son bleu et l’atmosphère de sa relation avant la mort de Samuel qui l’a rattrapent vite par l’arrivée d’éléments supplémentaire et dont elle devra peiner à s’expliquer par la suite. Une manière de prévenir le spectateur que toute vérité est à dire tout de suite pour ne pas risquer de perdre la confiance d’autrui.

    Une relation de couple banale, entachée par l’accident terrible de leur fils qui n’aura de cesse que d’agrandir dans l’esprit du défunt un sentiment d’incapacité à tout que ça soit l’écriture dans sa vie professionnelle ou sa responsabilité en tant que père en plus de sa capacité à suffire à sa femme, et un fardeau qu’il tentera de remettre sur sa femme car encore une fois, incapable de faire face à sa responsabilité.

    Daniel, quant à lui, décrédibilisé depuis le début par l’association de son âge, son statut subjectif de fils et son handicap n’aura de cesse que de devoir faire valoir sa voix crescendo pendant toute la durée du procès dont on veut l’évincer en partie, dans un premier temps. Empreint à douter de sa mère suite à l’écoute de tous les témoignages accablants, il réussira finalement à la fin à obtenir, par son témoignage, un rôle que l’on suppose décisif dans la décision finale de la cour.

    La scène finale nous montre que Sandra n’a rien gagné de vicieux dans cette histoire : elle subit la perte de son compagnon, une relation à moitié brisée avec son fils, et nous ne la verrons pas tomber dans les bras de son avocat mais plutôt finir sa nuit seule, puis rejointe de manière assez tendre et triste à la fois par le chien de son fils qui lui prêtera seule compagnie au clap de fin.

    Un film intéressant par sa vision et par les gros clichés dans lesquels il ne tombe pas. Mais aussi dénonciateur de ce que peuvent faire subir une justice et les médias à une femme qui vient déjà de perdre son compagnon.

    • Merci beaucoup Anne pour cette belle mise en perspective. Effectivement, on peut voir dans « anatomie d’une chute » le portrait d’une femme dans l’ombre de son défunt mari. Elle abandonne tout pour vivre à la montagne avec lui, supporte ses sautes d’humeur liées à son manque de talent. Malgré tout, elle est victime de son suicide et accusée à tort de son meurtre! Mais comme vous le relevez également, elle n’a pas tout perdu puisqu’elle dort quand même avec le chien.
      Votre éclairage rappelle certains personnages féminins sacrifiés comme Joanna (cf Kramer contre Kramer ) ou encore Francesca (cf Sur la Route de Madison ).

  • Très, très déçu par ce film. Seule la séquence du procès/reconstitution de la « dispute » avec la voix du fils est à sauver.
    Image banale, montage linéaire, scénario lent et film très (trop?) long……

    • Merci Me pour ce commentaire. Au delà de la lenteur du scénario, que gardez-vous de l’histoire ? Quel est le message d’Anatomie d’une Chute selon vous ?

  • Je trouve que le film est particulièrement bien filmé. On alterne entre images bien filmées, auxquelles on est habitué et images prises derrière le pare-brise de la voiture ou prises de vue à l’ancienne, avec un léger voile vintage dans l’enceinte du tribunal. Les plans sont très rapprochés. On se sent comme face aux différents interlocuteurs. Le spectateur est comme dans la salle du tribunal. Le rythme du film est peu commun car très lent et laisse le temps au spectateur de réfléchir, d’analyser les propos qui lui sont tenus et de se faire une idée, nous sommes comme dans la peau d’un juré, parfois dans la peau de Sandra ou de son fils, de l’avocat de l’accusation ou de La Défense.À la fin, on attend de nous évidemment notre verdict.
    J’ai beaucoup aimé l’ambiguïté finale sur la culpabilité non tranché de la femme, Sandra. J’ai beaucoup aimé également l’inversion des rôles parents-enfants. On peut se demander tout le long du film si l’enfant ne cherche pas à protéger volontairement sa mère. On peut se demander si l’enfant n’a pas fait un choix de raison, car ayant perdu son père, tout ce qui lui reste, c’est la présence de sa mère qui, condamnée, ne lui servirait à rien, sinon à lui apporter du malheur. Cet enfant, qui est étrangement si mature, est, comme nous, dans la position de juger et trouver un éventuel coupable. Pour ma part, je pense qu’elle a tué son mari. Elle dit durant le procès qu’elle aime se reposer dans son lit, alors que son mari dort sur la banquette. Or, lors de la scène finale, elle remplace son mari et dort avec le chien. Pour ma part, je pense que cette chute de film explique la chute du couple. La femme a remplacé le mari. Elle est prête à passer à autre chose. Elle reprend sa place de célibataire, refuse les avances de son avocat qui est épris d’elle.

  • Comment ça se fait que Daniel lave son chien au début du film? Et il le sent comme s’il avait encore une odeur de vomi après 6 mois… C’est comme si y avait un indice là mais je ne comprend pas.

    • Merci Simon pour cette question. Selon moi, il s’agit sans doute d’un détail visant à détourner votre attention vers une fausse piste. Comme si le chien était la clé de ce mystère.
      Au contraire, le chien devient plutôt le motif qu’utilise Daniel pour se convaincre que son histoire est la bonne.
      Ce couple a eu une discussion très honnête et n’y a pas survécu. Alors peut-être convient-il de regarder ailleurs…?
      (cf Le Prestige)

  • Malgré toutes ses qualités et le jeu des acteurs, parfois brillant, c’est un film trop féminin pour moi pour être totalement juste.
    Il fait passer le personnage principal pour la victime alors que c’est au mieux, une victime collatérale d’un couple qui ne trouve (cherche) pas de solutions et au pire, la responsable n°1. Qui est mort ? Samuel ! Qui a le plus souffert ? Daniel !
    Coupable du meurtre ? Peut-être, peut-être pas, mais est-ce la question finalement ?
    Coupable de n’avoir rien proposé pour sauver son couple ni aidé Samuel dans sa démarche de renaissance ? Oui, bien sûr.
    A quoi ressemblera la suite ? Plus de complicité avec Daniel ? ou plus d’aventures avec des étudiantes ? « il faut que tout change pour que rien ne change » écrivait Visconti dans le Guépard. Au moins, cette fois, elle ne sera pas dérangée par 50 Cent.

    • Merci Vonlaseine pour ce commentaire.
      N’est-ce peut-être pas une explication ?
      La femme, étrangère, au premier rang de la suspicion.
      Tout semble l’accabler, au point d’en oublier la présomption d’innocence…

  • Bonjour, merci pour cette explication !

    À travers ce film, j’ai pu en retirer un message principal: on veut se convaincre des idées préconçues que l’on a. Tout au long du film, les personnages cherchent à se convaincre de leur idée quant à la culpabilité de Sandra.

    L’avocat général et le psychiatre de Samuel, tous deux persuadés de sa culpabilité, vont constamment remettre en question les arguments de défense de Sandra, bien que ceux-ci puissent sembler pertinents. Si ces arguments ne conviennent pas à l’idée que ces personnages ont de l’affaire, ils les rejettent violemment en décrédibilisant Sandra.

    Vincent, son avocat, n’a pas l’air de croire en sa véritable innocence, mais va tout de même la défendre, car, éprouvant des sentiments amoureux pour elle, il ne veut pas croire que celle-ci ait pu tuer son mari.
    De même, Daniel ne veut pas croire que sa mère ait pu commettre un tel acte de cruauté envers son père et va jusqu’à empoisonner son chien pour trouver les preuves dont il a besoin. La psychologue l’accompagnant le dit d’ailleurs lorsqu’ils font tous les deux une balade en forêt: Daniel doit trancher sur ce qu’il pense.

    Cela démontre bien qu’il n’y a pas de réelle explication à la mort de Samuel: aucune explication n’est la bonne. Cette idée est renforcée par le fait que l’on n’arrive pas vraiment à se ranger du côté de Samuel ou de Sandra: l’une est froide et possède peu de compassion, l’autre est capricieux et limite enfantin. Au final, les torts sont partagés. Peut-être qu’il en est de même pour la mort de Samuel. Peut-être est-ce ni un meurtre, ni un suicide, ou peut-être est-ce les deux à la fois.

    Qu’importe si Sandra est coupable ou non, on préfère largement se conforter à nos croyances plutôt qu’à la vérité. Le plus important, ce n’est pas ce qui s’est réellement passé, mais ce que les gens croient qu’il ait pu se passer, comme le dit Vincent à quelques mots près. Tous les personnages cherchent des explications qui confortent ce en quoi ils croient.

    Tout au long du film, nous sommes poussés à nous faire un avis sur cette affaire. On a envie de croire que Sandra ait pu tuer son mari, car comme le dit plus ou moins le critique littéraire durant l’émission que Sandra voit à l’hôtel: l’idée d’une romancière écrivant sa vie dans ses livres et ayant assassiné son mari est bien plus attirante qu’un « simple » suicide. Mais il ne faut justement pas prendre position: si nous le faisons, nous risquons d’occulter des éléments pouvant faire pencher la balance d’un côté ou d’un autre, nous éloignant de la vérité (bien qu’il n’y ait ici pas de vraie vérité. Cela semble être plus une vérité générale énoncée qu’une réelle explication à la culpabilité de Sandra).

    Qu’en pensez-vous ? Cela semble-t-il trop tiré par les cheveux ? Ai-je, moi aussi, envie de me convaincre d’une explication, tout comme les personnages dans ce film ? :’) Ou bien peut-être me suis-je trop focalisé sur un détail ?

    En tout cas, j’ai beaucoup aimé le style très réaliste du film. Le fait que les acteurs parlent plus qu’ils ne jouent accentuent très fortement l’effet de réalité autour de ce film.

    • Merci Bob pour ce commentaire. Exactement. Anatomie questionne évidemment le rapport à la vérité, puisque personne ne sait vraiment ce qui s’est passé. Le procès devient l’occasion de se poser la question de ce que l’on veut croire croire, ou de ce que l’on peut accepter.

  • Les acteurs sont bons, la réalisation également. Alors pourquoi me suis-je autant ennuyé ? Le film est très (trop) long, l’histoire est sans rebondissement notoire, sans réelle fin. Je m’interroge sur toutes ces récompenses unanimes de la profession liées au scénario.

    • Merci Teddy, c’est une bonne question. Si la forme vous a plu, en dépit de la durée du film, il semble que l’histoire ne vous ait pas passionné. Qu’en avez-vous retenu ?

  • En parlant du chien, c’est le seul qu’on a pas interrogé. Ce serait interessant d’avoir sa version des faits. On sous estime trop l’instinct canin dans cette histoire. On se souvient d’ailleurs qu’en 2005 dans l’affaire Aubry, on avait auditionné Théo, le dalmatien de la veuve retrouvée pendue. Et si les plus grands avocats s’étaient indignés de cette méthode insultant le pauvre chien dont ils avaient relevé la bêtise (sur la base de sa race), on notera ici toute la finesse de Snoop fidèle et tendre compagnon dont la vie aussi doit continuer sans Samuel. Si Daniel bénéficie d’un accompagnement psychologique, qui veille à Snoop? Il est d’ailleurs fort à parier que son comportement dans le temps nous donne d’autres indices. C’est surement peut être la limite de ce film, et de la justice en général, on doit bien rendre un verdict et mettre fin à la recherche alors que la vérité peut éclater des années plus tard.
    Avez-vous d’autres bons films à conseiller sur des affaires judiciaires compliquées ?

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