CREED :
L’HÉRITAGE DE ROCKY BALBOA
Ryan Coogler, 2015
LE COMMENTAIRE
À la fin des années 80 du siècle dernier, les artistes provençaux Sacha Goëller et William Picard sont partis du préambule qu’il n’y avait pas de saison pour que vive le son. Mêlant sens de la rythmique et goût du combat, taper était pour eux une façon d’aimer. On voit les dommages que cela a pu causer…
LE PITCH
Un fils illégitime suit les traces de son défunt père.
LE RÉSUMÉ
Mary Anne Creed (Phylicia Rashād), femme d’une ancienne légende de la boxe Apollo Creed (cf Rocky IV), sort le jeune Adonis (Alex Henderson) d’un centre de détention juvénile où il ne fait que se battre. Adonis est le fils d’une maîtresse de son ex-mari.
Quelques années plus tard, Adonis (Michael B. Jordan) s’est bien musclé. Il quitte LA pour rejoindre Philadelphie afin de se rapprocher d’une autre légende des rings : Rocky Balboa (Sylvester Stallone), proche de son père. Le jeune homme a l’espoir que Rocky puisse l’aider à boxer en professionnel.
Point important : il ne veut pas profiter de son nom. C’est pourquoi il se fait connaître sous le nom d’Adonis Johnson.
Il fait la rencontre de la jeune chanteuse Bianca Taylor (Tessa Thompson) et s’entraine dur, dans l’ombre, grâce aux conseils avisé de l’étalon italien (cf La Couleur de l’Argent).
As long as you’re talking, you’re not listening.
Son secret est bien vite percé. Les promoteurs l’approchent pour organiser des combats médiatiques a priori à sens unique, du fait du manque d’expérience d’Adonis.
Un face à face contre le britannique Pretty Ricky Conlan (Tony Bellew) lui est proposé. En échange, Adonis doit prendre le nom de Creed.
Rocky hésite puis relève le challenge. Tout comme il acceptera de suivre un traitement de chimiothérapie, se sachant atteint d’un cancer.
À Goodison Park, Creed tient la dragée haute au champion jusqu’à la fin de la rencontre – non sans rappeler un certain Rocky.
Ricky Conlan won the fight, but Adonis Creed won the night.
Le boxeur avec un oeil en moins, et son coach diminué, se retrouvent à Philadelphie pour contempler la ville du haut des soixante douze marches mythiques du Museum of Art.
If you look hard enough you can see your whole life from up here.
How does it look?
Not bad at all.
L’EXPLICATION
Creed, c’est mener plusieurs combats à la fois.
Une marque bien connue de boisson pour l’effort a utilisé comme slogan publicitaire There’s no small game. Pas de petit match. Chaque athlète, peu importe son niveau, s’investit comme s’il s’agissait de la compétition de sa vie. Avec la même intensité que les champion·nes. Finale de coupe du monde ou finale de coupe de Haute-Saône, même combat!
Pourtant il existe des affrontements de natures différentes. Tout ne se joue pas que sur un terrain ou sur un ring.
Au long d’une vie, chacun·e doit en mener plusieurs à la fois.
Pour Rocky, le premier combat a été de se sortir de sa condition de minable en se prouvant qu’il était capable de mieux (cf Rocky). Par la suite, il a du affronter d’autres défis comme celui de rester au plus haut niveau (cf Rocky III), ou encore celui de défendre son pays face à la menace communiste (cf Rocky IV).
Les combat d’Adonis sont différents bien que similaires au sens il a des choses à se prouver. Tout d’abord il doit parvenir à maitriser la colère d’avoir grandi sans paternel. Soupe au lait, il veut mettre des gnons à tous ses copains.
Sentant l’appel des gants, il a le courage d’abandonner l’ambiance électrique des salles de marché Californiennes (cf Le Loup de Wall Street) pour l’ambiance moite des salles de boxes du nord du pays. Capable de vivre à la dur (cf Fighter). Il part volontairement tout en bas de l’échelle, comme un anonyme.
Devant affronter le qu’en dira-t-on de par sa condition de bâtard (cf Le Parrain 3).
Tout comme Rocky, Adonis se bat pour se prouver des choses. Donc il se bat pour lui-même, mais également contre lui-même. Il doit apprendre à dépasser son ego, dominer sa susceptibilité, ainsi qu’accepter sa fragilité. En effet, juste avant d’affronter Leo « The Lion » Sporino (Gabriel Rosado), il se décompose littéralement dans les toilettes, les intestins rongés par l’angoisse.
Cut my gloves off!
What’s wrong?
My gloves, cut them off!!
I can’t cut them off, you’re ready to fight. Are they too tight?
I’M FREAKING OUT RIGHT NOW, I GOTTA TAKE A SHIT OK? SOMEBODY GONNA WIPE MY ASS FOR ME?
Ce qui lui rappelle que dans ces combats, il reste son meilleur allié ainsi que son pire ennemi (cf Star Wars).
That’s the toughest opponent, you’re ever going to have to face.
Auprès de Rocky, ce jeune impatient comprend que la vie est longue. Par conséquent, les combats vont être nombreux. Rien ne sert de vouloir brûler les étapes puisque les grands rendez-vous se présenteront d’eux-mêmes, en temps et en heure.
One step at a time, one punch at a time, one round at a time.
Plus que de démarrer comme une fusée, l’important est de savoir durer – contrairement à Apollo. Penser autant que possible à long terme, en mettant un pied devant l’autre. Rocky est le champion pour encaisser les coups et se relever jusqu’à la fin. Il est le meilleur mentor.
A great fighter once said, « It ain’t about how hard you can hit. It’s about how hard you can get hit and keep moving forward. »
Car il existe enfin un combat plus exigent comme celui que l’on mène contre le temps. Impossible de l’éviter. De la même manière, impossible de le remporter – en dehors de quelques rares exceptions (cf Interstellar).
Time takes everybody out, time’s undefeated.
Malgré tout, on est contraint de le mener que cela nous plaise ou non. Si Rocky apporte sa sagesse à Creed, ce dernier lui redonne l’envie de s’accrocher.
À l’approche du dernier round, Rocky n’avait plus envie de se battre. Fatigué d’avoir perdu tous ses amis, encore meurtri de la disparition de sa femme. Le vétéran refuse son traitement. Encouragé par Creed, il va retrouver la flamme pour gravir à nouveau ces fameuses marches, à bout de souffle.
Regarder à l’horizon. Il reste encore des choses à vivre.
Se rappeler des mots d’un ancien champion poids lourd, Lenny Kravitz : Rien n’est fini tant que ce n’est pas fini.