ATHENA

ATHENA

Romain Gavras, 2022

LE COMMENTAIRE

En 1830, on faisait déjà la révolution sur des barricades dans certains quartiers populaires de Paris (cf Les Misérables). L’histoire se répète. La nuit du 10 au 11 mai 1968 a fait basculer une manifestation étudiante en une protestation nationale. L’Histoire se souviendra que les gilets jaunes ont bloqué les Champs-Elysées plusieurs weekend d’affilée en 2018 (cf Un Pays qui se tient sage). Dans les cités, les barricades sont de nouveau prêtes.

LE PITCH

Jusqu’ici tout allait bien. Cette fois, c’est la guerre.

LE RÉSUMÉ

La mort du jeune Idir, battu par des membres d’une brigade, est sur le point de déclencher la révolte.

L’atmosphère est tendue devant la cité d’Athena. C’est la troisième bavure policière qui vient secouer le pays en moins de deux mois.

Abdel (Dali Benssalah), l’un des frères d’Idir, membre des paras de retour du Mali, prend la parole devant les médias.

Pour la mémoire d’Idir, pour mon ptit frère, je vous demanderais de rester calmes.

En face, Karim (Sami Slimane), un autre frère d’Idir, ne l’entend pas de cette oreille. Il lance les hostilités. Déter.

C’est nous la police maintenant! 

La cité s’embrase. Les forces de l’ordre perdent rapidement le contrôle. Les troupes de Karim attaquent un commissariat et s’emparent des armes. Ils veulent l’identité des assassins.

Tant qu’on n’a pas le nom des condés, c’est la guerre! 

Abdel essaie de raisonner son frère, en vain.

Crois moi, tu veux pas que ça brûle ici.

Mais tu crois qu’elle a pas déjà commencé la guerre ?

De son côté, la mère d’Idir multiplie les appels pour joindre ses fils. Alors qu’une partie des habitants de la cité est évacuée, Mokhtar (Ouassini Embarek), le frère aîné d’Idir, tente de mettre son trafic à l’abri tout en négociant en parallèle avec ses contacts à la BAC – ce qui déclenche la fureur de Karim.

C’est pas la bonne méthode, vous allez vous faire enculer là.

Mon p’tit frère il est mort et toi tu me parles de biz là ?!

La police craint la présence de Sébastien (Alexis Manenti) au sein d’Athena. Le fiché S est soupçonné d’actes de barbarie en Syrie. Les CRS se déploient. Karim compte capturer un agent pour faire pression sur le Ministère de l’Intérieur. Ce sera Jérôme (Anthony Bajon).

D’autres cités viennent prêter main forte aux jeunes d’Athena. Abdel cherche à éviter le pire. Un contact lui jure que les responsables de la mort d’Idir ne font pas partie des forces de police. Il s’agirait d’un groupuscule fasciste.

Pour apaiser la situation, Abdel veut rendre Jérôme sain et sauf à sa famille. Source de dispute avec Karim.

Ça va te servir à quoi d’avoir les noms ?

Viens pas faire le grand frère alors qu’t’es qu’une pute en uniforme pour la France!

Karim est tué lors d’une intervention du RAID. Fou de rage, Abdel prend la tête de la rébellion. Il frappe Mokhtar, réclame des noms à son tour en menaçant de tuer Jérôme. Pendant ce temps, Sébastien prépare l’apocalypse en disposant des bonbonnes de gaz un peu partout dans l’immeuble.

Jérôme parvient finalement à s’échapper avant que tout n’éclate.

Il s’avère qu’un groupe néo-nazi était bien derrière le meurtre d’Idir, en se faisant passer pour des policiers.

L’EXPLICATION

Athena, c’est quand les fascistes tirent les ficelles.

Dans son Art de la Guerre, Sun Tzu insistait sur l’importance de ne jamais sous-estimer l’adversaire. Si l’on réduit les fascistes à des sombres abrutis sur le simple prétexte qu’ils tiennent des propos haineux, on prend le risque de se tromper (cf La Cravate, Dany Balint).

En effet, le fascisme adopte une stratégie malicieuse et redoutablement efficace pour se développer : dénoncer les erreurs des autres. Une posture bien commode, car qui ne commet jamais d’erreur ? Pas besoin de projet, ou de proposition. Il suffit de capitaliser sur les affaires et les scandales. Regarder les autres se tromper. Puis ramasser.

Pour accélérer sa croissance, le fascisme peut instrumentaliser la peur et la colère. Menant une guerre de l’ombre. Allumant des incendies, selon la bonne vieille stratégie du pompier pyromane. Maniant la désinformation pour créer le chaos. Jeter de l’huile sur le feu. Si la CIA le fait, pourquoi pas les fascistes ?

L’immigration est leur terrain de jeu favori. Un sujet qui n’est pas forcément un problème comme le rappellent les succès de l’équipe de France de Football, modèle d’intégration (cf Les Bleus une autre histoire de France, Les Yeux dans les Bleus, Les Bleus 2018). Sujet qui reste néanmoins sensible et qui continue de cristalliser les tensions au fil des années. Les questions identitaires et sécuritaires ont été notamment exploitées par les politiques de tout bord afin de faire basculer les élections en leur faveur. On joue avec des allumettes.

Les banlieues sont devenues les quartiers, aujourd’hui cités pour éviter de parler de poudrières (cf La Haine, Les Misérables). Qualifiées par certains de zones de non-droit ou de non-France. Point de non-retour ?

Une chose est sûre, elles sont bien sur le point d’exploser. Karim ne veut plus être une victime. Trop de bavures. Marre de l’injustice. Alors il a fait sienne la devise de la Marseillaise : aux armes!

On va leur montrer c’est quoi l’insécurité! (…) Chaque fois qu’ils tapent, on tape.

Oeil pour oeil (cf Munich).

En face, une nation qui se sent paradoxalement assiégée. Bafouée dans ses principes. Convaincue qu’elle doit frapper encore plus fort pour se faire respecter.

Il faut réarmer la police moralement et matériellement.

Les deux camps s’opposent, chargés à bloc. Et quand la colère sourde se transforme en violence, on ne peut plus la contrôler. Aucune réponse. C’est le désordre absolu.

La jeunesse est en feu. Le feu est en train de se transformer en incendie et nous on n’a pas les moyens de lutter contre ça.

Frère, le lion calme le lionceau.

Arrêtez avec vos métaphores là, c’est quoi votre délire?

Le dialogue est rompu. Karim ne répond plus aux appels de sa mère, il n’entend plus son frère. Il a pris feu avant même d’être brûlé par son propre cocktail molotov. Abdel le militaire pacifiste bascule à son tour. Lui, qui sait pourtant que tout cela ne sert à rien, finit par abandonner. Les arguments de la police sont inaudibles.

C’est un scandale ce qui s’est passé!

Tu veux pas de mort ou tu veux pas de scandale?

C’est l’impasse. Même Mokhtar échoue, lui qui pensait pouvoir tromper le conflit grâce au libre-échange – de narcotiques.

Laisse tomber! C’est la nouvelle génération ça, elle est complètement foutue.

Karim et Abdel sont aveuglés par la haine. Les CRS ne savent que donner des coups de matraque. Ces hommes ne se rendent pas compte qu’ils sont devenus des marionnettes aux mains des fascistes.

C’est toi qu’a rien compris, tu vois pas que c’est fini ?

La tour de Babel va s’écrouler dans la cité d’Athena – déesse de la stratégie militaire, mais surtout déesse de la sagesse.

Une sagesse qui réclamerait pourtant qu’on se rappelle de savoir à qui profite le crime…

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

4 commentaires

  • Après 15 minutes de visionnage (beaucoup trop, car j’ai augmenté le nombre de visiteurs) j’ai zappé. C’est un film putassier où les fantasmes/phantasmes de Gavras sont financés par, au choix : l’extrême-droite? un producteur qui cherche le gain? Hormis donner peur aux personnes normales et faire quelques images jolies (selon les goûts de Gavras), c’est faire insulte aussi aux personnes des cités qui vivent comme vous et moi. Les arbres de ce film cache la forêt de gens biens, dans un but inavoué (fric? racisme idéalisé?). Cela fait partie de la politique de Netflix qui donne quelques perles au milieu des pourceaux… Et les intellos vont crier au sublime – heureusement pas les critiques qui réfléchissent plus loin que leurs délicieux frissons de braver des interdits par « artistes » interposés

    • Merci adc. Votre réaction allergique est entendable.
      Personnellement, j’ai du mal à me faire un avis sur un film, aussi pénible soit-il à mon goût, tant que je ne vais pas jusqu’au bout.
      Il serait intéressant que vous puissiez expliquer ce que vous comprenez de l’histoire proposée par Romain Gavras.
      Et en quoi elle reflète une vision de la réalité des cités qui, selon vous, est complètement erronée – voire insultante.

  • La pirouette de la fin est pitoyable et détruit tout ce qui précède. Lamentable de stupidiyé !

    • Merci Ol pour votre commentaire : quel est justement le sens de cette pirouette finale que vous trouvez pitoyable ? Qu’est-ce que met en scène Athena selon vous ?

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