HEAT
Michael Mann, 1995
LE COMMENTAIRE
Les plus grands entretiens se réussissent en tête à tête. Dans une ambiance feutrée. Autour d’un café. Détendu. La mèche impeccable. Les yeux dans les yeux. Et la main dans la main. Les candidats et les examinateurs s’en vont amoureux, sans peur du lendemain.
LE PITCH
Un gendarme et un voleur jouent au chat et à la souris, dans la moiteur de Los Angeles.
LE RÉSUMÉ
Un braquage de grande envergure tourne mal par la faute de Waingro (Kevin Gage). Pendant que Neil McCauley (Robert De Niro) fait la chasse au responsable tout en essayant de sauver les meubles, le lieutenant Vincent Hanna (Al Pacino) est mis sur l’affaire.
La police criminelle est toute proche de coincer McCauley et ses hommes lors d’un nouveau braquage raté.
Pas découragé, McCauley prépare son braquage suivant. C’est alors qu’il fait la rencontre de Eady (Amy Brenneman). Contre toute attente, ce célibataire endurci connaît un véritable coup de foudre.
I’m alone, I am not lonely.
Il se transforme en voiture de sport dont le compte-tour rentre dans le rouge.
I’m a needle starting at zero, and all of a sudden someone like you comes along.
Au hasard d’une filature, McCauley rencontre également Hanna qui est à ses trousses. Les deux hommes procèdent à une petite mise en point.
You know, we are sitting here, you and I, like a couple of regular fellas. You do what you do, and I do what I gotta do. And now that we’ve been face to face, if I’m there and I gotta put you away, I won’t like it. But I tell you, if it’s between you and some poor bastard whose wife you’re gonna turn into a widow, brother, you are going down.
There is a flip side to that coin. What if you do got me boxed in and I gotta put you down? Cause no matter what, you will not get in my way. We’ve been face to face, yeah. But I will not hesitate. Not for a second.
Le braquage se solde par un nouvel échec. Le sang coule. Des hommes meurent. McCauley donne rendez-vous à Eady en Nouvelle-Zélande.
I have to go separately but you’ll meet me there.
Personne ne peut croire à la retraite du gangster. En effet, il veut se venger de Van Zant (William Fichtner) et de Waingro. Sa gourmandise lui vaut de se faire coincer par Hanna qui l’abat au bout d’une course poursuite sur les piste de l’aéroport. McCauley meurt mais au moins, il ne retournera pas en prison.
Told you I’m never going back…
L’EXPLICATION
Heat, c’est l’imbécile qui ne change pas d’avis.
En 2020, la vie s’apparente à de la pâte à modeler. Il est devenu évident que dans un monde flexible, nous devons pouvoir faire absolument tout ce que nous voulons. Libre à nous de décider. Et encore que nous nous trompions, ce n’est pas une fatalité. On s’adapte. Un mariage raté peut se conclure calmement dans un divorce à l’amiable (cf Marriage Story). Les familles se recomposent. Au travail, le burn-out (cf Chute Libre) devient presque un passage obligé. Il permet à celles et ceux qui en sont victimes de pouvoir se réinventer. Rien n’est insurmontable. Un petit switch et c’est reparti! Ni vu, ni connu. Chaque jour est une surprise.
Fut une époque où les choses n’étaient pas aussi faciles. À l’époque du grand Jésus, les esclaves n’avaient pas le choix (cf Ben-Hur). Au siècle dernier encore, ce n’était pas non plus la même limonade. Quand on s’engageait sur une voie, il était impossible de sauter du train en marche (cf le Transperceneige). On peut dire qu’au XXe siècle, on savait à quoi s’en tenir.
I say what I mean, and I do what I say.
Ça filait doux, avec un peu de résignation peut-être mais une certaine application à accepter son destin (cf Le Cercle Rouge).
My life’s a disaster zone. I got a stepdaughter so fucked up because her real father’s this large-type asshole. I got a wife, we’re passing each other on the down-slope of a marriage – my third – because I spend all my time chasing guys like you around the block. That’s my life.
A guy told me one time, « Don’t let yourself get attached to anything you are not willing to walk out on in 30 seconds flat if you feel the heat around the corner. » Now, if you’re on me and you gotta move when I move, how do you expect to keep a… a marriage?
Ils ne se plaignaient pas pour un oui ou pour un non comme aujourd’hui. En ce sens, McCauley est un homme du XXe siècle. Droit dans ses bottes. Il n’a qu’une philosophie :
He knew the risks, he didn’t have to be there. It rains… you get wet.
Imparable.
Poursuivi par la police, il assume pleinement. Jamais il n’échangerait sa vie de gangster avec une vie de barbecues et de foot le weekend.
So you never wanted a regular type life?
What the fuck is that? BBQ and ballgames?
Non merci!
C’est simple : McCauley est tellement à l’ancienne qu’il est prêt à renoncer à l’Amour avec un grand A. Il fait de belles promesses à Eady pour mieux l’envoyer à l’autre bout du monde. Où il n’ira jamais.
I don’t even know what I’m doing anymore. I know life is short, whatever time you get is luck. You want to walk? You walk right now. Or on your own… on your own you choose to come with me. And all I know is… all I know is there’s no point in me going anywhere anymore if it’s going to be alone… without you.
Car en réalité, il ne change pas. Gangster un jour, gangster toujours. Ses braquages sont des échecs à répétition mais il s’obstine car c’est sa vie. Il s’en sort miraculeusement mais il va quand même essayer de se venger, bien que cela ne serve à rien. Même si cela peut le conduire à sa perte. Au contraire, McCauley est presque trop fier de pouvoir dire avant de mourir qu’il ne retournera pas en prison. Une manière de dire merci à Hanna qui l’a honoré en le tuant comme un gangster. Car Hanna est dans son rôle également. Il est le même genre d’obstiné. Tous les deux étaient faits pour s’entendre (cf Dark Knight).