BARTON FINK

BARTON FINK

Joel Coen, 1991

LE COMMENTAIRE

Le commun des mortels n’est pas le seul à l’impression d’être prisonnier d’un tunnel (cf Daylight). Les artistes souffrent du même syndrome – en plus dramatique. Dans leur tunnel, toutes les portes de secours sont scellées. Et la maison brûle.

LE PITCH

Un auteur New-Yorkais se fourvoie à Los Angeles.

LE RÉSUMÉ

La dernière pièce de théâtre de Barton Fink (John Turturro) est un succès. Tandis que tout le monde se l’arrache à Broadway, il se voit offrir une proposition alléchante pour rejoindre Hollywood. Il part pour la côte ouest à contre coeur et prend ses quartiers à l’hotel Earle. Le confort de sa chambre est rudimentaire, avec pour seule distraction un cadre illustrant une femme sur une plage.

Le voisin de Fink est bruyant. Il s’agit de Charlie Meadows (John Goodman), un courtier en assurance. Les deux hommes sympathisent.

Mis sous pression par le producteur Jack Lipnick (Michael Lerner) pour écrire une film de catch, Barton Fink manque cruellement d’inspiration. Un moustique l’empêche de dormir. Le papier peint se décolle du mur à cause de la chaleur étouffante.

I’m just having troubles getting started.

Barton Fink consulte le célèbre romancier W.P. Mayhew (John Mahoney). L’alcoolique n’a cependant aucun conseil à lui prodiguer. Et pour cause, son assistante Audrey Taylor (Judy Davis) fait tout le travail à sa place. Au pied du mur, Fink n’a pas d’autre solution que de demander à Audrey de lui venir en aide. Tous les deux font l’amour plutôt que de travailler. Lorsque Fink se réveille, il découvre Taylor sauvagement mutilée sur le lit.

Charlie Meadows joue les nettoyeurs, puis se rend à New York pour affaires. Il demande à Fink de prendre soin d’une boite mystérieuse en son absence.

Soudainement inspiré, Barton Fink boucle son script.

Le lendemain, la police l’informe du meurtre de W.P. Mayhew. Fink est apparemment soupçonné de complicité avec Meadows qui se trouve être ‘Madman’ Mundt, un serial killer qui décapite ses victimes.

Charlie débarque dans un hotel enflammes. Il abat les deux détectives et informe Barton qu’il a rendu visite à ses parents à New York. Puis il s’en va. Fink quitte l’hotel à son tour. Son script est jeté par Lipnick.

You ain’t no writer, Fink, you’re a goddamned write-off.

Capitol Pictures ne produira rien tant que Fink n’aura pas grandi un peu. L’auteur reste sous contrat, coincé à LA. Il se rend sur la plage où il retrouve la jeune femme qui figurait sur le cadre dans sa chambre d’hotel.

L’EXPLICATION

Barton Fink, c’est un poisson en dehors de son bocal.

Barton Fink incarne l’artiste torturé qui s’inspire de ses névroses.

I’ve always found that writing comes from a great inner pain.

Très ambitieux, il veut marquer l’histoire (cf At Eternity’s gate), sans fausse modestie.

I guess I try to make a difference.

Il s’épanouit d’autant plus à New York que Broadway raffole des idéalistes dans son genre. La critique se délecte de ce qui n’est pas dit. Les productions tordues de Fink sont donc très appréciées, ce qui lui permet de nourrir de voir grand pour la suite.

The creation of a new living theatre of and about and for the common man. If I’d run to Hollywood now I’d be cutting myself off from the wellspring of that success, from the common man.

Il n’en aura pas l’occasion. Le voilà happé, presque contre son gré, par les sirènes de la côte Ouest. Son entourage, d’un réalisme froid, ne lui laisse pas vraiment le choix. Fini le théâtre. Bonjour le cinéma!

The common man will still be back when you come back…

Barton débarque dans une autre dimension où l’on ne jure que par le box office, le succès commercial et les films à grand spectacle. Splash!

We’re only interested in one thing, Bart. Can you tell a story, can you make us laugh, can you make us cry, can you make us want to break out in joyous song?

La pression est énorme.

We’re all expecting great things!

Une pression d’un nouveau genre qui bloque Barton, incapable de comprendre la langue qu’on parle à Los Angeles, une ville absolument sans nuance. Sans prise de tête.

This is a wrestling picture. The audience wants to see action, wrestling and plenty of it. They don’t want to see a guy wrestling with his soul!

Barton se pose beaucoup trop de questions (cf Le Créateur). Il ne parvient pas simplement à executer et pondre un script. Pour les requins qui gravitent dans ces eaux, ce n’est pourtant pas compliqué.

What do you need… a roadmap??

Barton a besoin de se faire des noeuds au cerveau. Il est câblé ainsi. Comment pourrait il être heureux sous le joug de Lipnick, promu colonel de l’armée de réserve ?

If your opinion mattered, you’d run the studio. It doesn’t and you won’t!

Barton a besoin d’attention. Plutôt que d’être apprécié à sa juste valeur, il devient l’un des jouets de Lipnick. Il perd son caractère unique, sa raison d’être finalement.

You arrogant son of a bitch, you think you’re the only writer that can give me that Barton Fink feeling? I got 20 writers under contract I can ask for a Fink-type thing from!

Par ailleurs, Hollywood n’est qu’un théâtre d’apparences. Tout est faux. Les légendes sont des faussaires. Barton ne peut le supporter. Il est déçu par W.P. Mayhew pour lequel il vouait pourtant une certaine admiration. À Hollywood, il tombe de haut.

L’environnement est beaucoup trop violent. Pour exister, on ne peut pas rester en retrait. Il faut couper des têtes. Faire du bruit, à l’image de Meadows.

You think I made your life hell? Take a look around this dump. You’re just a tourist with a typewriter, Barton. I live here. (…) And you’re coming to my home and you complain I make too much noise?

Autour de Barton, personne ne semble comprendre son talent. Il se retrouve isolé. Mis à l’index. Les monstres se moquent pas mal de son supposé talent. Là-bas, cela ne compte pas.

I’m a writer, you monsters, I create, I create for a living, I’m a creator!

Barton essaie autant qu’il peut d’apprécier cette femme sur la plage. Elle manque de conversation mais Hollywood l’a vendu comme fantasme ultime.

Fink a fait le chemin inverse de celui qu’a emprunté Riggan Thompson (cf Birdman). Le petit artisan ne sait pas faire de la production de masse. Celui qui voulait révolutionner le théâtre se retrouve prisonnier de l’industrie du cinéma. La pièce de collection est rangée au sous sol du supermarché.

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

2 commentaires

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