MON VOISIN TOTORO
Hayao Miyazaki, 1999
LE COMMENTAIRE
On ne compte guère que Gene Kelly pour chanter le bonheur sous la pluie. Peut-être également quelques Anglais qui savent rendre les gouttes romantiques. Ils en profitent alors pour faire des non-déclarations ridicules qui font chavirer les coeurs (cf 4 Mariages et un Enterrement). Pour le reste, personne n’aime quand il pleut. C’est le constat un peu brutal que dressait le duo Charly et Lulu : l’eau ça mouille. Rien d’autre. Pendant les intempéries, mieux vaut quand même être équipé d’un parapluie.
LE PITCH
Dans la campagne Japonaise, les grands esprits se rencontrent.
LE RÉSUMÉ
Tatsuo Kusakabe quitte Tokyo pour un petit village en pleine nature, en compagnie de ses deux filles Satsuki et Mei – sans sa femme Yasuko qui se trouve à l’hôpital.
Quelques glands attirent l’attention de Mei, suivie de Satsuki qui rentrent dans la maison inhabitée où elles y aperçoivent une centaine de noiraudes, des petites bestioles faites de suie. Tatsuo les rassure.
Well, ghosts are a lot harder to see. But when you suddenly move from a lighted room to a dark one, you can’t see for a second, and that’s when the dust bunnies come out.
Leur vieille voisine également : il ne s’agit pas de fantômes, quoi qu’en dise son petit fils Kanta qui prétend que la maison est hantée.
Le soir, une bourrasque de vent inquiète les filles. Tatsuo leur conseille de rire aux éclats pour chasser la peur. Sa technique imparable a l’air de fonctionner.
Try laughing. Then everything that scares you will go away.
La famille part à l’hôpital en vélo pour rendre visite à Yasuto.
À la fin des vacances, l’attention de Mei est attirée par deux petites créatures qui s’enfoncent dans les bois. Elle les suit (cf Alice au Pays des Merveilles) et tombe nez à nez avec Totoro, un personnage de livre entre le chat et l’ours – gigantesque et bienveillant. Mei s’endort sur son ventre.
La petite s’empresse de raconter son histoire mais son père et sa soeur ne la croient évidemment pas.
Satsuki va l’apercevoir à son tour à un arrêt de bus, sous une pluie battante. Elle lui propose un parapluie. Le bus ne semble pas décidé à passer. Mais un chat-bus sorti de nulle part s’arrête pour prendre Totoro à son bord. Avant de partir, il donne quelques graines à Satsuki, qui les plante dans le jardin.
Rien ne se passe jusqu’à ce que les fillettes soient alertées en pleine nuit par les cris rauques de Totoro, en transe devant le potager. Satsuki pense qu’il ne s’agissait que d’un rêve. À son réveil, les graines ont poussé!
L’inquiétude monte après un appel du chirurgien réclamant d’être recontacté très vite. Satsuki angoisse puis panique après la disparition de Mei. Totoro apparait de nouveau puis l’emmène dans les airs. Il appelle le chat-bus pour partir à la recherche de Mei et la retrouver. Tout va bien.
Idem à l’hôpital où Yasuko n’avait contracté qu’un rhume. Plus de peur que de mal. Satsuki sympathise avec Kanta. Mei finit par apprécier la grand-mère. Yasuko va bientôt rentrer à la maison.
Sur son arbre, Totoro veille au grain.
L’EXPLICATION
Mon Voisin Totoro, c’est quelque chose de Tennessee.
Le vie n’est pas drôle tous les jours, n’en déplaise à l’ayatollah du positivisme qu’était Bobby McFerrin. Ne pas s’inquiéter et être heureux. Facile à dire. Comme s’il suffisait de claquer des doigts!
La voisine prône elle-aussi le sourire en toute circonstance.
If we all keep smiling, the spirits may gradually go away and leave this place alone. Yes, I’m sure that somewhere up in that ceiling, they’re busily discussing plans for leaving the house.
Cette méthode Coué ne semble pas convaincre ni Satsuki, ni Mei.
On peut bien se dire qu’on va laisser entrer le soleil comme le criait Paul-Alain Leclerc. Force est de reconnaître que parfois, il y a des nuages dans le ciel. Nous sommes bien obligé d’accepter notre côté sombre si cher à Axel Bauer ou les idées noires de Bernard Ouillon. C’est nécessaire (cf Vice-Versa).
Les filles vont devoir arrêter de faire semblant et faire face à l’obstacle. Quand on arrive en ville, on arrive de nulle part. C’est la réalité. On fait peur à voir. Quand on arrive à la campagne, c’est encore plus dur finalement car on n’arrive précisément pas de nulle part. Les filles doivent se familiariser avec la campagne, un nouvel environnement sauvage qu’elles ne connaissent pas. Leur mère est absente, le père au travail, la maison abandonnée – donc pleine d’esprits comme un hôtel en hiver (cf Shining).
Can some ghosts live upstairs?
C’est l’angoisse.
On souffre tant qu’on lutte contre les esprits (cf Paranormal Activity). Dès lors qu’on accepte leur présence, on peut composer avec eux (cf Le voyage de Chihiro).
Do you like spirits?
C’est comme avec la nature. Si on essaie de la dominer en urbanisant à outrance, on finit par se faire tuer par nos propres virus et la nature reprend ses droits (cf I’m Legend). Alors que si on reste à sa place et qu’on travaille en bonne intelligence avec nos amies les plantes, tout se passe bien.
Trees and people used to be good friends.
C’est ainsi que Mei puis Satsuki font la rencontre de Totoro, ‘le roi de la forêt’.
I also believe that you met the king of the Forest and meeting him is a sign of good luck.
Plus qu’un esprit de la nature, Totoro est ce rêve en nous, son cri à lui. L’ami qui nous veut du bien (cf Harry). Un coussin bien moelleux et rassurant où l’ont s’endort en confiance.
Ou un matelas qui nous permet de rebondir. Totoro, ce voisin qu’on tolère plus que les autres. Un demi-Dieu qu’on peut solliciter quand on en a besoin : les jours de pluie ou tout simplement les jours de moins bien. Il ne nous quitte pas, perché sur sa branche. Grâce à lui, on peut souffler ou prendre de la hauteur. On trouve des solutions.
Il est la zone de confort de laquelle on est bien obligé de sortir de temps en temps, sinon on ne progresserait pas. Une zone de confort qu’on est bien content de retrouver quand tout va mal.
Avec Totoro, les graines finissent toujours par germer. L’envie de vie. La force qui nous pousse vers l’infini.
Totoro est en nous. Quand les filles le trouvent, elles n’ont plus à avoir peur ni de la pluie, ni de la maladie de leur mère.
Au soleil ou sous la pluie, j’aime Totoro profondément. Peut être mon Miyazaki préféré.
Bel article.
Merci pour ce commentaire.
Totoro, à midi ou à minuit.