BIG
Penny Marshall, 1988
LE COMMENTAIRE
Si l’on s’en tient aux discours de l’industrie cosmétique, l’âge se mesurerait en termes de rides : plus on vieillit, plus on flétrit. Imparable. Heureusement, rien n’est irreversible grâce aux crèmes de soin. Si l’on imaginait l’âge différemment, on pourrait éventuellement se dire qu’on devient vieux lorsque l’on ne s’amuse plus de rien (cf L’étrange histoire de Benjamin Button).
LE PITCH
Un adolescent fait une crise de croissance soudaine.
LE RÉSUMÉ
Joshua « Josh » Baskin (David Moscow) en a marre d’être un ado. Marre que sa mère (Mercedes Ruehl) lui dise quoi faire comme s’il était encore un petit garçon. Alors qu’il a quand même déjà treize ans quoi! Marre également d’avoir la honte dans les fêtes foraines parce qu’il n’a pas la taille requise pour faire les attractions cool.
Ce n’est clairement pas comme cela qu’il va gagner les faveurs de Cynthia Benson (Kimberlee M. Davis) qui reluque déjà les garçons plus vieux (cf La Boum).
This is Derek. He drives…
Ras-le-bol d’être un ado! Josh s’énerve contre une machine diseuse de bonne aventure. Soudainement, Zoltar s’anime – alors que la machine n’est pas branchée. Josh est invité à faire un voeu.
I wish I were big.
Il reçoit une carte.
Your wish is granted.
Le lendemain, Josh (Tom Hanks) se réveille comme un adulte.
It turned me into a grown-up.
Sa mère est en panique, persuadée que son fils a été kidnappé. Josh est obligé de trouver refuge à l’hôtel. Son meilleur ami Billy Kopecki (Jared Rushton) l’aide à postuler pour un job. Il se trouve que Josh a quelques bases solides en informatique. Pratique. Il décroche rapidement un poste chez Mac Millan Toy Company (cf Le Grand Saut).
Sa candeur lui vaut d’être repéré par le patron (Robert Loggia) qui cherche un peu de sang frais pour son entreprise. Mac Millan Toy Company est gangrénée par des cadres ringards comme Paul Davenport (John Heard) ou arrivistes comme Susan Lawrence (Elizabeth Perkins).
Tout semble sourire à Josh qui connait une ascension fulgurante au titre de Vice-President grâce à ses idées lumineuses. Autant dire que Paul le déteste. Susan en tombe évidemment amoureuse.
Malheureusement, sa vie d’ado lui manque un peu. Sa mère aussi. Son travail le prive de pouvoir passer du temps libre à s’ennuyer en compagnie de Billy.
I have a deadline to meet!
Who do you think you are?
You don’t get it, do you? This is important!
I’m your best friend. What’s more important than that?
Son histoire avec Susan commence à devenir sérieuse. Il lui dit toute la vérité.
I’m a child!
Billy a repéré où se trouve la fameuse machine magique. Josh se rend à Sea Point Park et formule un nouveau voeu.
I wish I was a kid again.
Susan le ramène chez lui. Josh enfile son blouson (cf Steak), retrouve sa mère, et son pire pote Billy.
L’EXPLICATION
Big, c’est chaque chose en son temps.
À peine treize ans et Josh ne supporte déjà plus l’autorité. Il est un enfant à l’image d’une génération d’impatient·es (cf John and the hole). Des puces qui valorisent les trajectoires comme des fusées (cf Aux pieds de la gloire). Le poste du haut, avec le salaire s’il vous plait. Tout, tout de suite. Pourquoi attendre ?
Une fois n’est pas coutume, cette frustration de jeunesse va se voir récompensée. Josh a l’opportunité de sauter quelques étapes et se retrouve projeté dans une vie d’adulte.
Au début, il en profite à plein régime. Il gagne enfin un salaire qu’il peut dépenser en bonbons. Josh se fait plaisir. Billy l’envie.
You’re the luckiest guy I know!
Au boulot, Josh dit littéralement ce qu’il pense avec une justesse désarmante. Simple et efficace.
I don’t get it. What’s fun with playing with a robot that turns into a building?
Josh n’a rien à perdre. Pas de pression, ni de calcul – à l’inverse de John Davenport. Josh s’amuse et cela fonctionne. Mac Millan a compris que Josh était une sorte de Midas qui transforme tout ce qu’il touche en or. Effectivement tout lui sourit.
Un tel succès permet à Josh de séduire Susan, pas seulement coucher avec elle (cf Promotion Canapé).
Cependant, Josh découvre aussi doucement les responsabilités de la vie d’adulte. Quand il était petit, il avait l’impression de ne pas pouvoir faire ce qu’il voulait. Cette expérience lui donne l’occasion de comprendre qu’on ne fait pas plus ce que l’on veut lorsqu’on est grand. Bizarrement. Son agenda commande désormais.
Au contact de Susan, il comprend que la vie d’adulte s’accompagne d’angoisses existentielles qui n’ont rien de passionnantes.
You think that there isn’t a frightened kid inside me too?
Pas forcément enthousiaste à l’idée de se marier avec Susan. Ni plus emballé par sa carrière chez Mac Millan, Josh ressent encore le besoin de vivre de manière insouciante. La nécessité de vivre ces étapes intermédiaires.
Il pense que Zoltar ne lui a pas fait un cadeau en exauçant son souhait. En réalité, c’est tout le contraire. Grâce à Zoltar, Josh peut accéder à la sagesse. Il comprend que cette course effrénée pour obtenir ce qu’il ne peut pas avoir revient à poursuivre des chimères. Elle ne le mène à rien d’autre que de nouvelles frustrations, toujours plus grandes.
Mieux vaut apprendre à faire la paix avec son âge. Ne pas courir contre le temps. Embrasser son destin pour ce qu’il est, plutôt que vouloir vivre en accéléré. Tirer le meilleur de chaque seconde que la vie a à offrir ne se traduit pas nécessairement par griller les étapes. À la fin du jeu, personne ne va lui donner de médailles (cf Monsieur Schmidt).
Voir grand ne veut pas nécessairement dire tout anticiper. Mieux vaut faire au jour le jour. Respecter le cycle des saisons.
Josh peut goûter au luxe de retourner vivre chez sa mère, bien qu’il puisse se payer un loyer dans Manhattan (cf Tanguy). Qu’il se rassure, il a tout le temps de passer ses nuits au bureau et de se prendre la tête avec Susan une fois rentré à la maison. Tout vient à point à qui sait attendre.