ARIAFERMA

ARIAFERMA

Leonardo Di Costanzo, 2021

LE COMMENTAIRE

Les éthiques déontologiques et autres éthiques de la vertu on tracé une ligne au delà de laquelle on pouvait faire la différence entre ce qui était de l’ordre du bien, ou du mal. Puis le conséquentialisme est venu bousculer cette réflexion en apporter une nuance dans un monde où chacun pourrait voir midi à sa porte. Tout ne serait peut-être pas blanc ou noir, mais pourrait tenir de l’illusion d’optique.

LE PITCH

Quelques détenus et surveillants pénitentiaires sont en attente de transfert.

LE RÉSUMÉ

Les surveillants d’une prison Sarde sur le point d’être fermée apprennent de la part de leur directrice (Francesca Ventriglia) qu’ils vont devoir rester un peu plus longtemps que prévu car les douze derniers détenus ne peuvent plus être transférés avant nouvel ordre. Raison bureaucratique.

Les rats quittent le navire un par un, sauf Gaetano (Toni Servillo), ses hommes et ses détenus. Ils se retrouvent dans une aile désaffectée. La cantine est fermée. Il faudra se satisfaire de plats préparés pour une durée indéterminée.

C’est faisable messieurs!

Gaetano et Coletti (Fabrizio Ferracane) se donnent du courage mais s’inquiètent de combien de temps ils pourront maintenir l’ordre avec des effectifs aussi réduits.

Important de garder un oeil sur Carmine Lagioia (Silvio Orlando), mais aussi le sanguin Bertoni (Antonio Buil). S’assurer de la paix sociale entre les Italiens, les Gitans et les étrangers. Que le jeune Fantaccini (Pietro Giuliano) ne commette pas de suicide, dans l’attente de son jugement. Ou que le groupe ne lynche pas le vieux pervers Arzano (Nicola Secchi).

Les détenus ne sont pas satisfaits de la qualité des plateaux repas et entament une grève de la faim.

Emmerdes en vue…

Pour garder la situation sous contrôle, Gaetano fait une première entorse au règlement en concédant à réouvrir la cuisine. Il permet à Lagioia de se mettre aux fourneaux… et d’avoir accès à des couteaux.

Les nouvelles du monde extérieur sont rares (cf The Lighthouse).Le séjour s’éternise. Personne n’est dupe, surtout pas les prisonniers.

Ils ont compris que personne ne bougera d’ici…

Chaque moment en cuisine est un moment de tension. Lagioia est pourtant irréprochable. Tant et si bien que Gaetano multiplie les exceptions à la règle afin de maintenir l’équilibre.

Vous arrêtez vos conneries et on fait comme si rien ne s’était passé. Pas de rapport.

Jusqu’à cette panne de courant lors de laquelle les pensionnaires se retrouvent dans le noir.

Sans lumière, on est dans la merde.

Gaetano permet aux détenus de sortir de leurs cellules, rapprocher leurs tables et faire un gueuleton à la torche. Les surveillants sont mêmes invités. Lagioia n’en croit pas ses yeux.

Ce soir les agents et les détenus mangent à la meme table. Je n’avais jamais vu cela de ma vie.

Puis la lumière s’allume. Chacun reprend son rôle.

Le discret Fantaccini doit quitter les lieux pour se rendre au tribunal. Ss co-détenus lui souhaitent bonne chance.

Gaetano et Lagioia s’aventurent dans le potager pour essayer de trouver quelques salades. L’occasion de se raconter un peu leur enfance à Naples, où ils découvrent qu’ils ont grandi tous les deux.

L’EXPLICATION

Ariaferma, c’est l’intelligence de ne pas subir le système.

En dehors de quelques nihilistes (cf Joker), les hommes et des femmes tendent à structurer le monde. Ainsi, la civilisation requiert de devoir mettre à l’ombre tout membre de la société qui n’en respecterait pas les règles. C’est le principe de l’institution carcérale : s’assurer que les fauteurs de troubles soient mis hors d’état de nuire, selon la formule consacrée. Ne pas empêcher quelques pommes pourries de ruiner la récolte.

En prison, la règle est plus apparente que jamais. On est du bon côté, ou du mauvais côté des barreaux.

Mais quand le contexte change et que le monde est en train de couler, que devient la valeur de la règle (cf No Country for Old Men) ? Quand ce qui faisait du sens jadis n’en fait soudainement plus. Les rôles se brouillent. Le cadre devient ridicule. Qu’ils soient du bon ou du mauvais des barreaux, ces hommes se retrouvent tous en prison ensemble. Sans différence.

C’est toi le prisonnier.

J’avais pas remarqué…

Gaetano, et surtout Coletti, s’inquiètent de leur capacité à maintenir l’ordre des choses. Ils veulent à tout pris empêcher une remise en question de ce qu’ils connaissent, car ils n’ont aucune idée de ce qui pourrait venir derrière.

On doit éviter une révolte.

Alors que les prisonniers semblent sereins, les surveillants font bizarrement preuve de nervosité. Profitant de la moindre opportunité pour rappeler aux autres qui est qui. Gaetano se retrouve en cuisine avec Lagioia mais il n’est pas comme lui. Rien à voir. Il le répète.

Toi et moi, on n’a rien en commun!

Les surveillants s’accrochent désespérément aux bouées du monde d’avant comme pour ne pas se noyer. Tout ira bien…

Contentons nous de suivre les consignes.

Ce sont eux qui ont le plus de mal à se faire à l’idée que tout le monde est parti. Ces hommes sont bien abandonnés, à la dérive. Seuls sur leur radeau. Logés à la même enseigne.

On n’y voit rien. C’est comme si on était enterrés, mais vivants.

Lagioia permet à Gaetano de réfléchir à leur condition en observant quelques fourmis dans la cuisine (cf Fourmiz). Il l’informe que contrairement à la légende de la Fontaine voulant que la fourmilière ne soit composée que de travailleuses, il existerait quelques cigales. Lagioia demande alors à Gaetano s’il préférerait faire partie du premier ou du deuxième groupe, s’il avait le choix.

Car chacun·e a le choix. C’est pourquoi Gaetano finit par adapter le code à ce nouveau monde. Il apporte un peu de flexibilité quand la situation l’exige, de manière à ce que la vie puisse continuer. Gérant un problème à la fois.

Je ne vais pas dire un mot de tout cela aux autres sinon ca risquerait de mal tourner.

Voilà comment des personnes qui n’ont a priori rien en commun peuvent se retrouver à la même table et partager un bon moment. Aussi incroyable cela peut-il paraitre.

Gaetano découvre, puis accepte, que ce qui le sépare de Lagioia est une construction mentale qui peut prendre du sens dans un monde, et perdre tout son sens dans un autre.

Ce système rigide qui semble s’imposer à nous ne nous écrase jamais, pour peu que les membres qui le composent aient l’intelligence de vouloir le transformer ensemble. On arrête de célébrer la structure pour elle-même, pour se soucier de ceux que la structure devrait lier.

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

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