RDC – FEMME AU SOMMET
Maghene Deba, 2022
LE COMMENTAIRE
Dans certaines régions du monde, il n’est pas encore la norme de voir une femme à la tribune. Encore moins une femme applaudie par une assemblée masculine. Heureusement, les temps changent. Et on peut espérer qu’il ne change pas toujours pour le pire.
LE PITCH
En Afrique, les femmes veulent être mieux représentées au pouvoir.
LE RÉSUMÉ
En République Démocratique du Congo, le constat est que les instances gouvernementales ne laissent encore que très peu de place aux femmes comme l’explique Marcel Utembi – Président CENCO.
Dans nos cultures, la femme a moins de chances d’accéder à des postes à responsabilité et je pense que les choses doivent être faites autrement aujourd’hui.
Certaines femmes commencent à faire exception, à l’image de Catherine Nzunzi Wa Mbombo, candidate à la présidentielle de 2006, qui exhorte ses consoeurs à se mettre en avant.
Les femmes doivent jouer un rôle. Faut pas être des figurants. Personne ne devinera vos atouts si vous ne vous exprimez pas.
Il est de fait que ce sont encore les hommes qui font le spectacle. Les femmes ne se font pas suffisamment confiance – ni confiance entre elles. Julienne Lusenge, présidente fonds des femmes congolaises, voit des opportunités. Elle croit en la possibilité d’une solidarité féminine qui pourrait servir de tremplin vers les plus hautes fonctions.
L’accès à l’éducation parait également nécessaire. Yvette Tembo Kulefumka, secrétaire générale mobilisation UDPS, reproche aux femmes de ne pas aimer apprendre.
Attention non plus à ne pas être instrumentalisée, comme le fait remarquer Marie Josée Ifoku, candidate aux présidentielles 2018.
Dans notre pays, (…), c’est un homme qui décide de la placer.
Parmi les freins, les femmes ont donc besoin d’être mieux visibles. Elles ont besoin de se donner les moyens de le faire sans attendre qu’on le leur donne.
Sortir de cette ombre masculine étouffante. Les femme sont accusées de complexer les hommes. Celles qui s’engagent en politique sont jugées : pas de bonnes épouses, ni de bonnes mamans.
Pourtant, personne ne doute de ce qu’elles pourraient apporter : un regard plus humain sur la souffrance. Philomène Omatuku, présidente du parlement en 2003, pense que cela ne peut que faire avancer les choses.
Comme le fait remarquer le Professeur Hubert Watongoka, de l’Université de Kimbanguiste Bukavu.
La femme, c’est pratiquement la société – la femme, c’est le pays.
Et Julienne Lusenge d’ajouter :
La survie des familles reposent sur les épaules des femmes.
Pour rentrer pleinement dans la modernité, l’Afrique ne peut pas ne pas avoir de femmes qui la représente.
L’EXPLICATION
RDC – Femme au Sommet, c’est la marche à suivre.
Il n’y a plus que dans les sociétés à la culture patriarcale ancestrale où l’on pense officiellement que la place de la femme se trouve derrière les fourneaux ou le balais. Personne n’est à l’abri puisque cette culture a malheureusement de vieux restes, y compris dans les organisations se voulant paritaires ou favorables à la parité.
Quand la femme est envisagée comme l’égale de l’homme, alors elle devient une potentielle rivale. Aujourd’hui, les hommes ne la brûle plus (cf The Witch) mais ils la tuent encore (cf La Nuit du 12, American Murder). Ils la tyrannisent (cf Les Sorcières d’Eastwick). Cela arrange bien ces messieurs si Madame reste en retrait – si possible sans se plaindre (cf Ce que veulent les femmes).
Les hommes ne veulent pas céder leur place, encore moins à une femme. Question de virilité en jeu. La courtoisie à ses limites. Les hommes se battent contre la femme ou font mine de la promouvoir pour mieux la contrôler, comme ce que l’on peut reprocher à Mobutu lorsqu’il déclarait :
Associer la femme zaïroise à la gestion de la chose publique pour apporter la paix et la construction du pays.
Car il ne doit pas s’agir que d’une question de façade. L’objectif est très clair. La femme veut être en capacité de décider pour elle-même et pour les autres, au nom des autres. Dépasser ce statut de femme en quelque sorte.
Dans la mythologie cinématographique occidentale, on trouve quelques personnages féminins qui sont arrivées à leurs fin, à leur manière et sans devoir imiter les hommes comme Tess McGill (cf Working Girl), Elle Woods (cf La Revanche d’une Blonde) ou encore Michèle (cf Elle).
Ces exemples rappellent tout ce qu’il faut de courage pour se lancer, comme le souligne Marie-Ange Mushobek Wa, journaliste et femme politique. Se féliciter pour son audace parce que cela ne fait pas de mal. Se présenter à la magistrature suprême nécessite de l’ambition, ainsi qu’une belle détermination. Car la femme de littéralement construire sa libération pour conquérir sa liberté, selon Philomene Omatuku. C’est une bataille.
On comprend également l’importance de travailler à sa propre mise en scène, à une époque médiatique où des actrices peuvent franchir le pas pour s’engager en politique : Shatabdi Roy, Sheyene Gerardi, Nusrat Jahan, Smriti Irani, Helen Gahagan Douglas ou Melina Mercouri. Le pouvoir ne se donne pas, il se gagne. Il faut faire du bruit comme le recommande Marcel Utembi. Ainsi l’électeur normal pourra nourrir le rêve et la possibilité d’élire une femme maire de la ville. Selon Dignite Bwiza, avocate, on commencera à voir des femmes à toutes les bases de la pyramide. Elles donneront une perspective et nourriront sûrement des vocations.
Avec ses quelques 17 millions d’habitants, Kinshasa est la plus grande agglomération francophone du monde, devant Paris. C’est l’une des métropoles les plus peuplées. Par conséquent, le vivier est immense. La femme de demain se trouve sans doute parmi ces rangs. L’avenir de l’homme pour reprendre la formule d’Aragon. On pourrait dire l’avenir de l’humanité, en mettant cette formule à jour.
Pour cela, il ne faut pas oublier les coulisses, comme le note Marie Josée Ifoku. On se parle quand même de politique (cf Les Promesses)! Il faut travailler de partout, trois fois plus que les autres.
En RDC, la femme peut s’appuyer sur les progrès comme l’égalité entre hommes et femmes formalisée en 2006. Elle connait son chemin et sait pertinemment qu’elle doit s’armer de patience car la route est longue. Il faudra deux, peut-être trois cycles. L’accession au sommet se construit en plusieurs temps. Julienne Lusenge parle d’un travail de longue haleine.
Précisément pour cette raison qu’il ne faut pas attendre.
Comblé d’avoir mon film https://explicationdefilm.com/2023/05/14/rdc-femme-au-sommet/ sur la plateforme. Merci a Basile, merci a http://www.explicationdefilm.com