MARS ATTACKS!
Tim Burton, 1996
LE COMMENTAIRE
Et si les extra-terrestres ne ressemblaient pas aux martiens dont on nous parlait dans les bande-dessinées de science-fiction, ni à Roswell ? Si, au contraire, ils avaient une vague ressemblance avec leurs cousins de la planète terre (cf La Soupe aux Choux)? En tout cas, ces extra-terrestres ne pourraient être que méchants.
LE PITCH
Les petits hommes verts débarquent.
LE RÉSUMÉ
Des signaux extra-terrestres sont interceptés de l’espace. Puis des centaines de soucoupes volantes old-school font route vers la terre. Le Président James Dale (Jack Nicholson) s’adresse à la nation dans un discours solennel visant à préparer ce moment historique. Une délégation militaire ainsi que des badauds se rendent dans le Nevada pour former un comité d’accueil tandis que le président, sa femme (Glenn Close) et sa fille Taffy (Natalie Portman) regardent en direct à la TV.
Les Martiens ressemblent en tout point aux petits hommes verts tels qu’on les fantasmait. Ils ont un visage squelettique, un regard inquiétant et un cerveau sur-dimensionné protégé par une bulle de verre.
À leur arrivée, tout le monde s’observe en chien de faïence. Les intentions des visiteurs semblent pacifiques, ce qui est confirmé par le traducteur.
We come in peace, we come in peace!
Lorsqu’un hippie lâche une colombe en signe de paix, les Martiens, surpris, la pulvérisent aussitôt avant de dégommer tout le monde dans la foulée. Ils capturent au passage quelques prisonniers dont ils se serviront pour des expériences dignes du macabre Joseph Heiter (cf The Human Centipede). Les Dale sont impuissants et médusés devant leur écran de TV.
Le Président, persuadé que la colombe a été mal interprétée, veut rétablir le contact avec les Martiens. Ils les invite à nouveau, en grandes pompes au Congrès, ignorant les conseils de son état major. C’est le massacre. Il faut riposter.
We should nuke these assholes with everything we got, sir.
L’arme nucléaire est inefficace. De leur côté, les Martiens frappent de manière chirurgicale, ce qui leur donne l’occasion de se débarrasser du président Dale, de sa femme ainsi que du Général Decker (Rod Steiger).
À Vegas la résistance s’organise autour d’un petit groupe conduit par un ancien champion de boxe Byron Williams (Jim Brown) et par le chanteur Tom Jones. Ils découvrent un peu par hasard que les extra-terrestres ne supportent pas la chanson Indian Love Call. Leur scaphandre explose. Grâce à cette découverte, les militaires passent du Slim Whitman à fond dans les enceintes.
Les Martiens sont vaincus.
Avec les honneurs, les sauveurs de la planète reçoivent une médaille de la part de Taffy, l’unique rescapée du gouvernement. Ceux qui s’étaient cachés sortent de sous terre pour découvrir une planète en chantier comme après un tremblement de terre (cf San Andreas).
Tout est à reconstruire.
L’EXPLICATION
Mars Attacks!, c’est un retour sur terre.
L’humanité est nombriliste par nature et les réseaux sociaux n’ont rien arrangé. Pour peu que l’on ouvre un tout petit peu ses horizons, on court le risque de se recentrer encore plus naturellement sur soi-même, son périmètre et son confort… jusqu’à se scléroser.
Il suffit de voyager en dehors de ses frontières pour constater à quel point la pensée chauvine est profonde dans l’Hexagone : la cuisine, l’exception culturelle, le grand Paris, le Tour de France, l’équipe de France de football ou de rugby, Olivier Giroud, la French Tech, la French Touch, le festival de Cannes, les Césars. Un peu comme s’il n’y avait que la France sur terre.
Quand on se confronte au monde et qu’on fait preuve d’arrogance, on se prend obligatoirement une leçon d’humilité dans la figure. Cela vaut pour tout le monde. La rencontre avec les Martiens inflige une sévère leçon à l’humanité toute entière.
L’arrivée des Martiens rend les conventions totalement absurdes (cf Shiva Baby). L’annonce de la rencontre de Pahrump est une occasion de mettre les petits plats dans les grands avec des cérémonies protocolaires solennelles qui semblent bien dérisoires a posteriori.
The teeming masses have gathered from who knows how many states. Waiting and watching. Why have they come? Curiosity? Or is it something more, or is it simply to say « I was there. I was there when first man met Martian. » Jason Stone, GNN. Pahrump.
Tout le monde s’excite, surtout les profiteurs (cf Nightcrawler) qui ne pensent qu’à leurs petits intérêts. Celles et ceux qui ont envie de se faire voir sur la photo.
When the Martians land, will the press have access? Can we do interviews??
Les Martiens mettent en relief la propension humaine à décrypter tout et n’importe quoi. Notamment ce qui ne donne pas lieu de l’être. Les spectateurs et spectatrices voient l’ambassadeur Martien faire un geste de la main et en concluent qu’il fait référence à un beignet.
Wow, he just made the international sign of the doughnut.
Bravo.
On fait avec sa culture.
Occuper le vide comme on peut. À la manière de journalistes passant des heures à interpréter des paroles creuses de candidat·es lors de soirées électorales interminables.
Les Martiens sont le vide. Lorsque la situation bascule, il se trouve que l’humanité manque de panache. Elle frime et quand les choses vont mal, elle s’accroche aux branches pitoyablement, comme le Président Dale qui ne veut pas céder à la panique.
I want the people to know that they still have 2 out of 3 branches of the government working for them, and that ain’t bad.
On serait même prêt à toutes les négociations pour maintenir le status quo. Ainsi le Président exige un armistice avec les extra-terrestres, tout en les insultant au passage.
Why can’t we work out our differences, why can’t we work things out? Little people, why can’t we all just get along?
Les grandes solutions de celles et ceux qui savent sont totalement inopérantes. La bombe atomique des militaires fait pschitt. Finalement ce sont les gens du peuple qui sont encore les plus pragmatiques (cf Le Poulpe).
If the Martians land, the’re gonna need a place to stay. Just like everybody else.
Le tableau n’est donc pas si sombre car la solution existe. Elle vient des gens simples, ceux qui font avec leurs moyens et dont les analyses sont souvent plus lucides.
Why did they do that?
Maybe they no liking the human being.
Les extra-terrestres font voler les beaux principes en éclat. Les traditions, les travaux philosophiques, les oeuvres d’art, les ego ne rendent personne moins vulnérable que les dinosaures. Un nouvel ordre, qu’on espère moins prétentieux, finira par remplacer l’ancien.
9 commentaires