US
Jordan Peele, 2019
LE COMMENTAIRE
La vie a parfois des allures de long fleuve tranquille. Les élections se suivent et se ressemblent. Les saisons sont marquées par des vacances au camping pour les moins fortunés et au ski pour ceux qui ont les moyens. En dehors de quelques crises (cf Inside Job), la machine tourne relativement bien – pour certains en tout cas. Jusqu’à ce qu’un jour, des étrangers finissent par occuper votre entrée de garage.
LE PITCH
Une famille est prise en otage par elle-même.
LE RÉSUMÉ
En 1986, la petite Adelaide Thomas se promène dans la fête foraine de la plage de Santa Cruz accompagnée de ses parents. Elle échappe à l’attention de son père pour se réfugier dans la galerie des glaces, attirée par la mention:
Find yourself here.
Elle y trouve son double puis ressort muette. Il lui faudra des années pour retrouver la parole et finalement fonder une famille avec Gabe (Winston Duke). Le couple a deux enfants: Jason (Evan Alex) et Zora (Shahadi Wright Joseph).
Adelaide désormais Wilson (Lupita Nyong’o) n’est pas très heureuse à l’idée de retourner à Santa Cruz pour les vacances. Trop de coïncidences, trop de mauvais souvenirs. Elle fait part de sa nervosité à son mari. Une panne de courant les plonge dans l’obscurité. Une famille similaire à la leur les observe depuis l’extérieur de manière inquiétante.
Once upon a time, there was a girl and the girl had a shadow. The two were connected, tethered together. And the girl ate, her food was given to her warm and tasty. But when the shadow was hungry, he had to eat rabbit raw and bloody. On Christmas, the girl received wonderful toys; soft and cushy. But the shadow’s toys were so sharp and cold they sliced through her fingers when she tried to play with them. The girl met a handsome prince and fell in love. But the shadow at that same time had Abraham, it didn’t matter if she loved him or not. (…) The shadow had to do it all herself. (…) So you see, the shadow hated the girl so much.
Terrifiés, les Wilson affrontent leurs doubles respectifs dans un combat à mort. Gabe parvient à se débarrasser de son homologue en le déchiquetant avec les hélices de son bateau. Zora parvient à semer son alter ego. Jason isole le sien dans un placard. Et Adelaide réussit à neutraliser Red, sa moitié maléfique.
Les Wilson se réfugient chez leurs amis Kitty (Elisabeth Moss) et Josh Tyler (Tim Heidecker). Malheureusement, le couple et leurs deux jumelles se sont faites massacrer par leurs doubles. Car il ne s’agit pas d’un fait isolé. Des milliers de doubles sont apparemment sortis des égouts, tout de rouge vêtus, pour former une gigantesque chaîne humaine – et tuer tout le monde à coups de ciseaux.
Les Wilson retournent à Santa Cruz pour l’affrontement final. Adelaide découvre un passage vers les sous-sols. Red révèle qu’elle fait partie d’une expérience gouvernementale pour contrôler le monde. L’expérience a échoué et depuis, les « reliés » comme ils se sont baptisés, végètent sous terre. Red a organisé la résistance et aujourd’hui les « reliés » prennent leur revanche.
It’s our time now to go up there.
Adelaide parvient à tuer Red. Les Wilson s’échappent tandis que les « reliés » forment leur chaîne humaine, au milieu des cadavres.
Dans l’ambulance, Jason remarque quelque chose d’étrange dans les yeux de sa mère. Il comprend ce qui s’est passé. Des années plus tôt, la petite Red a étranglé Adelaide et l’a menottée à son lit pour mieux prendre sa place à la surface. Adelaide est en fait Red. C’est une reliée.
L’EXPLICATION
Us, c’est la rebellion des oubliés (cf Ouistreham).
Les Wilson sont une famille afro-américaine de la classe moyenne américaine, bien intégrée, qui conduit une Mercedes et qui a les moyens de se payer un petit bateau pour profiter du lac au bord duquel ils ont une résidence secondaire. Tout va exceptionnellement bien pour eux, considérant la communauté à laquelle ils appartiennent (cf le 13e).
Les « reliés » sont des lapins en cage. Des sortes de zombies qui reproduisent à l’identique les faits et gestes de leurs copies à la surface. Ils ne sont pas articulés, voire pire (cf Idiocracy). On les a cachés là où ils ne peuvent ennuyer personne, loin des regards : à la cave.
Ces êtres humains s’estiment pourtant autant Américains comme les autres.
We’re Americans.
Ces ombres qui nous font peur, qui sont habillées de combinaisons rouges comme d’autres pourraient porter des gilets jaunes, ne sont pourtant qu’une version de nous-mêmes. Un reflet qui nous gêne car il nous ressemble.
It’s us.
Notre face cachée en a marre de végéter dans les sous-sols (cf Underground). Elle est en colère. Mais puisqu’elle menace la classe dominante et qu’aucune discussion ne semble possible, on préfère avoir recours à un peu d’ultra-violence (cf Orange Mecanique). Peu importe s’il s’agit d’une part de nous-mêmes. On lui envoie la police et peut-être un jour l’armée pour l’écraser. Pas de pitié. Comme si nous nous tirions une balle dans le pied.
They look exactly like us, they think like us, they know where we are. We need to move and keep moving. They won’t stop until they kill us. Or we kill them.
Ce qui compte pour les Wilson, c’est le retour à la normale. Adelaide et Gabe se veulent rassurants.
Everything is going to be the way it was.
Statu quo. Plier sans rompre. Éviter le pire (cf Joker).
Une bonne partie d’entre nous aimerait que les manifestations s’arrêtent enfin. Que nous puissions reprendre le cours de nos vies, profiter de nos vacances et de la magie des courses de Noël comme le souhaitait M. De Rugy sur les plateaux de télévision au mois de Décembre 2018.
Nous nous battons contre une partie de nous qui a été instrumentalisée et qui ne souhaite qu’une chose : faire une chaîne humaine afin de profiter du soleil comme les autres. Nous faisons de la résistance contre nous-mêmes. Les Wilson s’enfuient, avec à leur tête, la leader des « reliés ».
Ce n’est pas la République qui est en marche, c’est plutôt la Révolution.
Get out, Us, Sorry to bother Le nouveau Spike Lee est en marche en de meilleures versions en plus
Merci! En quoi le trouves tu meilleur que Spike Lee par exemple?
Quand Spike Lee traite le racisme, il le fait directement genre les brutalités policières, les mouvements black vs supremacistes (les films avc Denzel), arrestations arbitraires (Blackkklansman)
Alors que Jordan lui certes trsite le racisme au fond mais le voile avec quelque chose qui rend le film passible d’une autre étiquette que celui du « social » par exemple Get out & Us on peut dire fiction ou horreur; et Sorry to bother comédie. Il nuance les films ca les rend plus attrayants tout en etant sombre pour la plupart.
Il mélange un peu plus les genres effectivement.