THE WRESTLER

THE WRESTLER

Darren Aronofsky, 2008

LE COMMENTAIRE

Si une entreprise est un peu comme une montgolfière, alors un homme est un peu comme un avion. Il décolle. Atteint sa vitesse de croisière en haute-altitude. Puis finit par redescendre tout doucement… Certains plus vite que d’autres. Sur la piste d’atterrissage, il ne reste plus qu’un gros balourd avec les cheveux longs.

LE PITCH

Un catcheur est à bout de souffle au cœur.

LE RÉSUMÉ

La carrière de Randy « The Ram » Robinson (Mickey Rourke) s’est arrêtée quelque part dans les années 80. Vingt ans plus tard, celui qui est redevenu Robin Ramzinski vit misérablement entre son boulot à temps partiel au Suma du coin et quelques combats de seconde zone.

Il dort dans sa camionnette, se fait moquer par le magasinier qui l’emploie et se lie d’amitié avec Cassidy (Marisa Tomei) une strip-teaseuse elle-aussi trop vieille pour son métier (cf Showgirls).

Le Ram se voit néanmoins offrir la chance d’un « re-match » contre l’Ayatollah (Ernest Miller) ce qui lui permettrait de revenir sur le devant de la scène. Il se prépare, augmente les doses de stéroïdes puis il est victime d’un arrêt cardiaque. Le chirurgien est formel. Il est temps d’arrêter les bêtises.

Le Ram prend la sage décision de travailler à temps plein au supermarché. Sur les conseils de Cassidy, il reprend contact avec sa fille Stephanie (Evan Rachel Wood) qu’il a abandonnée étant petite.

En confiance, le Ram fait des avances à Cassidy mais celle-ci le repousse sur le motif qu’elle a déjà un fils. En plus, elle est une strip-teaseuse consciencieuse qui ne sort pas avec ses clients. Point final.

Randy le vit mal. Il se saoule puis passe le jour suivant à dormir, ratant au passage le dîner qu’il avait promis à sa fille.

Why do I do this?

Because you’re a fuck-up!

Il ne supporte plus les railleries des clients au supermarché et décide de se couper le pouce pour en finir avec ce boulot pourri.

Re-programme son « re-match » contre l’Ayatollah. Avant ce qui sera sûrement son dernier combat, Cassidy tente de le dissuader. Randy refuse poliment.

The only place I get hurt is out there, the world don’t give a shit about me.

Pendant l’affrontement, il ressent à nouveau une douleur dans la poitrine. L’Ayatollah le remarque et l’incite à abréger les débats. Le Ram monte sur les cordes pour entamer son coup du bélier. Il regarde dans la foule pour voir s’il aperçoit Cassidy qui est déjà partie pour ne pas assister au massacre.

Le Ram goûte une dernière fois aux applaudissements de son public avant de s’élancer.

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L’EXPLICATION

The Wrestler, c’est ce qu’on trouve sous le maquillage.

Robin Ramzinski vit dans le New Jersey, en plein dans l’Amérique des profondeurs (cf L’âme divisée de l’Amérique). Il fréquente les salles de gym miteuses. Son job est aussi pourri que sa coiffeuse. Il se fait des piqûres de stéroïdes dans les fesses (cf Icarus) et enchaîne les séances d’UV pour sauver les apparences.

Le corps se fatigue. Les barbelés blessent. Et le cœur se fragilise. Lorsque Robin fait son attaque, personne ne vient le voir à l’hôpital – pas même son promoteur qui lui fait suivre son enveloppe par infirmière interposée.

Le problème de Robin Ramzinski est que dans une autre vie, il était le Ram. Il a connu « la grandeur ». Impossible de se faire à l’idée de cette vie monotone. Il ne peut pas vivre dans la réalité (cf Le Prestige). Même s’il essaie, il ne peut y parvenir. Ce n’est tout simplement pas pour lui.

Certain·es sont fait·es pour les drames, pas pour les documentaires sociétaux. Le Ram se réconcilie avec sa fille en lui faisant la révérence et en lui servant un monologue assez touchant.

I just want to tell you, I’m the one who was supposed to take care of everything, I’m the one who was supposed to make everything okay for everybody. It just didn’t work out like that. And I left. I left you. You never did anything wrong. I used to try to forget about you, I used to try to pretend that you didn’t exist, but I can’t. You’re my girl, you’re my little girl. And now, I’m an old broken down piece of meat, and I’m alone. And I deserve to be all alone. I just don’t want you to hate me.

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La réalité est plus forte: il est incapable de tenir ses promesses.

Parce que dans la réalité, on ne se réconcilie pas comme dans les films. On reste brouillé à vie, souvent pour des petits trucs – comme abandonner sa fille par exemple.

Robin est un loser parce que dans la vraie vie de tous les jours, il est un combattant (cf Fighter) qui perd.

Alors, on comprend qu’il n’a pas d’autre choix que de redevenir le Ram, ce catcheur qui arrive encore à électriser les foules dans des chorégraphies bien huilées. Et c’est presque tant mieux parce qu’au moins dans ce personnage, il a plus de classe. Une raison d’être. Lors de son dernier combat, il rend d’ailleurs un vibrant hommage à son public.

When you live hard and you play hard and burn the candle at both ends… in this life, you can lose everything you love, everything that loves you. A lot of people told me that I’d never wrestle again, they said « he’s washed up », « he’s finished » , « he’s a loser », « he’s all through ». You know what? The only ones gonna tell me when I’m through doing my thing, is you people here. You people here, you’re my family.

La fantaisie est un mal nécessaire pour divertir les oublié·es de notre société. Beaucoup d’entre nous préfèrent les publicités photoshopées mais il faut les respecter (cf Treasures from the Wreck of the Unbelievable).

Rendons hommage aux gens comme Robin, c’est à dire à ceux qui se dévouent pour les autres et dont on ne devrait pas se moquer. Comme ces cyclistes dopés sur lesquels on crache mais qu’on a besoin de voir monter les cols alpins comme des mobylettes. Ces artistes donnent de leur personne; leur espérance de vie ne dépasse souvent pas la cinquantaine.

Alors donnons une standing ovation à celles et ceux qui le méritent comme ces danseuses qui continuent de se déhancher pour faire bander des poivrots, ou ces catcheurs qui se mettent sur la tronche pour de faux, dans l’espoir de nous sortir de notre quotidien devenu trop morose.

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

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