L’ADVERSAIRE

L’ADVERSAIRE

Nicole Garcia, 2002

LE COMMENTAIRE

On dit qu’on peut parfois être son pire ennemi (cf Black Swan). Nous aurions une sorte de face B, comme un alter ego destructeur. On l’entend partager ses doutes. La plupart du temps, on parvient à le museler. Ou alors on fait semblant que cet autre soi n’existe pas. On se voile la face en se tournant le dos. Tout va bien jusqu’à ce que cela n’aille plus. Il arrive toujours un moment où l’on finit par être dos au mur.

LE PITCH

À court de mensonges, un faux docteur arrive en bout de course.

LE RÉSUMÉ

Jean-Marc Faure (Daniel Auteuil) vit avec sa femme Christine (Géraldine Pailhas) et leurs deux enfants dans le Doubs, à proximité de la frontière franco-suisse. Il est chercheur en cardiologie à l’OMS à Genève. Ou plutôt, il le fait croire à tout le monde. En réalité, il ne fait rien à part raconter des histoires (cf La peau douce).

Il prétend se rendre à des colloques qu’il passe à attendre dans les cafétérias ou dans sa voiture. Il se procure des brochures. Parfois il vole un badge, ce qui lui permet de faire illusion. Depuis son échec en 2e année de médecine (cf Première année), tout le monde n’y voit que du feu. Y compris son ami Luc (François Cluzet).

Jean-Marc enchaîne les mensonges. Il survit en extorquant de l’argent à son beau-père (Bernard Fresson) à son insu, en prétendant gérer sa fortune qu’il a investie dans une banque genevoise.

Ce dernier veut récupérer son placement et s’impatiente devant les excuses de son gendre. Il est victime d’un regrettable accident. Une aubaine pour Jean-Marc qui continue de s’enfoncer.

Il entretient une liaison avec Marianne (Emmanuelle Devos), l’ex-femme de Rémi (François Berléand), et va régulièrement la voir à Paris. Il lui offre des bijoux, l’invite dans des restaurants gastronomiques et lui faire miroiter de rencontrer Bernard Kouchner.

Je me rendais pas compte que tu avais ces activités, que tu connaissais ces gens…

Marianne entend parler des ‘bons plans’ suisses de Jean-Marc et lui propose de gérer sa fortune personnelle.

Le faussaire continue de dépenser. Ses nombreux mensonges finissent par créer des incohérences qui éveillent des soupçons chez Christine.

J’ai eu un accident, j’ai été éjecté. La voiture a fait trois tonneaux.

…. Mais, elle est là la voiture.

Comme la famille ne manque de rien, elle ne s’est jamais posée aucune question. Soudain, elle découvre que leur compte en banque est à zéro. Elle confronte son mari et réclame des explications que Jean-Marc n’arrive pas à fournir.

Si on t’a renvoyé dis le moi.

Pourquoi on m’aurait renvoyé ?

Une faute grave ?

Je sais pas…

Sans solution, Jean-Marc tue sa femme. Puis il tue ses deux enfants de sang froid. Il se rend chez ses parents pour les abattre à leur tour. Marianne est épargnée. De retour à la maison, il laisse un message aux autorités.

Un banal accident et une injustice peuvent provoquer la folie. Pardon.

Il avale des barbituriques puis met le feu à la maison. Les pompiers ont le temps d’intervenir pour lui sauver la vie (cf Backdraft). Alerté par l’incendie, Luc ne peut que constater le massacre.

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L’EXPLICATION

L’Adversaire, c’est ce qu’on ne voit pas.

Jean-Marc est un homme réservé, un peu mystérieux.

C’est ça que t’aimes en lui, son goût du secret!

Pas un mot plus haut que l’autre. Discret, on ne le remarque pas (cf The Barber). On lui donnerait le bon Dieu sans confession. D’ailleurs, on lui donne son argent les yeux fermés. Qui pourrait soupçonner la moindre mauvaise intention chez cet homme ? Lui qui a l’air de tellement maitriser son sujet qu’il en est rassurant.

Personne ne pourrait imaginer qu’il passe ses journées sur le parking d’un supermarché à lire des livres de médecine tout en mangeant des petits beurres. Quand tout le monde le croit à Oslo pour un séminaire de dernière minute, qui pourrait s’imaginer qu’il passe trois jours sans sortir de sa chambre d’hôtel à Genève ?

Pourtant, Jean-Marc va mal. Un peu comme un voyageur qui aurait raté son avion et qui reste prisonnier de l’aéroport, à errer comme un fantôme. Il ne sait plus quoi faire. Son apparente sérénité cache de plus en plus mal un sentiment de panique grandissant.

Il est un mythomane prisonnier de ses mensonges. Plus le temps passe et plus ses affaires se compliquent. Il fuit comme Franck Abagnale (cf Catch me if you can). Son histoire n’a cependant rien d’héroïque. Elle est plutôt désespérée. Rien ne le retient dans sa chute. Certains indices auraient du alerter son entourage : il fond en larmes soudainement auprès de sa femme.

Il essaie également de parler de son désespoir à son ami Luc qui met cela sur le compte d’une petite aventure.

Tu crois que ta petite vie c’est quoi ? Le modèle universel ?

Personne ne s’est méfié. Christine découvre avec horreur qu’elle n’a aucune idée de qui est l’homme avec lequel elle partage sa vie. Comme si tout n’était qu’une vulgaire supercherie. Et Luc arrive trop tard.

Vous faites toutes vos années de médecine en le côtoyant presque tous les jours. Il ne passe pas un examen et vous ne vous apercevez de rien ?

Pourquoi je l’aurais pas cru ?

Jamais une question, jamais un doute… vous n’avez rien vu ?

Peut-être que je n’ai pas su l’écouter…

En effet, on passe notre vie en se concentrant d’abord sur nous. On parle avant d’écouter. Aucune attention au petit détail.

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Marianne, telle Emma Bovary, rêve de Paris, de grands hôtels et de célébrités. Trop heureuse de se laisser bercer par les belles paroles de Jean-Marc. Elle se fait sa propre histoire (cf Treasures from the wreck of the Unbelievable).

Le père de Christine ne considère Jean-Marc que parce qu’il fait fructifier son patrimoine. Comment le fait-il ? Peu importe.

Christine est bien au chaud avec son mari chercheur. Tout va bien.

Nous sommes un peu tous comme le fils de Jean-Marc qui n’a pas envie d’être dérangé pendant qu’il regarde Mister Castor à la TV. On s’en fiche. Les yeux fermés (cf Eyes Wide Shut).

On ne lit pas les contrats qu’on signe. Ni les petites lignes au bas de la page. On ne se rend pas compte que ceux qu’on croit être de notre côté sont finalement nos plus farouches adversaires.

La menace était sous notre nez. On ne peut s’en prendre qu’à nous mêmes. Quand on commence à s’inquiéter, on a déjà une balle dans la tête. Et la maison est en flammes.

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

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