NÉ UN 4 JUILLET
Oliver Stone, 1989
LE COMMENTAIRE
Qu’on est beau quand on est jeune et frais, prêt à partir au combat. Une jeune recrue (cf Le désert des Tartares). On n’a encore rien vu. Très loin de savoir ce que la vie peut nous réserver de pire (cf Voyage au bout de l’enfer). Alors on fait des grands discours, au nom de la nation. Plein de belles certitudes. Les médailles qui brillent déjà sur la veste. Qu’on est con quand on est jeune.
LE PITCH
Un jeune homme part à la guerre en héros et en revient en paria.
LE RÉSUMÉ
Ron Kovic (Tom Cruise) est un vrai patriote américain depuis sa tendre enfance. JFK lui donne envie de s’engager dans les Marines. Les recruteurs finissent de le convaincre. Il rejoint l’armée pour le plus grand bonheur de sa mère (Caroline Kava) mais pas de son père (Raymond J. Barry), un vétéran de la 2e Guerre Mondiale.
Don’t you know what it means to me to be a Marine, Dad? Ever since I was a kid I’ve wanted this. I’ve wanted to serve my country, I want to go to Vietnam. And I’ll die there if I have to.
Il aurait peut-être mieux fait.
Ron affiche une détermination patriotique sans faille.
People say that if you don’t love America, then get the hell out. Well, I love America.
Il danse une dernière fois avec Donna (Kyra Sedgwick) au bal de promotion puis part faire ses classes (cf Full Metal Jacket). En 1967, le Sergent Kovic se retrouve à tirer sur des civils après les avoir confondus avec des Viêt-congs. Le village est rasé. Les militaires y abandonnent un bébé. Puis Kovic abat par erreur un soldat de son unité. Bizarrement, ses supérieurs ne lui en tiendront pas rigueur.
Grièvement blessé l’année suivante, le docteur ne veut lui laisser aucun espoir.
We want to make one thing very clear to you, Ron. (…) You’re a T6 – paralyzed from the mid-chest down. Probably, you’ll be in a wheelchair for the rest of your life.
(…) I’ll walk again.
(…) No. Let me tell you something, Ron. You will NEVER walk again.
De retour en Amérique, Ron reste quelques temps dans un hôpital du Bronx dans des conditions désastreuses.
Il rentre à la maison en fauteuil roulant. Impossible de finir son discours lors de la fête nationale, trop ému par les cris d’un bébé.
Ron Kovic retrouve Donna à Syracuse où elle manifeste contre la guerre au Viet-Nam.
L’ex-marine souffre au quotidien. Il se réfugie dans l’alcool. Ses parents l’envoient en exil au Mexique, dans un camp de vétérans bousillés. Il y sympathise avec Charlie (Willem Dafoe), un autre blessé de guerre comme lui.
Ron retourne au Texas puis en Géorgie où il se confesse auprès de la famille du marine qu’il a tué par erreur. En 1972, il rejoint l’association des vétérans contre la Guerre du Viet Nam. Ses propos font polémique, juste après l’élection de Nixon.
Quelques années plus tard, il délivre un discours plus posé lors de la Convention du parti démocrate qui lui permet de vider son sac (cf Three Billboards) et lui offre un semblant de paix.
I’m a Vietnam veteran, I’m here tonight to say, this war is wrong. This government lied to me, lied to my brothers. (…) I can’t find the words to express how the leadership of this country sickens me. (…) Well, I love America. We love the people of America very much. But when it comes to the government it stops right there. (…) We are here to tell the truth.
L’EXPLICATION
Né un 4 Juillet, c’est la victime d’un crime de haute trahison.
Une partie de la force des États-Unis, en plus de sa puissance militaire et économique, repose sur son amour inconditionnel du drapeau. Les Américains sont de véritables patriotes – sans qu’on ne les traite jamais de fascistes. Certains donneraient pourtant tout pour leur pays et ce qu’il représente.
Ce sont d’ailleurs souvent celles et ceux qui souscrivent à la promesse de Trump de refaire des États-Unis great again. Quand ? Certainement pas pendant la Guerre du Viet-Nam en tout cas puisque les États-Unis n’ont pas fait de cas de leurs boys à leur retour (cf Rambo).
Ce fut déjà le cas, dans une moindre mesure, avec la 2e Guerre Mondiale (cf The Master). Les soldats souffrant de PTSD ont été mis comme de la poussière sous le tapis. En l’occurrence, le Viet-Nam fut le premier conflit que les Américains n’ont pas gagné. Il fut également un sujet qui divisa l’opinion. Épineux.
Ron Kovic est né un 4 juillet (cf Independence Day). Tout un symbole. Il ne pouvait pas ne pas se battre pour son pays, au péril de sa vie. Exposé à l’horreur de la guerre et ses injustices (cf Armadillo). Il a même frôlé la mort (cf L’expérience interdite).
I’ve come to give you your last rites, are you ready?
Il ne revient pas comme un héros, estropié, dans un pays en crise, qui se moque de lui car il y a d’autres problèmes.
Sometimes, Stevie, I think people, they know you’re back from Vietnam, and their face changes: the eyes, the voice, the way they look at you, you know.
I know what you mean, Ronnie, but people here, they don’t give a shit about the war! Yeah! To them, it’s just a million miles away. It’s all bullshit, anyway.
Il se fait même cracher dessus par les opposants à la guerre, puis par ses supporters. La double-peine.
Ron Kovic est un homme que son pays tout entier a trahi :
Tout d’abord, les politiques lui ont fait croire que cette guerre était juste.
Ensuite, les militaires l’ont envoyé tuer des civils puis ont fermé les yeux sous prétexte que la guerre excuse tout.
Du côtés des médecins, ils ont été dépassés par les événements et qui ont cruellement manqué de moyens pour s’occuper du service après-vente.
Sa petite amie ne l’a pas attendu puis a rejoint les manifestants anti-Viet-Nam.
Les fans de Nixon méprisent les vétérans qui retournent leur veste militaire.
Sa mère refuse d’entendre la souffrance de son fils.
Thou shalt not kill, Mom. (…) Isn’t that what you taught us?
Ron Kovic a fait confiance. Pourtant, il est une figure chevaleresque. Un combattant honorable qui vit à la mauvaise époque. Il paie au prix fort.
Peut-être aurait-il mieux fait d’être né en France un 15 août.
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