PRESQUE CÉLÈBRE
Cameron Crowe, 2000
LE COMMENTAIRE
Les mots comptent. Une personne presque célèbre ne l’est pas. Ce qui la sépare d’une personne célèbre tout court est qu’à la fin du spectacle, elle reste seule dans la salle, sa rose à la main.
LE PITCH
Un jeune journaliste en herbe accompagne un groupe de rock n’roll dans sa tournée.
LE RÉSUMÉ
Le jeune prodige William Miller (Patrick Fugit) hérite de sa soeur Anita (Zooey Deschanel) la passion de la musique. Lorsque celle-ci quitte le domicile familiale pour fuir son étouffante mère (Frances McDormand), l’adolescent met la main sur une belle collection de vinyles. Le droit attendra, William veut se lancer dans le journalisme musical. Ses articles attirent d’abord l’attention de Lester Bangs (Philip Seymour Hoffman) puis du prestigieux Rolling Stone Magazine.
William va prendre la route avec le groupe Stillwater de Russel Hammond (Billy Crudup) et Jeff Bebe (Jason Lee), ainsi que quelques groupies parmi lesquelles Penny Lane (Kate Hudson), la maîtresse de Hammond.
Avant de partir, Lester Bangs a émis un avertissement :
You cannot make friends with the rock stars. (…) They are not your friends. These are people who want you to write sanctimonious stories about the genius of the rock stars, and they will ruin rock and roll and strangle everything we love about it.
Pourtant William va vivre la grande vie, repoussant sans cesse son retour et la remise de son article. Les artistes ne se méfient plus de celui qu’ils considéraient pourtant comme un potentiel ennemi.
They say you’re dangerous. You see everything. Most people… are just waitin’ to talk, but you listen.
C’est ainsi que William participe aux soirées, assiste aux disputes entre les membres du groupe qui prend de plus en plus de volume jusqu’à faire la couverture du prestigieux magazine.
Cette fois, William doit rendre sa copie. Lester Bangs lui donne un dernier conseil.
I know you think those guys are your friends. You wanna be a true friend to them? Be honest, and unmerciful.
Soucieux de protéger l’image de Stillwater, Russell Hammond refuse de cautionner le travail de William. Rolling Stone annule l’article.
Russell cherche à revoir Penny Lane qui lui donne une fausse adresse. Le musicien se retrouve chez William, à devoir se justifier auprès de sa mère. Il s’excuse auprès du jeune homme et lui accorde une nouvelle interview qui sera bien publiée.
Penny Lane est partie au Maroc, loin du star system, comme elle en avait fait la promesse à William. Quant au groupe, il est reparti en tournée dans son bus légendaire.
L’EXPLICATION
Presque Célèbre, c’est peut-être mieux que d’être célèbre tout court.
À la base, il y a une passion. William adore la musique. À défaut de savoir en jouer, il écrit comme Lester Bangs qui est tout aussi passionné, bien qu’un peu aigri.
Good-looking people don’t have any spine. Their art never lasts. They get the girls, but we’re smarter.
Russell et Jeff sont de vrais amoureux du rock’n’nroll qu’ils qualifient comme un état d’esprit plus qu’un business, bien que cela rapporte.
Rock ‘n’ roll is a lifestyle and a way of thinking… and it’s not about money!
Russell regrette même que Stillwater se repose un peu sur ses lauriers.
it doesn’t sound like music anymore, you know, it sounds like… lifestyle maintenance, or something.
Puis il y a Penny Lane qui est une passionnée de ceux qui mènent ce style de vie : les voyages, les rencontres, l’inattendu, la gloire (cf Tár)…
Don’t you have any regular friends?
Famous people are just more interesting.
Ils sont tous ensemble dans le même bus, faisant route vers la célébrité : le succès populaire. Stillwater en tête, avec le support des groupies et la caution des journalistes. Dans cet écosystème fermé, chacun profite de l’autre pour se rapprocher de son fantasme (cf This is Spinal Tap). William se voit journaliste à Rolling Stone. Penny Lane se projette comme la femme de Russell, bien qu’il soit marié. Et les Stillwater se voient bien en haut de l’affiche.
Ils se laissent porter, sans réfléchir à ce qui leur arrive. Pas d’analyse. La vie en tournée.
I kept thinking I was gonna go home the next day.
Yeah. So did I, fifteen years ago.
Le chemin est long et parsemé d’embûches. Quand on se rapproche de la célébrité, les ego deviennent de plus en plus sensibles. Les jalousies se déchaînent. Il faut dire que le bus à l’intérieur duquel ils voyagent repose sur quatre roues très instables.
It just becomes an industry of… cool.
Le cool est une notion abstraite. Une boussole qui change de direction sans arrêt en fonction du vent. N’en déplaise à ceux qui se proclament les papes du cool, qui peuvent également disparaître du jour au lendemain. D’abord au top. Puis plus dans le coup. Sans explication.
Your looks have become a problem!
Il faut dire que la popularité n’est rien comparée au prestige (cf Birdman).
Des personnes le savent et n’essaient même pas, comme la mère de William qui semble effectivement être la personne la moins rock’n’roll sur terre.
Hey, hey, listen to me, mister. You’re charm doesn’t work on me. This is not some apron-wearing mother you’re speaking with – I know all about your valhalla of decadence and I shouldn’t have let him go. He’s not ready for your world of compromised values and diminished brain cells that you throw away like confetti. Am I speaking to you clearly?
Pourtant son discours résonne auprès de Russell qui est parfois lassé de ce monde d’apparences. Il se retrouve trop déconnecté du monde et cette sensation lui déplait. Profondément, il n’est pas prêt pour se mettre en orbite autour du soleil.
From here on out, I am only interested in what is real. Real people, real feelings, that’s it, that’s all I’m interested in.
La célébrité n’est peut-être qu’intéressante que lorsqu’elle ne dure que 15min, pas plus.
Well, it was fun.
Because they make you feel cool. And hey. I met you. You are not cool.
Après quoi il est bon de descendre de son piédestal. Reprendre sa vie normale. Lâcher le jet privé pour reprendre son bus. Partir au Maroc. Revenir à sa passion (cf Casino), en renonçant à tout le reste. Faire la paix avec ses envies de célébrité (cf Hollywoodland), pour mieux reprendre sa liberté. En résumé, savourer les joies de l’anonymat. En toute discrétion.
En gros, gros fan de musique, je n’aime pas forcément les films sur le sujet. Ce genre d’exercice périlleux tombe souvent à plat. The Doors par exemple à l’époque avait été une sacrée déception (j’aurais donné chère par contre pour voir Billy Idol dans les baskets de Jim Morrisson… quelle idée de s’être planté en moto juste avant le tournage). Après il y a toujours quelques exceptions style Walk the Line ou plus récemment The Dirt (une très bonne surprise, relativement trash quand même et assez fidèle car adapté du bouquin écrit par Mötley Crüe himself -).
Ici ça fleure bon le vécu, tout simplement parce que Cameron Crow dans ses jeunes années a été journaliste à Rolling Stone magazine. Il sait parfaitement de quoi il parle et l’histoire est en parti autobiographique (on lui doit aussi un autre films sur phénomène grunge : Singles). Le groupe est fictif il me semble (créé pour l’occasion – Billy Crudup l’acteur principal chante et joue par contre réellement lui-même de la guitare -) même s’il y a bien un groupe qui porte le même nom (Stillwater). Sinon côté « people », Kate Hudson (la fille de Goldie Hawn) a été marié au chanteur des mythiques Black Crowes (brisant par la même le petit cœur d’Owen Wilson qui en a été quitte pour une dépression… et une tentative de suicide) et est actuellement la compagne du chanteur/guitariste de Muse (pas vraiment un rôle de composition donc – pour boucler la boucle, son père était d’ailleurs lui-même musicien -).
Merci pour ce commentaire Rusty.
Qu’as-tu pensé de Control?
Comme je le disais, je suis assez réticent vis-à-vis du genre en général et du coup je ne l’ai toujours pas vu celui-ci. J’aime plutôt bien Joy Division (sans être un grand fan non plus – comme certains anciens amis qui m’avaient dit plus grand bien du film à l’époque -) et Ian Curtis est un personnage mystérieux, étrange (son passage sur terre a été bref).
Nan le seul autre film du genre qui me revient sinon (hors comédie du style Detroit Rock City, School of Rock ou Tenacious D) c’est Hedwig and the Angry Inch de John Cameron Mitchell (ah oui si 8 Mile de Curtis Hanson est pas mal aussi… Amadeus !, mais bon ça remonte… Frankie Wild sinon ! bon aller j’arrête là :p).
Queen a été un de mes groupe préféré quand j’étais gamin et Rami Malek (Mr Robot !!!) est très bon, mais pareil, j’arrive pas à me lancer dans Bohemian Rhapsody (y’a de très, très fortes chance que je sois déçu – NWA au hasard c’était pas un naufrage total, mais ça manquait quand même sacrément de saveur -).
Aucune mention à Jean-Philippe, j’en déduis que tu n’est pas un fan de Johnny. 😀
Ni (et peut-être surtout) de Luchini (j’y peux rien ça doit être un type sympa – et hyper cultivé -, mais il m’horripile).
Et puis les films français malheureusement depuis les années 80 (voir encore un peu dans les années 90) c’est généralement plus trop ma tasse de thé (hors quelques petites exceptions de temps en temps comme Une nuit – c’est le premier qui me vient comme ça – avec l’excellentissime Roschdy Zem). Le temps des Melville, Chabrol, etc. est bien loin… (si j’aime bien le fils Audiard – qui a mis la barre toute à gauche par rapport à son anar’ de droite de père… mais on lui en veut pas malgré tout, un peu le seul à faire encore des choses intéressantes -)
J’écoute beaucoup de choses différentes (de Kandace Springs à La rumeur) mais surtout du metal en fait (je serais plus Cannibal Corpse comme dans Ace Ventura par exemple – Jim Carrey, en fin mélomane comme moi, les avait personnellement débauché à l’époque… la grande époque du death metal ^^ -) – oreilles sensibles s’abstenir… et ce sera en espagnol y’a un meilleur son 😀 – :