RUSHMORE
Wes Anderson, 1998
LE COMMENTAIRE
Nous avons tous été mis dans la position pénible du candidat. Le sentiment de solitude sur sa chaise. Une nervosité difficilement contenue. La sueur qui perle sur le front de manière apparente. Le nez qui démange. La gorge sèche. Le ventre qui crie son envie de péter. Ce moment est déjà suffisamment pénible lorsqu’il s’agit de se confronter à des examinateurs sans foi ni loi. Il l’est encore plus quand la personne qu’on a en face de soi fait vibrer notre coeur.
LE PITCH
Un collégien tombe amoureux d’une institutrice.
LE RÉSUMÉ
Max Fischer (Jason Schwartzman) est un médiocre élève de la prestigieuse Rushmore Academy de Houston. Bien qu’il excelle dans les activités extra-scolaires, ses résultats ne sont pas à la hauteur de son imagination débordante.
À tel point que Nelson Guggenheim (Brian Cox) menace de le renvoyer.
Fischer garde son calme.
You seem to have it pretty figured out.
The secret? I don’t know, I guess you’ve just gotta find something you love to do and then do it for the rest of your life. For me, it’s going to Rushmore.
L’élève est impressionné par l’intervention d’Herman Blume (Bill Murray), un parent d’élève entrepreneur, qui va devenir son mentor. Surtout, Fischer tombe sous le charme de Rosemary Cross (Olivia Williams), institutrice à l’Academy. Veuve depuis un an.
Finalement viré de Rushmore, Fischer rejoint la moins prestigieuse Grover Cleveland High School. Il continue de mettre en scène des pièces de théâtre.
L’adolescent n’en continue pas moins ses efforts pour séduire Rosemary, sans y parvenir.
We’re friends.
Yes, and that’s all what we’re going to be!
Rosemary noue discrètement une relation avec Herman Blume.
Dirk Calloway (Mason Gamble) découvre le pot aux roses par hasard. Il dévoile l’affaire à son meilleur ami pour se venger d’une rumeur que Max avait lancé à propos de sa mère (Connie Nielsen).
Max rentre en guerre contre Blume. Il informe sa femme (Ronnie McCawley), qui demande aussitôt le divorce. En représailles, Blume abime le vélo de Max (cf Pee Wee’s Big Adventure). Pour se venger, Max sabote la voiture de Blume.
Plutôt que d’encourager l’escalade de violence, Max propose à son mentor de faire la paix. Il sèche l’école pour aider son père (Seymour Cassel) dans son salon de coiffure (cf The Barber).
Quelques temps plus tard, il apprend que Blume s’est séparé de Rosemary. Fischer tente de les réconcilier lors de l’une de ses pièces, sans succès. Finalement, tout le monde se retrouve lors d’une fête . Max sort désormais avec Margaret Yang (Sara Tanaka), une camarade de classe.
Intimidé par la présence de Rosemary, Max semble avoir fait son deuil.
At least nobody get hurt.
Except you.
No, I didn’t get hurt that bad.
Tous les deux dansent ensemble.
L’EXPLICATION
Rushmore, c’est le processus de maturation masculine.
On dit des garçons qu’ils ne sont pas très matures – surtout quand on les compare aux filles. Cela se vérifie souvent : ils ont des boutons, un style approximatif et disent de grosses bêtises (cf Les Beaux Gosses).
Max a effectivement une personnalité excentrique. Il se distingue des autres au sens où il ne semble pas être complètement dans le moule malgré son amour pour l’institution. Son ambition est affirmée. Néanmoins, il n’est encore qu’un petit garçon.
Non pas parce qu’il vise trop haut, mais parce qu’il ne vise pas juste. Il s’emballe pour Rosemary, comme s’il était frappé par un coup de foudre – ce qui le rend d’autant plus mignon d’ailleurs. Max n’a tout simplement pas le recul nécessaire pour comprendre que cette idylle est impossible.
She’s my Rushmore.
Il est un petit garçon qui n’assume rien. Son père est un modeste coiffeur. Pourtant Max parle de lui comme s’il était un brillant chirurgien. Il fait le fier. Une grenouille qui se voudrait aussi grosse qu’un boeuf.
Il est un petit garçon incapable de maitriser sa colère. Que cherche-t-il dans la vengeance? Qu’est-ce que sa révélation à Madame Blume peut lui apporter? Pourquoi vouloir que Herman meurt dans un accident de voiture?
Il est un petit garçon qui rêve de résoudre une équation impossible, mais qui se fait bêtement virer de l’école parce qu’il n’a pas le niveau.
Max est persuadé d’être dans le vrai alors qu’il est complètement à côté de la plaque.
Son processus de maturation se déclenche grâce au discours éclairant d’Herman Blume :
You guys have it real easy, (…) you were born rich and you’re going to stay rich. But here’s my advice to the rest of you: Take dead aim on the rich boys. Get them in the crosshairs and take them down. Just remember, they can buy anything but they can’t buy backbone. Don’t let them forget it. Thank you.
Les mots du chefs d’entreprise font mouche. Pour la première fois, Max entend quelqu’un porter un discours de vérité – sans langue de bois. C’est une révélation. Il commence à comprendre ce qui compte. Faire la différence entre les détails qui comptent, et ceux qui sont plus accessoires.
I don’t give a shit about the barracudas!
Max prend de la bouteille en prenant conscience de ses nombreuses erreurs. Toutes ses expériences regrettables, ces petits échecs aux allures de fin du monde, sont bénéfiques car elles lui offres des occasions de grandir. Il va apprendre à dépasser ses petits problèmes.
Il commence à faire preuve de maturité de par sa capacité à évoluer. En dépit de ces déceptions à répétition, il se remet en selle avec le même enthousiasme. Trop de personnes deviennent blasées. Max garde sa fraîcheur. Il ne s’agit pas de faire tapis à chaque coup, mais de mettre la bonne mise lorsque le jeu en vaut la chandelle.
Is that all you’re willing to spend?
Max devient un grand garçon quand il retourne passer du temps avec son vieux père (cf I’m still here).
Il devient un grand garçon quand il prend officiellement la main de Margaret.
Le grand garçon peut danser avec celle qui lui a brisé le coeur en la regardant dans les yeux (cf La Boum).