L.A. CONFIDENTIAL
Curtis Hanson, 1997
LE COMMENTAIRE
Pince mi et pince moi sont sur un bateau. Pince mi tombe à l’eau. Qui reste-t-il ? Pas si simple en réalité. Parce que Pince mi remonte sur le bateau pour en découdre. Il n’en a pas fini. Cela sent bon la testostérone sur le bateau. Le reste relève du combat de coq. Ce qui se passe sur le bateau reste sur le bateau. Pendant ce temps, une bonne blague ne trouve pas sa conclusion.
LE PITCH
La police de Los Angeles mène l’enquête sur une affaire gênante.
LE RÉSUMÉ
Début des années 50. Le sergent Edmund Exley (Guy Pearce) a bien l’intention de suivre la voie de son paternel dans la police, avant que celui-ci ne se fasse abattre par Rollo Tomasi, archetype du criminel qui s’en sort sans être inquiété.
All I ever wanted was to measure up to my father.
Pour y parvenir, il est prêt à dénoncer ses collègues (cf Les Ripoux) impliqués dans le scandale du Bloody Christmas. Le capitaine Dudley Smith (James Cromwell) désapprouve car il pense que le jeune loup n’a pas les tripes.
Would you be willing to plant corroborative evidence on a suspect you knew to be guilty, in order to ensure an indictment?
No!
Would you be willing to beat a confession out of a suspect you knew to be guilty?
No.
Would you be willing to shoot a hardened criminal in the back, in order to offset the chance that some lawyer? (cf Insomnia)
No.
Then, for the love of God, don’t be a detective.
Cette promotion attise la colère de Bud White (Russell Crowe), un policier un peu brutal dont le collègue a été licencié dans l’affaire Bloody Christmas.
Next to you, I’m clean. And smart.
Edmund Exley est néanmoins le parfait candidat pour redorer l’image écornée de la police de Los Angeles. Ambitieux. Bien propre sur lui. Au delà de tout soupçon (cf Serpico).
Sa première enquête est trouble. Multiple homicide cachant une affaire de corruption gigantesque impliquant la professionnelle Lynn Bracken (Kim Basinger), Pierce Patchett (David Strathairn), le journaliste Sid Hudgens (Danny DeVito), Jack Vincennes (Kevin Spacey), le mafieux Johnny Stompanato (Paolo Seganti)… jusqu’au district attorney Ellis Loew (Ron Rifkin) en personne.
Finalement, Exley découvre que le capitaine est derrière l’affaire. Il est Rollo Tomasi.
Dudley Smith s’apprête à se sortir de la tuerie indemne, jouant avec l’ambition de Exley et lui promettant une belle promotion. Mais le sergent l’abat.
Il raconte toute l’histoire aux autorités, visiblement embarrassées par l’ampleur du scandale et soucieuses de trouver une solution.
If we can get the kid to play ball, who’s to say what really happened?
Dans la presse, Smith est mort en héros. Tandis que Exley reçoit une médaille d’honneur. Il a fait la paix avec Bud White (cf Des hommes d’honneur).
L’EXPLICATION
L.A. Confidential, c’est de la grosse politique.
On ne coupe pas d’oranges à New York. Ce n’est pas la Floride (cf L’associé du diable). Frank Sinatra a chanté que si l’on y réussissait, on pouvait réussir partout. C’est la promesse.
Los Angeles n’est pas en reste. Une ville tentaculaire, où l’on ne peut pas se déplacer à pied et où par conséquent le traffic est considérablement engorgé (cf La La Land). La seule manière de s’en sortir est de décoller.
This is the City of the Angels, and you haven’t got any wings.
Los Angeles, ville de toutes les illusions (cf Mulholland Drive) et désillusions (cf Hollywoodland). Quand on arrive de sa province comme Matt Reynolds (Simon Baker Denny), on apprend la vie. Plongé dans le grand bain, avec les requins.
You know, when I came out to L.A., this isn’t exactly where I saw myself ending up.
Yeah, well. Get in line.
Ce n’est pas une ville pour les introverti·es, les timides ou les discret·es. Même l’ambition seule ne suffit pas pour réussir. Edmund Exley a envie d’arriver au sommet, très vite. Mais cet impatient a-t-il ce qu’il faut pour y parvenir ?
Dudley Smith en doute.
Edmund, you’re a political animal. You have the eye for human weakness, but not the stomach.
Et Dudley Smith est quand même le singe à qui on n’apprend pas à faire la grimace. Des jeunes loups, il en a vu passer plein, comme des étoiles filantes.
Don’t start tryin’ to do the right thing, boy-o.
Lui s’inscrit dans la durée parce qu’il sait parfaitement traverser les tempêtes. Manoeuvrer sur cet échiquier, où chacun·e se tient en respect. Une ville matricielle, dans laquelle les officiers brutaux comme Bud White ont pourtant un bon fond alors que les représentants de l’ordre peuvent être de vrais fumiers. Où toutes les faiblesses morales sont exploitées sans scrupule, sous peine d’être révélées au grand jour.
Off the record, on the QT, and very hush-hush.
Ce qu’Edmund Exley parvient à faire est de la grosse politique car il est pris malgré lui dans le tourbillon de sa propre ambition, qui le conduit dans une affaire aux multiples ramifications complexes. Exley doit décider vite, et juste (cf Un Héros).
Or il fait quelques erreurs. Se voyant notamment contraint de rapidement s’asseoir sur ses beaux principes éthiques pour continuer l’aventure. Il comprend assez rapidement que quelque chose n’est pas clair, et va réussir à activer les personnes autour de lui pour faire progresser son enquête.
Parvenant à convaincre Jack Vincennes de conduire Dudley Smith à la faute. Encaissant les coups de Bud White pour gagner son respect (cf Rocky), malgré son écart avec Lynn Bracken. Surtout, il réussit à résister à la proposition malhonnête de Dudley Smith pour préserver ce qui lui reste d’honneur, tout en se remettant à la table des négociations avec Ellis Loew, en position de force (cf Macron à l’Elysée).
Il sort comme le grand vainqueur de cet affrontement qui voit une redistribution des cartes.
Les événements se sont déroulés très vite. Exley a marché sur un fil en permanence. Vaciller sans tomber. Il est donc le héros.
Tout cela reste évidemment confidentiel.
Après tout, c’est Los Angeles. Les gens paient pour rêver, pas pour savoir ce qui se passe en coulisses. Même si parmi les comédien·nes, personne n’est dupe.