BABYLON

BABYLON

Damien Chazelle, 2022

LE COMMENTAIRE

Certain·es se pressent dans les soirées pour faire comme si la vie était une fête, car elle ne l’est pas. On gesticule pendant que l’on peut. Les sourires sont aussi éphémères que les baisers. C’est pourquoi il faut en profiter.

LE PITCH

Destins croisés de celles et ceux qui ont fait Hollywood.

LE RÉSUMÉ

Manuel « Manny » Torres (Diego Calva), homme à tout faire des studios Kinoscope, est chargé de faire porter un éléphant pour la soirée orgiaque du producteur Don Wallach (Jeff Garlin), au milieu du désert californien. On y croise la danseuse de cabaret Lady Fay Zhu (Li Jun Li), le trompettiste Sidney Palmer (Jovan Adepo) ou encore la star du cinéma muet Jack Conrad (Brad Pitt) (cf The Artist).

Manny y fait la rencontre de Nellie LaRoy (Margot Robbie), une jeune actrice ambitieuse qui profite d’un concours de circonstances pour se retrouver sur un tournage le lendemain. Les films se font de manière un peu artisanale : la caméra arrive à la dernière minute, juste ce qu’il faut de lumière, Jack Conrad trompe sa gueule de bois l’espace de quelques secondes pour la scène du baiser.

Cut!

Nellie se fait immédiatement remarquer. Son nom est déjà en haut de l’affiche.

Let ’em know that I got here on my terms, not theirs. And when I’m done I’m gonna dance my ass off into the night. (…) Everyone will fucking know!

De son côté Manny commence à travailler pour Jack Conrad. À New York, il assiste à la projection du film parlant Le Chanteur de Jazz. Il prévient aussitôt son patron.

Everything is about to change!

Manny profite de l’évolution de l’industrie pour proposer de nouvelles idées et commence à faire son trou au sein des studios. Pendant que Sidney Palmer fait une belle apparition sur le grand écran, Lady Fay Zhu est déjà devenue obsolète. Jack et Nellie peinent à s’adapter aux nouvelles méthodes de tournage. La nécessité de se renouveler rapproche les équipes de la crise de nerfs.

The next one who’s fucking the scene, I will shit on you!!

Avec l’aide de Manny, Nellie tente de corriger son image d’actrice légère mais échoue lamentablement son examen de passage en vomissant devant la haute société.

You’re not better than me!!

Perdue dans la poudre, elle dépense l’argent qu’elle n’a plus au casino (cf La baie des anges). Manny réussit à lui sauver la mise et échappe à son créancier, l’obscur James Mackay (Tobey Maguire). Il est temps de quitter Los Angeles pour le Mexique. Malheureusement Manny perd son grand amour en cours de route.

It’s the end of the road for me. This is it for me.

Jack est désormais considéré comme un acteur déchu. Fatigué d’enchaîner les navets, il tire sa révérence en se suicidant.

I’m tired Fay. It’s okay I’ve been the luckiest bastard in the world.

Une chronique dans le journal annonce la mort de Nellie à l’âge de 34 ans, ainsi que celle de la critique Elinor St John (Jean Smart) – dans l’indifférence générale.

Dégoûté de devoir se passer une couche de cirage sur le visage pour mieux passer à l’écran, Sidney Palmer retourne jouer dans des clubs moins prestigieux.

Des années plus tard, Manny revient à Los Angeles accompagné de sa femme et sa fille. Il se rend à une représentation du film Chantons sous la pluie, devant lequel il est pris par l’émotion. Des flash forwards de films récents et flash backs de ses souvenirs s’entremêlent. Manny se rappelle de la raison pour laquelle il voulait travailler dans le cinéma (cf Planétarium).

I just want to be part of something bigger.

L’EXPLICATION

Babylon, c’est la vulnérabilité de l’empire californien.

Dans le monde du spectacle, on oppose souvent Hollywood à Broadway en reprochant à l’industrie du cinéma d’être trop commerciale, et donc moins noble, que celle du théâtre (cf Birdman).

L’usine à rêves.

This is the most magical place in the world.

Dans ce faux paradis qui fait tourner les têtes (cf Mulholland Drive) et force l’admiration, on ne trouve pas que des ambitieuses comme Nellie. On trouve aussi des passionnés comme Jack.

What I do means something to millions of people! For real people, on the ground it means something!

Manny partage la même passion. Il n’est pas là par hasard non plus, ni pour enfiler des perles.

I want to be part of something important, that means something.

Certes, Hollywood est aussi bordélique que ses soirées décadentes (cf La Grande Bellezza). Comment attendre de l’industrie du fantasme qu’elle puisse opérer différemment ? Tout le monde se doit de chercher les extrêmes, pour mieux capturer la beauté d’un instant qui inspirera le public.

We got to innovate, we got to inspire!

On a l’impression que tout ne tient qu’à un fil tendu à l’extrême, et malgré tout le résultat est magnifique. La lumière est magique. Les larmes sont intenses. Le papillon se pose sur l’épaule presque comme si tout avait été calculé à l’avance. Hollywood parvient à proposer ces émotions capables de déclencher des frissons.

Malgré tout, l’ensemble est fragile. Les acteurs et actrices ont l’impression de construire un empire qui s’écroule dès que la lumière se rallume. La carrière de Nellie ressemble à la trajectoire d’une étoile filante. Elle a été défaite aussi vite qu’elle a été mise sur le devant de la scène. Les attentes ont changé. Elle ne répond plus aux exigences. On la jette à la poubelle.

I’m dying out there.

Une ou deux productions à coté de la plaque et Jack Conrad n’a plus de marge de manoeuvre, malgré sa villa somptueuse et ses quatre-vingt deux films. Tout peut s’arrêter. Le film parlant vient bousculer les habitudes. Ceux qui ne seront pas capables de se réinventer resteront à quai. Personne n’est à l’abri.

Why wouldn’t I get another chance?

Elinor St John, autrice d’un article à charge dans un magazine, explique à l’acteur comment fonctionne le monde sur la côte ouest : Pourquoi Jack Conrad est-il devenu ringard ? Parce que la vie est ainsi.

Why did they laughed?

There is no why. (…) There’s nothing you can do. Your time is running out. It’s over. (…) You thought the house needed you. (…) It’s bigger than you. (…) You’ve been given a gift, be grateful.

Ces actrices et acteurs qui veulent par dessus tout faire l’actualité ne sont pas éternel·les (cf At Eternity’s Gate). Le cinéma leur en donne la chance, en tant que fantômes. Comme l’explique Elinor St John, un·e adolescent·e pourra peut-être revoir un film de Jack Conrad et avoir l’impression qu’il est son meilleur ami (cf Last Action Hero). Et puis d’autres leur succéderont par la suite. Tant mieux.

It’s on you now kid, the future is yours!

L’empire californien peut s’effondrer à tout moment. Ce serait quand même dommage.

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

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