CIRCLE
Aaron Hann, Mario Miscone, 2015
LE COMMENTAIRE
Pierre Desproges disait quand on est plus que quatre on est une bande de cons. Nous pourrions revisiter ce précepte dans une société où les rassemblements sont redéfinis selon les règles de la distanciation sociale. Les cultes vont devoir trouver une bonne raison de se réunir. Ils devront également s’assurer que la raison pour laquelle ils se réunissent ne va pas les conduire à leur perte, en les faisant tomber un à un comme des dominos.
LE PITCH
Une cinquantaine d’individus se retrouvent prisonniers du jeu de la survie.
LE RÉSUMÉ
Cinquante personnes se réveillent dans une pièce sombre, en cercles concentriques autour d’une mystérieuse boule noire. Personne ne sait ce qu’il fait là. Toutes les deux minutes, un élément du groupe meurt. Ceux qui essaient de quitter leur position sont aussitôt éliminés. Le circle of trust, si on n’est pas dedans : on est forcément dehors (cf Mon beau-père et moi).
Après quelques minutes, il devient évident que les participants peuvent voter pour la prochaine personne devant mourir. Ils refusent d’abord collectivement de se livrer à ce jeu macabre (cf Choose or Die). Une victime est alors désignée au hasard. Puisque rien ne peut stopper ce processus d’élimination, chacun se met à voter dans l’optique de sauver sa propre vie.
Les participants s’interrogent : Comment sont-ils arrivés là? Qui est derrière tout ça? Qu’est-ce que cela veut dire?
There has to be a reason behind all of this!
Pas le temps de philosopher. Il faut désigner une nouvelle victime. Les seniors d’abord. Des disputes éclatent. La logique change. Les uns se mettent à la faute bêtement tandis que d’autres se sacrifient héroïquement.
Il devient évident que deux finalistes devront s’affronter et que l’un de ces deux finalistes devra nécessairement se sacrifier. Face à cette réalité, deux camps émergent.
We’re on the same team here.
Certains se rangent derrière Eric (Michael Nardelli) qui prône les femmes et les enfants d’abord. Il affirme que les rescapés devraient être la femme enceinte (Allegra Masters) et l’adolescente (Ashley Key).
Les autres pensent au contraire qu’elles devraient toutes les deux être les prochaines à mourir car elles menacent leur propre survie.
Women and children first, I’m sorry but this shit doesn’t matter anymore.
Finalement, Eric parvient à manoeuvrer pour se retrouver seul avec la femme enceinte et l’adolescente. Il suggère à l’adolescente un suicide mutuel de façon à laisser la vie à la femme enceinte. L’adolescente accepte. Au moment de sortir du cercle, Eric se retracte à la dernière seconde puis vote contre la femme enceinte, éliminant ses deux adversaires.
Il est donc le survivant de cette expérience étrange qui était pilotée par des aliens. Les vaisseaux repartent et Eric se joint à un petit groupe d’individus incrédules.
Il a été le plus malin.
It has to end this way.
L’EXPLICATION
The Circle, c’est le vote contre.
Dans ce panel représentatif de la population, personne ne comprend ce qui se passe en dehors du fait que des gens meurent et que le vote, à défaut de sauver, peut retarder l’échéance. Il s’agit donc là d’un mécanisme démocratique reposant sur le principe du référendum, permettant à chacun non pas de préserver la vie mais plutôt de condamner autrui à mort. Ces grands électeurs ne votent pas pour un projet. Il votent contre, afin de survivre. Un vote obligatoire, par dépit, égoïste. Avec l’urgence de devoir choisir toutes les deux minutes, dans cet environnement où chacun est une cible potentielle. Le vote blanc n’est toujours pas reconnu.
Dans cette situation extrême où la mort frappe au hasard si personne n’est désigné par par l’assemblée, l’être humain révèle sa pire nature.
We’ll see what you do when you’re next on the line.
Les optimistes cherchent des solutions (cf Le sens de la fête).
We have to try something.
Certains défaitistes baissent les bras immédiatement.
There’s nothing we can do. We’re all screwed.
Les plus pacifistes rejettent l’essence même de ce jeu de massacre.
There’s no reason for us to kill each other off like this.
Pour une minorité de romantiques, un monde pareil ne vaut pas même la peine qu’on y gaspille son temps. Même si nous avons l’instinct de survie, une poignée de participants fait preuve de panache en se retirant de leur plein gré.
They’re just one last thing we can do : let’s go out of here with dignity.
On se rend vite compte que ce comportement n’a aucun intérêt car personne ne rend hommages aux victimes. Plus rien ne compte. Face à une situation dont on ignore tout du pourquoi, les fondamentaux de notre belle société s’effondrent (cf La Route). C’est le chaos.
That’s fucked up.
It’s a fucked up situation.
Prisonniers de ce jeu démocratique, les votants sont presque tous perdants à la fin. Donc naturellement la majorité décide de jouer chacun pour sa peau (cf Dernier train pour Busan). La vraie nature d’un individu n’est pas toujours glorieuse. Égoïsme, ethnocentrisme, racisme, mesquinerie, homophobie, misogynie, mensonge… Tous les défauts y passent.
Seul le soldat est le seul à faire du Socrate.
We don’t know anything.
La sagesse des Grecs ne lui permet pas plus de revoir sa femme et ses enfants.
Le grand vainqueur est Eric, maître dans l’art de la manipulation.
Machiavélique, il est définitivement le plus politique de tous car il a réussi à se faire discret, voire inoffensif, puis s’est montré opportuniste quand la situation l’exigeait (cf Macron à l’Elysée). Un sens de la compétition exacerbé. Une capacité à ne pas dévoiler son jeu trop tôt. Eric gagne la confiance du public en faisant croire qu’il agit au nom de l’éthique. Il endort ses adversaires et parvient à les monter les uns contre les autres, à son avantage. C’est ainsi que le gagnant survit sur un monceau de cadavres qu’il aura pris soin de baratiner comme il se doit.
You’re going to have to decide for yourselves. I can’t decide for you.
Le politique est le seul à pouvoir sortir vivant de ce jeu, après avoir tué sans scrupule une enfant et une femme enceinte. Il faut croire que la fin justifie les moyens (cf les marches du pouvoir). Toujours est-il qu’il va pouvoir exercer son leadership sur un champ de ruines.
Dans un système où l’on en est réduit à voter contre, il n’y a effectivement que des perdants. Les aliens peuvent repartir chez eux le sentiment du devoir accompli, en ayant réussi à détourner les règles de la démocratie. La planète n’en a plus pour très longtemps si les humains continuent de s’entre-tuer de la sorte.
Et du coup, elle est où l’explication ? Non parce que là je viens de lire ce que je viens de voir, mais pas une explication digne de ce nom… Un nom de domaine visiblement mal choisi…
Merci pour cette rencontre JoeBlack. Et vous vous attendiez à quoi?
Ducoup si j’ai bien compris le but du film c’était de s’entre tuer et donc entre parenthèse de tuer le système et on le voit bien car dans le film ils font réference au systéme au racisme etc et ont voit dans le film que le gagnant en joue pour sa propre survie et Ducoup à la fin ils gagne avec d’autre personne comme on peut voit qui sont surement d’autre joueurs gagnants et Ducoup les aliens sont content de leur missions a la fin et rentre chez eux c’est sa
Bonjour Hamelle, oui on pourrait l’interpreter ainsi : Des aliens bienveillants qui nous feraient nous entretuer pour mieux assurer la survie de l’espèce, avec quelques gagnant-es plus malin-es que les autres.
On a pas vu la même fin, il y a encore un dernier vote… le bébé… comment on l explique si c est un participant, comment des femmes enceintes peuvent gagner ????
Soyons clairs : À l’état de foetus, le bébé n’existe pas encore légalement. Par ailleurs, le bébé n’aurait pas encore l’âge de voter étant donné qu’il n’a pas d’âge. Le bébé ne peut donc pas voter. Les aliens ont des règles. Tout est très organisé…
Pourtant il y a bien un dernier décompte entre l homme et le fœtus, ou lui-même un plomb en critiquant la sélection comme quoi il est pas assez bien et tout et tout (il a cru qu il allait être exécuté). Alors es ce que le bébé participe dans le ventre ou es ce que c est parce que la femme enceinte tombe sur un autre cercle?
Effectivement vous avez raison : il y a bien un décompte final entre le dernier candidat et le bébé. Mon interprétation est la suivante : ce vote ultime intervient dans la foulée du monologue du dernier candidat qui s’adresse aux aliens afin de leur dire qu’il a compris que cette expérience vise à démontrer que l’espèce humaine est profondément égoïste. Il assume pleinement cet égoïsme et le revendique. Le fait qu’il vote contre le bébé, qui a priori ne peut pas voter et devrait donc être épargné par quelqu’un d’autre pour survivre, entérine cette démonstration. Le dernier candidat est effectivement capable de tout pour sauver sa peau, y compris sacrifier un bébé. Il ne laissera pas la main à la génération future, à aucun prix.
Sur le plan de l’éthique, l’espèce humaine, représentée par ce dernier candidat vainqueur du jeu politique proposé par les aliens, est évidemment méprisable. Cependant sur le plan de la raison, le dernier candidat agit de manière pragmatique pour la survie de l’espèce qui doit nécessairement passer par lui et personne d’autre. Tout d’abord parce qu’il est le plus malin politiquement. Ensuite parce que son sacrifice aurait conduit à un drame. En effet, s’il s’était sacrifié… la mère se serait techniquement retrouvée en face à face avec son foetus. Elle aurait du avorter de force. Sinon elle se serait suicidée et aurait nécessairement condamné son bébé, se mettant elle-même en incapacité d’accoucher. En quelques sortes, la femme enceinte aurait du être la première candidate à sortir du jeu, selon les règles infâmes proposées par les Aliens.
Mon interpretation sur la toute fin, quand eric rejoint un groupe d’individu regardant fixement le vaisseau .. ceux sont des survivants d’autres sessions … une femme enceinte et quelques enfants … Certains se sont bel et bien sacrifié.
il y a toujours l’espoir malgré tout.
Très exactement comme dans Koh Lanta, ce ne sont pas les plus forts, ni les plus vaillants ou héroïques qui triomphent, mais les plus rusés et les plus fourbes. Beau résumé illustré sur la nature humaine profonde.
Merci pour la référence Brogniaresque. Effectivement, ce n’est pas la loi du plus fort qui prévaut mais plutôt du plus machiavélien