LOST IN TRANSLATION

LOST IN TRANSLATION

Sofia Coppola, 2003

LE COMMENTAIRE

Nous sommes tellement tournés vers demain que nous avons embarqué dans un train à grande vitesse vers on ne sait où. La vie file sous nos yeux et nous contemplons le spectacle de manière immobile, en accéléré. Un casque sur la tête, histoire d’être encore mieux déconnecté de la réalité. Pas étonnant que nous ayons souvent la sensation que tout nous échappe, ou que nous ne parvenons plus à contrôler quoi que ce soit. Ne plus savoir où nous en sommes.

LE PITCH

Un homme et une femme perdus dans une autre culture se rencontrent.

LE RÉSUMÉ

Bob Harris (Bill Murray) se rend à Tokyo pour assurer la promotion d’une marque de whisky dont il est l’ambassadeur. Une excuse bien pratique pour mettre un peu de beurre dans les épinards et échapper à son couple qui bat de l’aile. Il ne parle pas Japonais bien qu’il soit une véritable idole locale. Bob a également du mal à se remettre du décalage horaire ou peut-être traine-t-il simplement avec lui ses nuits sans sommeil (cf Insomnia).

Charlotte (Scarlett Johansson) est une jeune diplômée qui a suivi son mari John (Giovanni Ribisi), en shooting dans la capitale nippone. La jeune femme, just married, a déjà des doutes sur l’avenir. Le style de vie de son mari ne lui correspond pas, ainsi que son environnement ou encore ses fréquentations.

Bob et Charlotte se remarquent dans l’hotel puis se croisent à nouveau au bar un soir d’insomnie. Ils partagent tous les deux la même solitude.

I just feel so alone, even when I’m surrounded by other people.

Le courant passe. Tout les deux s’enfoncent dans la nuit Tokyoïte.

La différence d’âge les contraint à une relation platonique qui ne les empêche pas d’évoquer leurs doutes au sujet de leur relation respective, ou de la vie en général (cf In the Mood for Love).

Well you figure, you sleep one-third of your life, that knocks out eight years of marriage right there. So you’re, y’know, down to 16 in change. You know you’re just a teenager, at marriage, you can drive it but there’s still the occasional accident.

You’re probably just having a mid-life crisis.

L’avant veille de son départ, Bob s’autorise une relation extra-conjugale avec la chanteuse de jazz de l’hôtel, ce qui lui vaut une belle dispute avec Charlotte à l’heure du déjeuner. Tous les deux se réconcilient dans la soirée au bar de l’hôtel, là où tout a commencé et tout se termine.

Bob est sur le point de partir. Les adieux avec Charlotte sont difficiles. Il la regarde repartir vers l’ascenseur avec tristesse.

En chemin vers l’aéroport, il l’aperçoit une dernière fois dans la foule. Bob descend aussitôt pour la rattraper, lui glisser quelque chose à l’oreille et l’embrasser élégamment avant de repartir.

Tous les deux sont soulagés.

Alright.

L’EXPLICATION

Lost in Translation, c’est sortir de sa zone de confort.

En anglais, une idée est lost in translation dès lors qu’on en perd le sens. Rater une nuance peut conduire au plus grandes incompréhensions. L’edifice est fragile (cf Babel). Par manque de subtilité, on peut ne plus comprendre les autres. Ni ne plus se comprendre soi-même. Ces moments donnent aussi l’occasion de se révéler.

C’est un peu l’impression de Bob et de Charlotte qui se retrouvent tous les deux en terre inconnue. Dans cette galaxie Japonaise qui semble si loin de tout (cf Stupeur et tremblements), ces deux individus redevenus étrangers remettent tout en question.

Leur regard sur le monde est à la fois nouveau et totalement déstabilisant. Ce contexte un peu particulier les amène à tout reconsidérer, comme s’ils ne savaient presque plus rien. Ils se confrontent à des questions existentielles. Leur rencontre permet de partager des points d’interrogation. Si Bob a plus d’expérience que Charlotte, il n’est pas plus avancé qu’elle.

I just don’t know what I’m supposed to be.

You’ll figure that out. The more you know who you are, and what you want, the less you let things upset you.

Il apporte une sorte de sagesse, sans prétention. Tandis que Charlotte contribue avec un peu de légèreté, qui masque sa propre anxiété.

I don’t want to leave.

So don’t. Stay here with me. We’ll start a jazz band.

Tokyo provoque l’expérience de la vulnérabilité qui conduit à l’humilité. Face à la vie qui les terrifie, Bob et Charlotte se dévoilent, avec pudeur, sans jamais se faire la leçon.

It gets a whole lot more complicated when you have kids.

It’s scary.

The most terrifying day of your life is the day the first one is born.

Nobody ever tells you that.

Your life, as you know it is gone. Never to return. But they learn how to walk, and they learn how to talk and you want to be with them. And they turn out to be the most delightful people you will ever meet in your life.

That’s nice.

Ils sont sortis de la routine.

Cette routine ne désigne pas qu’une habitude mécanique dans laquelle la plupart d’entre nous redoute de tomber. La routine est un mode de vie qui nous apporte un peu de confort dans la mesure où on ne perd surtout pas le contrôle. Certains vivent ainsi – sans se l’avouer.

Passer son temps en voyages d’affaires peut donner l’illusion de mener une existence pleine de rebondissements. Elle peut pourtant devenir tout aussi routinière que de passer ses soirées à regarder la télévision. Les aéroports ne font que se substituer à TF1.

La vie a beaucoup plus à offrir, pour peu qu’on soit capable de se jeter à l’eau. Sortir de sa routine réclame de nager là où on n’a pas pied, en prenant le risque qu’un requin nous mordille les orteils (cf Les Dents de la Mer), ou pas (cf Les Seigneurs de la Mer).

Bob et Charlotte sont comme deux aventuriers. Le temps passé ensemble les rassure et leur permet d’apprendre à flotter dans l’espace. Ils se tiennent la main dans cet à-peu-près, sans le moindre repère. Ils peuvent aussi se lâcher la main. Car tout va bien se passer. Chacun gravite dans cet espace.

Ils peuvent s’embrasser pour concrétiser cette belle rencontre, sans arrière-pensée. Leur baiser n’a plus la même signification dans ce monde là, où tout est soudainement permis.

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

2 commentaires

Commentez ou partagez votre explication

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.