LES TUCHE

LES TUCHE

Olivier Baroux, 2011

LE COMMENTAIRE

La loterie est un impôt dissimulé puisque les profits finissent en grande partie dans les caisses de l’État. Un impôt doux au sens où il n’est pas obligatoire et qu’il peut rapporter gros à ceux qui le paient. La loterie fait miroiter aux classes laborieuses la possibilité de sortir de leur trou, en leur piquant au passage les derniers euros qu’ils n’ont plus pour acheter leur baguette de pain (cf Les Misérables).

LE PITCH

Une famille gagne 100 patates (cf Les Trois Frères) et s’offre le rêve monegasque.

LE RÉSUMÉ

Jeff (Jean-Paul Rouve) et Cathy (Isabelle Nanty) Tuche sont originaires de Bouzolles, un de ces villages dont seuls les habitants connaissent l’existence. Ils vivent avec leurs trois enfants : Wilfried (Pierre Lottin), Stéphanie (Sarah Stern) et le petit dernier Donald (Théo Fernandez) ainsi que ‘Mamie Suze’ (Claire Nadeau).

Jeff s’est fait virer de son usine, ce qui ne semble pas lui déplaire.

J’suis viré! Vive l’Europe, vive les Bulgares! J’suis au chômage!!

Cathy aurait aimé être Stéphanie de Monaco dans une autre vie. Son billet gagnant à la loterie va la faire basculer dans une autre réalité : La famille quitte Bouzolles pour la Principauté.

À leur arrivée, tout le monde les regarde de travers. Puis Jeff fait briller le chèque qui ouvre toutes les portes.

Monsieur… Tuche. Fallait me le dire en arrivant! Bienvenue à la banque Zurichoise d’investissement!

Et pourtant, tout n’est pas si facile que prévu.

C’est pas parce qu’on a un gros PEL qu’on va se faire accepter comme ça du jour au lendemain.

En effet, les Tuche ignorent les usages. Hermann (Jérôme Commandeur) ne leur donne pas accès au Country Club parce qu’il ne s’agit pas que d’une histoire de gros sous. Il faut être co-opté.

Les Tuche parviennent à inscrire Donald, dit ‘Coin-Coin’, à l’école. Désormais propriétaires d’une villa somptueuse, ils comptent bien se faire des amis grâce à un barbecue. Seule Mouna (Fadila Belkebla), leur voisine libanaise, leur rend visite accompagnée de ses enfants Salma (Karina Testa) et Jean-Wa (Sami Outalbali).

La famille s’implante tout doucement dans le tissus local. Coin-Coin fait un malheur à l’école. Cathy sympathise avec Mouna qui lui raconte ses problèmes de couple.

J’en ai marre qu’on me respecte, j’aimerais bien qu’on me baise un petit peu aussi.

Jeff connaît le succès en tant que coach des jeunes de l’AS Monaco. L’escroc Daniel Bichard (Philippe Lefebvre) l’approche comme agent de joueur et lui demande d’investir sur trois futurs talents brésiliens. Malheureusement, l’argent ne tient pas aux doigts et les Tuche dépensent beaucoup. Jeff doit hypothéquer. Heureusement que le mari de Mouna (David Kammenos) veille au grain. Il protège Jeff, notamment pour service rendu par Donald qui le conseille sur ses investissements. Le fils est aux commandes.

J’aurais pu leur dire qu’on n’avait rien perdu, qu’on était toujours riche. On aurait recommencé comme avant. Alors j’ai rien dit.

Les Tuche pensent effectivement qu’ils sont sur la paille.

Ils rentrent bredouilles à Bouzolles. Retour à la cas départ sans les francs 20,000 (cf La Perle).

Pas tout à fait.

Donald révèle à son père qu’ils ne sont pas fauchés et lui suggère d’investir leur fortune dans l’usine locale.

L’EXPLICATION

Les Tuche, c’est la France aux Français d’en bas.

La France aux Français rappelle vaguement la Chance aux Chansons de Pascal Sevran : La France a raison. Tout cela résonne comme un bon vieux slogan d’extrême droite (cf La Cravate).

Une vision du monde dans laquelle le pays serait réservé aux Français dits de souche. Avec des frontières bien hermétiques.

Ce n’est pourtant pas tout à fait cela.

D’abord parce que les fameux Français en question, sont originaires d’ailleurs que de Lozère (cf Les Bleus 2018). Les Français, c’est aussi le peuple, autrement dit la France d’en bas. La France de Groland. Celle des oubliés, des gens modestes, qui regardent TF1 sans se prendre le chou et qui vont au camping à moindre coût.

Ils s’amusent quand les serviettes tournent, mangent des frites (cf Bienvenue chez les Ch’tis), s’habillent comme des pieds, parlent avec un accent à vous arracher les oreilles. Ce sont bien eux qui profitent des allocations chômage, pas les Arabes. Malgré leurs combines, leurs fins de mois restent difficiles (cf La vie est un long fleuve tranquille).

Ces Français sont plus nombreux que les élites (cf Idiocracy).

Ils ne sont pas parfaits, loin de là, ils sont même homophobes. Jeff emploie sans complexe une réthorique digne de Denis Balbir.

Vous allez me retirer ces brushings de petits pédés!

Apparemment, ses propos offensants totalement assumés n’entament cependant pas son capital sympathie. Bizarre.

Les Français d’en bas sont en réalité aussi égoïstes que ceux d’en haut. Donc quand les Tuche touchent le pactole, leur réflexe est de foncer à Monaco, sans réfléchir, pour vivre la grande vie. Imiter les joueurs de tennis et les pilotes de Formule 1. Vivre comme des Russes.

À Bouzolles, ils n’étaient peut-être pas les plus riches mais ils étaient sûrement les plus heureux. Ils vont s’en rappeler. L’argent ne va pas faire leur bonheur, en tout cas pas sur le Rocher. Ils vivent en sur-régime. Au Casino de Monte-Carlo, ils perdent tout ou presque. Il est temps de rentrer d’où ils viennent.

Cette expérience leur permet de réaliser ce qu’ils sont.

Comment on a pu être aussi con…? 

Donald offre à sa famille une seconde chance à ne surtout pas gaspiller. Pour cela, il leur faut faire le deuil de leurs ambitions faites de palaces et de grosse cylindrées (cf Hollywoodland). Accepter leur place dans le monde. Sortir du capitalisme dépensier. Garder la tête froide. Opter pour une politique d’investissement dans l’économie locale.

Au Monopoly, les Tuche snobent la rue de la Paix et le Boulevard des Capucines. Ils préfèrent miser sur la rue Lecourbe et l’Avenue de la République. Jouer petit pour que cela rapporte beaucoup (cf C’est arrivé près de chez vous). Pas si bête. Ils peuvent ainsi accroitre leur influence.

La France aux Français d’en bas, c’est un pays souverain où tout le monde est content. Un pays dans la droite lignée des pères fondateurs, dans lequel les villages ne sont plus menacés d’extinction (cf Chocolat).

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

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