PROBLEMOS

PROBLEMOS

Éric Judor, 2017

LE COMMENTAIRE

Quand on voit ce que l’on voit, que l’on entend ce qu’on entend et que l’on sait ce que qu’on sait, on a raison de continuer la lutte. Toujours le point levé comme le disait la philosophe Amel Bent.

LE PITCH

Un groupe de zadistes survit à une pandémie meurtrière.

LE RÉSUMÉ

Victor (Eric Judor), Jeanne (Célia Rosich) et leur fille rendent visite à Jean-Paul (Michel Nabokoff), l’ancien prof de yoga de Jeanne qui vit désormais au sein d’une communauté. Un autre monde pour la petite Margaux.

Je veux mon iPad!

C’est pas possible ici…

Jeanne est curieuse des modes de vie alternatifs. De son côté, Victor est envouté par Maéva (Claire Chust), la fille de Jean-Paul. Autant de raisons pour rester quelques jours et encaisser les réflexions de Gaya (Blanche Gardin).

‘Sauvage’, c’est un mot que tu classes dans la case ‘pas bien’?

Après avoir résisté aux assauts des CRS, la belle sérénité du groupe est néanmoins rompue lorsque Maéva découvre sur Twitter que le monde entier a été ravagé par une pandémie. La panique laisse la place à l’euphorie. Jean-Paul y voit une aubaine.

Ce monde, c’est à nous de le bâtir! Avec nos règles nos principes de partage, d’amour, de respect… C’est notre opportunité de faire naître un monde fraternel. En fait, c’est ce dont on a toujours rêvé qui est en train de se passer aujourd’hui.

Très vite la réalité les rattrape. Les membres se sentent un peu perdus.

S’affranchir des règles, c’est devenir l’esclave de ses pulsions.

Puis le groupe perd d’abord Patrice (Marc Fraize). Simon (Youssef Hajdi) est suspecté d’être contaminé et se voit contraint par les autres d’observer une quarantaine. Les tensions naissent. Claude (Bun Hay Mean) est mis à l’écart lorsque le groupe découvre qu’il n’est pas chaman mais simplement SDF. La cohésion s’effrite.

La schlingue chamanique, y’a un truc un peu magique. Tu vois, herbes de Provence… Alors que la schlingue de pauvre… c’est acre!

Par ailleurs, la menace rôde puisqu’un autre groupe de survivants fait des rondes aux alentours.

Jean-Paul a des hallucinations. Patrice lui apparait soudainement et lui suggère de faire route vers le Nord pour retrouver Simon. Le chef de la communauté part. Sa tête sera retrouvée sur un pic.

La communauté finit par retrouver les bonnes vieilles habitudes. Victor et Jeanne se séparent. Chacun des membres décide de vivre dans son propre espace, protégé d’un fil électrifié.

Est-ce qu’on n’est pas en train de s’enfermer nous-mêmes?

Victor perd les élections contre Gaya puis fait un putsch pour prendre le pouvoir de manière anti-démocratique. Ayant remarqué à son tour la présence d’une tribu hostile à proximité, Victor propose à Gaya d’ouvrir le dialogue avec les inconnus. En réalité, il l’envoie au casse-pipe.

N’ayant pas d’autre choix que l’affrontement, Victor reçoit une révélation de la part du fantôme de Patrice.

Une communauté, c’est quand tout le monde fait attention à tout le monde.

Il motive les troupes pour sonner la charge contre l’ennemi.

Allez on va les massacrer ces enculés!

L’EXPLICATION

Problemos, c’est l’inévitabilité de la barbarie.

Fabienne Thibeault, Cyndi Lauper et Céline Dion ont toutes chanté que le monde était stone.

Pourquoi?

Parce que c’est vrai!

Le monde est dur comme la pierre. Violent. On pendait des innocents sur la place publique il y a deux siècles à peine. Aujourd’hui, on pend encore des innocents par les pieds au Mexique (cf Sicario). L’Holocauste, c’était il y a moins d’un siècle (cf La liste de Schindler). Ne parlons pas de l’esclavage (cf 12 years a slave), du racisme (cf LA 92), de la torture (cf Zero Dark Thirty), des féminicides (cf American Murder)… La liste est trop longue.

Dans le monde ‘civilisé’, les règlements de compte se font par réseaux sociaux interposés, avec tout autant de violence (cf Unfriended).

Certains sont dans le déni pur et simple. Ils préfèrent s’isoler du monde pour créer une société utopique (cf La Plage). Un endroit rien qu’à eux, où tout le monde s’écoute (cf I Feel Good). Pas un mot plus haut que l’autre. Même si les mots en question ne sont pas très malins. Ce groupe plein de bonnes intentions finit par resservir les mêmes généralités qu’on peut lire un peu partout.

C’est super mauvais pour la santé les vaccins, c’est les firmes pharmaceutiques qui les fabriquent pour nous affaiblir.

La communauté devient une sorte de cocon protecteur, loin de la violence extérieure. Le crédo de Jean-Paul.

Pas de haine, pas de haine, jamais de haine…

Dans cette communauté, les marginaux sont parfaitement épanouis. Personne ne juge Patrice pour ses fautes de Français, ni Gaya qui refuse de coller une étiquette à son enfant en lui donnant un prénom.

Tout le monde a un nom, il faut juste le rencontrer, il faut être attentif. Il faut s’autoriser à rêver.

Le groupe s’est mis à l’écart, convaincu d’avoir raison (cf Le Village). Pour les Zadistes, le barbare c’est Victor.

C’est pas un signe de bonne santé que d’être intégré dans une société malade.

En un sens, ils ont raison : on passe certainement beaucoup trop de temps le nez collé sur son écran, sans profiter de la nature autour de nous. La société est élitiste donc profondément inégalitaire. Elle a tendance à accroître ces inégalités plutôt que les réduire. Pourquoi la défendre? Malgré le combat féministe, la parité n’est toujours pas une réalité.

C’est une façon très Babylonienne de nous inférioriser en tant que femme en nous mettant des couches comme à des enfants et ça c’est inacceptable.

L’erreur vient du fait que ce groupe nie la part d’égoïsme de chacun. Ces individus ne réalisent pas qu’ils ont tort de penser qu’il est envisageable de tout partager, que le jugement peut disparaitre, ou que l’intérêt collectif prime sur l’intérêt individuel. Le groupe trahit pourtant ses propres principes en excluant Simon sous prétexte qu’il est peut-être contaminé – officieusement parce que personne ne supporte Simon depuis son burn out (cf Chute Libre, Adieu les Cons).

Lorsque la pandémie leur donne la chance de véritablement repenser le monde après la pandémie, ils se rendent compte de la distance qui leur reste à parcourir.

Ce qu’on va faire à partir de maintenant, c’est vivre comme on l’entend.

Facile de dénoncer, critiquer ou vouloir faire table rase du passé. Viser la perfection.

Pas si simple de continuer à construire sur ce qui a déjà été accompli. Accepter que la perfection ne soit qu’un mythe.

Si on commence à tout changer, ça risque de devenir compliqué…

Le groupe va vite se rendre compte que le naturel revient au galop. C’est l’échec d’une communauté qui se revendiquait de l’épicurisme et où chacun était l’égal de l’autre. La barbarie n’a pas disparu. Loin de là. Elle fait même rage en interne (cf Cruella). Les propos de certains sont sans équivoque.

Il faut pendre les écolos tant qu’il y a des arbres!

Exclu sèchement du groupe, Simon ne se démonte pas. Il se fait sa petite vie tranquille et va donner des idées à tous les autres.

Je vais rester dans la communauté, mais avec mon espace à moi.

Très vite, les querelles politiques reprennent le dessus. Avec elles, les grandes jalousies et les petites mesquineries.

Tout le monde est fier de toi à la communauté. Mais si tu n’en laisses profiter que certaines personnes, ça divise…

Victor détourne une arme fabriquée par Simon pour blesser Gaya. Il renverse le pouvoir par la force. Son comportement avec les mineurs est questionnable. La sauvagerie est partout.

Dans un monde revenu à l’état de nature, c’est la loi du plus fort qui prévaut. Tout ce que l’on peut faire est d’arrêter de croire qu’il n’y a pas de problème. Au contraire, affronter ces problèmes. Assumer sa part de barbarie pour éviter qu’elle nous transforme en monstres. Tenter de la mettre au service du maintien fragile de la civilisation.

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

5 commentaires

Commentez ou partagez votre explication

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.