LA FAMILLE ASADA

LA FAMILLE ASADA

Ryōta Nakano, 2020

LE COMMENTAIRE

À travers leur travail, les photographes cherchent à nous inscrire dans quelque chose qui nous dépasse (cf The Lost City of Z). À défaut d’arrêter le temps qui passe, on peut au moins prouver qu’on en a fait partie (cf Photo Obsession). Une manière de donner un peu de sens à notre humble contribution à la grande Histoire.

LE PITCH

Un photographe japonais vient en aide aux sinistrés d’un séisme.

LE RÉSUMÉ

Le petit Masashi (Ryūto Iwata) se voit offrir son premier appareil par son père (Mitsuru Hirata). En effet, Akira Asada a pris l’habitude de photographier ses deux garçons une fois par an.

Alors que Yukihiro (Tsubasa Nakagawa) est plutôt sérieux, Masashi se cherche un peu.

C’est quoi être ‘normal’ ?

Il boucle ses études de photographie en ayant l’idée de reproduire une tranche de vie. Ce jour où les trois hommes de la famille avaient glorieusement fini à l’hôpital où travaille Madame Junko Asada (Jun Fubuki) pour se faire recoudre respectivement le menton, le front et le pied.

Cette photo marque un tournant. Elle donne une idée à Masashi (Kazunari Ninomiya) : prendre des photos décalées de sa famille qui aurait réalisé ses rêves. Tout d’abord la famille Asada qui s’improvise en pompiers, pour faire plaisir au patriarche. Puis la famille Asada déguisée en Yakuza, cette fois pour faire plaisir à Madame. La famille Asada sur un circuit de Formule 1 en clin d’oeil à la passion de Yukihiro (Satoshi Tsumabuki). Etc.

Masashi tente de trouver un éditeur mais essuie les refus.

C’est juste un album de famille, c’est invendable…

Pendant ce temps, il squatte à Tokyo chez Wakana Kawakami (Haru Kuroki), son amoureuse de toujours. Elle le motive.

Tu n’as pas confiance en toi ?

Si..

Alors bouge-toi!

Finalement Masashi trouve une maison d’édition. Les ventes sont discrètes. Wakana achète la majeure partie des numéros. Pour autant, Masashi décroche un prix prestigieux qui lance sa carrière, et fait au passage la fierté de ses parents.

Aujourd’hui, je suis fier de mon fils.

Masashi propose à des familles de les prendre en photo pour réaliser leurs rêves.

Suite au terrible tremblement de terre de 2011, Masashi se rend à Nozu où il avait photographié une famille. Histoire de donner un coup de main à Yosuke Ono (Masaki Suda), un local qui fait la collecte des photos retrouvées dans les décombres.

Je ne pouvais pas rester les bras croisés.

Masashi se met au travail. L’équipe permet à des familles de retrouver leurs souvenirs, ou d’honorer leurs morts. Le jeune homme ne rentre plus très souvent à la maison, bien que son père insiste.

Et notre photo, quand est-ce qu’on va la faire ?

Masashi rentre enfin pour le soixante-douzième anniversaire de son père qui fait un AVC en soufflant ses bougies. Le fiston adoré repart aussitôt, même si sa décision fait souffrir sa mère.

Cette gifle, c’est la douleur d’une mère qui laisse son fils vaquer à ses occupations alors que son père est souffrant.

Masashi tient à honorer sa promesse. Faire une photo de famille pour une petite fille qui a perdu son papa dans la tragédie, afin de lui redonner le sourire.

Je veux une photo de famille. Dans ton livre, c’est marqué que tu le fais!

Beaucoup d’autres victimes retrouveront leurs précieuses photos.

Grâce aux efforts de ceux qui ne sont jamais descendus du bateau.

Avant de partir, Masashi cède au chantage de Wakana qui en a marre de l’attendre.

Soit tu m’épouses, soit tu me paies 2 millions!

Puis il rentre pour prendre une nouvelle photo de sa famille, dans une mise en scène des obsèques de son père – ce qui correspond bien à l’état d’esprit des Asada.

L’EXPLICATION

La Famille Asada, c’est tenir bon.

Une famille se construit dans le temps. Si on n’y accorde pas d’importance, il suffit d’une ou deux générations pour qu’elle disparaisse. Tout faire pour la conserver peut conduire à des dérives consanguines (cf Royal Affair), sans donner aucune garantie contre les disputes (cf Marriage Story) trahisons (cf Le Parrain 2) et autres querelles d’héritage (cf House of Gucci) qui peuvent mettre à mal les liens du sang.

La famille Asada est un modèle de famille, modeste et néanmoins solide. L’un des deux garçons procrastine (cf Tanguy) – nul n’est parfait. Ce qui créée des tensions entre les deux frères.

Quand tu te démènes, ils sont aussi heureux que si c’était eux. À l’inverse, quand tu te laisses aller, ils sont aussi abattus que si c’était eux.

Je ne suis pas le seul parasite à ce que je sache!

Pourtant, les Asada ont bien éduqué leurs fils.

Les parents ont du passer la douloureuse épreuve des rêves évanouis (cf Hollywoodland), sans torpiller leur couple. Madame Asada au boulot. Monsieur au fourneau.

Ils ont surmonté leurs crises existentielles (cf Kennedy et Moi). Quand Masashi interroge son père, Akira se montre philosophe.

Tu es devenu l’homme que tu voulais être ?

… Sûrement pas. (…)

Tu n’as jamais regretté ton choix ?

Difficile à dire…

Malgré les aléas, les Asada sont parvenus à inculquer certaines valeurs à leurs deux garçons. La famille va ainsi soutenir Masashi dans sa passion, contre vents et marées jalouses. Personne ne doute de lui.

Nous pensions tous qu’il deviendrait photographe professionnel. Tous sauf lui.

Les Asada construisent, conscients de cette mort qui menace d’effacer tous leurs efforts, dans un Japon qui où les murs peuvent trembler sans prévenir. Un monde dans lequel où les occasions ne manquent pas de se demander à quoi sert de se lever le matin. Il est légitime de douter, comme le fait Yosuke Ono.

Je me demande parfois si ce que je fais a vraiment un sens.

Akira partage son amour de la photographie à son fils, qui finit par comprendre :

Les photos sont des traces du passé, mais elles nous donnent aussi la force de vivre le présent.

Masashi fait honneur à sa famille en décrochant un prix mais surtout en s’engageant bénévolement pour nettoyer les photographies des habitants de Nozu.

Ça ne s’est pas effacé…

Toutes ces photos qu’on empilait dans des albums ou que l’on partage désormais de manière éphémère sur les réseaux sociaux ont une grande valeur. Elles donnent du sens.

Masashi le sait. C’est ce qu’il y a de plus important, même si Akira est mal en point. Personne n’en veut à Masashi.

Il finira bien par rentrer.

La famille Asada est unie en toute circonstance.

Chacun joue son rôle, solidaire (cf Une Affaire de Famille).

C’est de cette manière qu’on parvient à résister à des tragédies inévitables.

En acceptant la mort, sans la redouter (cf Cocoon).

Sans se prendre au sérieux.

Ni jamais renoncer.

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

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