LES ACTEURS

LES ACTEURS

Bertrand Blier, 2000

LE COMMENTAIRE

Les acteurs en imposent en terrasse, de par leur charisme naturel. On ne voit qu’eux. Ce n’est pas étonnant car si on ne les voyait plus, ils disparaitraient. On pourrait croire que ces oiseaux rares forment une belle famille, soudée par le drame ou la comédie. En réalité, il n’en est rien. Ces ego surdimensionnés se jalousent et se méprisent.

LE PITCH

Des comédiens font ce qu’ils savent faire de mieux.

LE RÉSUMÉ

Jean-Pierre Marielle est de mauvais poil. Personne ne l’a entendu réclamer un pot d’eau chaude. Ce qui le stresse au plus haut point, et le fait douter.

Est-ce que je m’exprime clairement ?

André Dussolier et Jacques Villeret remettent en cause le jeu d’acteur de leur confrère.

C’est à toi de te faire écouter dans la mesure où tu ambitionnes d’être entendu.

Ils partagent cependant la même angoisse. Notamment Dussolier, agacé par la bonne humeur de Claude Rich, et dont la hantise est d’être remplacé.

Quand on me donne une place je la garde, je la cède à personne!

Son cauchemar se produit quand il se fait virer du restaurant par Samy Frey.

Sur les Champs, Gérard Depardieu enrage après s’être encastré dans un panneau publicitaire suite un nouvel accident de moto.

Suivi pour Michael Lonsdale, Pierre Arditi retrouve son amant Jean-Claude Brialy qu’il fréquente depuis que François Berléand lui ai volé l’une de ses fans.

Vexé par le manque de considération que lui porte Samy Frey, Dussolier quitte brusquement le film sur un coup de sang. Il est remplacé au pied levé par Josiane Balasko.

Pendant le tournage d’un film noir, Alain Delon se rappelle des montres sacrés que son Jean Gabin, Lino Ventura, Louis de Funès, Yves Montand et Simone Signoret.

Toujours furieux, Marielle débarque chez Dominique Blanc pour régler ses comptes avec Michel Piccoli. Les ambulanciers de Michel Vuillermoz interviennent pour l’embarquer chez Jean Yanne, un médecin que les acteurs ont fatigué.

Brialy rend une visite nocturne à Berléand, insomniaque, qui regrette de ne pas être aussi populaire que les autres.

Les gens n’osent pas nous déranger. Comme une église dans laquelle on n’oserait pas rentrer.

L’occasion pour sa femme Maria Schneider et Pierre Arditi de faire le point. Brialy reste sur le carreau. Comme toujours.

Puis c’est au tour de Michel Serrault de faire un scandale.

Alors écoutez moi. Moi je ne peux pas travailler dans ses conditions là! Vous retravaillez le scénario et quand vous serez prêts, vous appelez mon avocat et mon agent. Les deux!

À sa sortie du restaurant, il se fait coincer par Albert Dupontel. Le chef de la milice s’occupe de tous les acteurs qui refusent de collaborer, comme Michel Galabru ou comme Jean-Paul Belmondo le magnifique, exécuté avec le sourire.

De retour au restaurant, Jacques François a pris tous les figurants en otage. Il tue Marielle d’une balle dans la tête. En pleine dépression nerveuse (cf Chute Libre), il en a marre de ne pas avoir de personnage. Il blâme l’équipe du film.

Y’a pas de metteur en scène dans ce film de merde ?! Où il est ce con de Blier ??

Le réalisateur n’en a rien à faire puisqu’il tourne un autre film avec Claude Brasseur. La scène est interrompue car son père l’appelle au téléphone. Pierre Brasseur est avec Bernard Blier qui voudrait parler à son fils. L’occasion est trop belle pour Bertrand de rendre hommage à l’acteur légendaire que fut son père.

Plus les jours passent et plus tu me manques.

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L’EXPLICATION

Les Acteurs, c’est pour cela qu’on les aime.

Leur sensibilité exacerbée leur permet de puiser au plus profond de leurs émotions pour les faire jaillir à l’écran et ainsi mieux nous toucher (cf Les Amandiers). C’est exceptionnel en soi car aujourd’hui, plus grand chose nous émeut.

Cette sensibilité exacerbée rend les acteurs à la fois uniques et insupportables (cf Jim and Andy) car ils se plaignent en permanence du beau métier qu’ils exercent.

Quelle saloperie de métier…

Et encore, nous on travaille. On va pas se plaindre!

Clin d’oeil pour les intermittents du spectacles (cf les figures de l’ombre), dont ils sont proches mais dont ils se moquent pas mal car ils ne se préoccupent véritablement que de leurs petites personnes.

Moi je suis président de société.

On n’en a rien à foutre.

À leur décharge, ce narcissisme leur est absolument nécessaire pour crever l’écran (cf Tick, Tick…BOOM!). Malgré tout, il pose pas mal de problèmes par ailleurs. Il renforce une concurrence sanguinaire (cf The will be blood).

Y’a pas assez de rôles pour tout le monde.

Pour un peu, on croirait le marché immobilier parisien.

Ce déséquilibre entre l’offre et la demande empêche les acteurs d’être solidaires entre eux, naturellement. La Comédie Française ne sont pas les Restos du Coeur, soyons clairs.

Nous ne formons pas un groupe homogène.

C’est dommage car il ne s’agit pourtant pas d’une profession facile. Elle requiert de nager en plein paradoxe en permanence. Par exemple, les acteurs se mettent en scène devant un outil qu’ils doivent constamment ignorer.

Pensez pas à la caméra. Faut l’oublier la caméra.

Le rapport des acteurs au public est ambivalent puisque le succès populaire les éloigne paradoxalement de la reconnaissance critique (cf Birdman), qu’ils cherchent aussi par ailleurs. Les acteurs veulent être reconnus – par le métier et les spectateurs. Aucune question ne fait plus mal que :

Vous êtes connu..?

Pas étonnant qu’ils finissent par détester ceux-là même dont ils ont besoin pour exister (cf Le Bal des actrices). Arditi pique une colère devant tout le monde et insulte le parterre de curieux venus voir sa performance.

Je les nique!!

Les acteur ont un métier important, qui reste un métier comme un autre finalement.

Y’a pas de quoi être fier, mais y’a pas de quoi avoir honte.

Faire preuve d’humilité est une gageure, à moins que le rôle ne l’exige bien sûr.

N’oublions pas que le métier d’acteur brouille constamment les pistes et les poussent à la schizophrénie. Torturés, violents, doux, touchants, drôles. Qui sont-ils?

Je ne sais plus qui je suis!

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On leur demande de mettre de l’intensité là où il n’y en a pas. Donner de l’importance à ce qui n’en a pas. De la confiture sur une biscotte. Des récompenses qui ne veulent rien dire. Et si tout cela ne rimait à rien?

Tout ça est une blague.

Au contraire, c’est du sérieux. Dans notre société de l’ennui, nous avons un besoin vital d’être diverti en permanence. Quand les acteurs ne sont pas là, ils nous manquent.

Ton absence crée un vide.

Alors on leur passe tous leurs caprices. On en redemande. Car eux, à la différence de nous, sont inoubliables (cf Gatsby).

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

 

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