SANS UN BRUIT

SANS UN BRUIT

John Krasinski, 2018

LE COMMENTAIRE

Quand on a fait une bêtise, on peut accuser le poisson rouge d’avoir mangé tous les chocolats. Le meilleur moyen de passer entre les gouttes reste encore de ne pas dire un mot. Une bonne manière d’éviter de se faire repérer. À la fin de l’histoire, les choses se tassent. Les gens oublient. On reprend sa vie comme si de rien n’était. Pas de risque de se faire trucider par des extra-terrestres hostiles.

LE PITCH

Les survivants de l’apocalypse la mettent en sourdine.

LE RÉSUMÉ

La famille Abbott survit dans une petite ville fantôme après que des extra-terrestres aveugles n’aient décimé la population. Sans faire de bruit. Lee (John Krasinski), sa femme Evelyn (Emily Blunt) et leurs enfants Marcus (Noah Jupe), Beau (Cade Woodward) et Regan (Millicent Simmonds) se déplacent pieds nus. Ils dévalisent ce qui reste dans les rayons de supermarché.

Beau a le malheur de déclencher un jouet dont le bruit attire immédiatement les aliens. Le petit est fauché dans la minute sous les yeux de son père impuissant. Une bonne leçon.

Quelques semaines plus tard, Regan ne parvient pas à faire son deuil. En effet, elle ne se pardonne toujours pas d’avoir donné ce jouet à Beau.

De son côté, Lee travaille nuit et jour pour réparer l’appareil auditif de sa fille qui est atteinte de surdité congénitale.

Evelyn attend un nouvel heureux événement qu’elle va devoir mettre au monde par ses propres moyens (cf Pieces of a woman). Malheureusement, elle marche sur un clou et provoque les esprits maléfiques qui rodent désormais autour de la baignoire où elle s’apprête à accoucher.

Regan remarque la disparition de Regan, partie se recueillir sur la stèle de son frère. Lee vole à leur secours, sans pouvoir éviter d’être blessé par un alien. Voyant ses enfants en danger de mort, le père hurle afin de se sacrifier. Conscient que Regan a besoin de sentir que son père l’aime, Lee lui signifie qu’il l’aimera pour toujours.

De retour à la maison, Regan s’aperçoit par hasard que son appareil auditif peut causer des sons qui neutralisent les extra-terrestres. Bonne nouvelle car la maison est assaillie. Evelyn branche la sono et donne la permission à sa fille de faire du bruit.

L’EXPLICATION

Sans un bruit, c’est le quotidien des introverti·es.

Les Abbott sont discrets. Pas un mot plus haut que l’autre. Pour être précis, pas un mot tout court. Ils ne sont pas du genre à faire des fêtes avec du gros son (cf Projet X). Tout l’inverse, ils respectent scrupuleusement les règles et font les choses bien comme il faut. Économes, ils vont faire leurs courses chez un hard discounter. Bien qu’il n’y ait plus personne, on les sent très mal à l’idée de faire du vol à l’étalage.

Qui serait surpris de les voir déposer quelques pièces à la caisse malgré l’absence de caissière ? Par principe (cf Des Hommes d’honneur). Ils en seraient capables.

En tant que parents qui s’aiment, ils font des enfants sur une base régulière. Certainement par altruisme également, bien qu’ils aient désormais toutes les raisons du monde d’être égoïstes. Non. Faire des enfants est plutôt un moyen d’assurer la continuité de l’espèce. Préserver l’humaine – même si cela engendrera des pratiques nécessairement incestueuses dans le futur. Après tout, nul n’est parfait.

Ces bons parents sont aussi un couple qui ne se dispute pas, malgré la tempête (cf Twister). Même s’ils ne se supportent plus, pas de divorce en vue (cf Marriage Story). Tandis que certain·es se séparent à la première pandémie venue, les Abbott mettent leurs écouteurs et dansent un slow. Dans l’intimité de leur cave. Loin des regards indiscrets.

Ces introverti·es ne vivent pas pour profiter des plaisirs de l’existence (cf Le Sens de la Fête) mais plutôt pour protéger leurs enfants (cf Midnight Special).

You’ll be fine. Your father will always protect you.

Ce qui ne les empêche d’ailleurs pas de s’interroger.

Who are we if we can’t protect them?

Parce que les introverti·es aiment bien se remettre en question. S’il y a un problème, leur réflexe est de se demander quelle est leur degré de culpabilité. Peu importe que Beau ait remis les piles dans son jouet, Regan pense que tout est de sa faute. Son sens de la responsabilité est accru.

Tout comme Lee qui passe beaucoup de son temps à essayer de rendre l’audition à sa fille. Il insiste parce qu’il veut croire en une happy ending. Mieux, il en est convaincu. Progressiste invétéré.

It never works…

We’ll keep trying until it does.

Lee n’est certainement pas du genre à baisser les bras ou se décourager. Non madame! Très introverti. Serrer les dents. Prendre sur soi. Faire le dos rond. Digérer son propre stress pour se montrer rassurant dans un monde privé de son humanité.

There’s nothing to be scared of!

Car le monde extérieur est bien violent. Peuplé d’animaux carnivores sans une once de subtilité. Qui ne voient rien à ce qui les entoure, c’est à dire sans conscience de leur propre présence. Si quelqu’un d’autre se manifeste, on lui saute dessus pour le faire disparaitre. Ces extravertis un peu vulgaires, aux dents acérés, ont écrasé la concurrence par leurs méthodes.

Les Abbott sont des victimes qui passent chaque minute dans l’angoisse qu’on les déniche (cf Le Pianiste). Alors ils se protègent comme ils le peuvent, en disparaissant petit à petit. Les extravertis les ont conduits à se faire oublier. Tomber comme des dominos. Beau d’abord. Puis Lee. À qui le tour ?

Evelyn, Regan, Marcus et le petit dernier ont la mission de défendre les introvertis.

Peut-être en reste-il ailleurs sur terre ? Il est temps pour eux de prendre le taureau par les cornes. Sans pour autant forcer leur caractère. Ils ne vont pas s’improviser gendarme à St Tropez.

La découverte d’une faiblesse chez les extravertis leur permet d’envisager l’avenir avec un peu plus de sérénité. Qui sait ? Peut-être que dans cette guerre impitoyable à la fin de laquelle il ne peut en rester qu’un·e, les introverti·s vont pouvoir négocier un cessez-le-feu (cf Le Règne du Feu) ? Cette solution permettrait à toutes et tous de pouvoir vivre en harmonie. La paix royale. Le rêve.

On imagine assez mal des introverti·es faire un putsch afin de renverser la domination tyrannique des extravertis. Pas le genre!

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

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