WALL STREET

WALL STREET

Oliver Stone, 1987

LE COMMENTAIRE

La finance est un univers impitoyable avec des milliers d’acteurs, du banquier du Crédit Mutuel du coin au trader de Wall Street. Ce dernier a connu son heure de gloire à la fin du XXe siècle dans sa limousine, les cheveux gominés, les dents aussi blanches qu’acérées et son regard auquel ne rien résiste. Comme un chien à qui on aurait enlevé sa laisse, il était devenu le symbole d’un succès indécent qui ne prenait même plus la peine de s’excuser. Quelques Bernard Madoff, Jerome Kerviel et autres Emmanuel Macron plus tard, le trader fait beaucoup moins rêver. Il est presque devenu la figure du diplômé d’école de commerce à abattre.

LE PITCH

Un jeune loup joue dans la cour des grands.

LE RÉSUMÉ

Le jeune Bud Fox (Charlie Sheen) fait ses premiers pas à Wall Street en tant que courtier. Il rêve de travailler avec le légendaire Gordon Gekko (Michael Douglas) qu’il harcèle au téléphone en l’appelant une fois par jour jusqu’à ce qu’il décroche enfin un rendez-vous.

Yeah! Woooo! I just bagged the elephant!

Gekko est intrigué par la détermination du jeune homme.

This is the kid, calls me 59 days in a row, wants to be a player. There ought to be a picture of you in the dictionary under persistence kid.

Bud Fox a la pression.

Life all comes down to a few moments. This is one of them.

Dès le premier obstacle, il chute en se rendant coupable d’un délit d’initié. Il divulgue une rumeur sur Blue Star Airline, la compagnie aérienne pour laquelle travaille son père (Martin Sheen). Gekko le récompense en le prenant sous son aile mais Bud Fox n’y arrive pas quand il joue selon les règles.

Gekko lui donne alors une dernière chance en lui proposant d’espionner Sir Lawrence Wildman (Terence Stamp) pour savoir quelle compagnie il a l’intention d’acheter et lui griller la politesse.

Avec Gekko, Bud Fox s’enrichit rapidement et mène la grande vie dans le Upper East Side en compagnie de Darien (Daryl Hannah) que Gekko lui a mis dans les pattes.

Bud propose à Gekko d’investir dans Blue Star et convainc les syndicats de passer un deal avec le banquier d’affaires pour faire prospérer la compagnie. Au dernier moment, Gekko décide de casser la compagnie et d’encaisser les bénéfices. Quand Bud le comprend, il essaie de jouer un tour à Gekko et le dénonce à la SEC, ce qui lui vaudra une remise de peine. Car Bud va quand même devoir passer par la case prison sans toucher les francs 20,000.

LE COMMENTAIRE

Wall Street, c’est la rue qui conduit droit dans le mur.

Bud Fox a grandi sous l’influence de son père, un besogneux qui a trimé toute sa vie pour un salaire de misère. Bud n’est encore qu’un enfant. Il est déjà impatient de jouer avec les adultes. Il veut bien sûr faire mieux et plus vite que son paternel. C’est pour cela qu’il part vivre à Manhattan en n’oubliant pas de snober ses origines au passage.

À Wall-Street, il y trouve l’homme qu’il voulait en la personne de Gordon Gekko, à savoir quelqu’un qui peut lui permettre de devenir riche rapidement.

I’m talking about liquid. Rich enough to have your own jet. Rich enough not to waste time. Fifty, a hundred million dollars, buddy. A player. Or nothing.

Les paroles de Gekko résonnent dans les oreilles de Bud qui ne prête pas la moindre attention à la mise en garde par un vieux de la vieille, Lou Mannheim (Hal Holbrook).

Good things, sometimes, take time.

Pas le temps d’attendre. Bud fait partie de cette jeune génération de golden boys qui foncent droit vers les sommets. Il grille la priorité et préfère prendre les raccourcis. Son mentor a une conception de l’économie assez froide et cynique.

It’s a zero-sum game: somebody wins, somebody loses. Money itself isn’t lost or made, it’s simply, uh, transferred from one perception to another. Like magic.

Dans ce New York tout puissant, capitale de l’économie de marché mondialisée, Gordon Gekko est le roi. Il incarne une nouvelle Amérique, dérégulée et décomplexée, qui fait l’apologie de l’avidité et qui se fait même applaudir.

The point is ladies and gentlemen that greed, for lack of a better word, is good.

Gekko spécule. Autrement dit il fait fortune sur du vent. Alors que par le passé, c’est le travail qui permettait la richesse ; aujourd’hui c’est l’information qui suffit à faire bouger les capitaux et qui permet à des gens comme Gekko d’encaisser d’énormes bénéfices.

The most valuable commodity I know of is information.

Gordon Gekko incarne la fin du rêve américain selon lequel n’importe qui avec un peu de courage et de travail pourrait gagner sa liberté et prospérer. Aujourd’hui, les super riches ne permettent plus aux jeunes courageux ne serait-ce que de s’installer à la table de Poker pour jouer.

Le player est Gekko, un éléphant assis sur son gros cul à ne rien faire. Il ne dort pas car l’argent ne dort pas non plus. Sans travailler véritablement. Ce qui ne l’empêche pas de se faire un max rien qu’en respirant, pour reprendre la formule de Patrick (cf La Vérité Si Je Mens)

The richest one percent of this country owns half our country’s wealth, five trillion dollars. One third of that comes from hard work, two thirds comes from inheritance, interest on interest accumulating to widows and idiot sons and what I do, stock and real estate speculation. It’s bullshit. You got ninety percent of the American public out there with little or no net worth. I create nothing. I own.

Pour Gordon Gekko, le capitalisme n’a pas de limite: villas, piscines, jet privé…

How much is enough?

Le gendarme du monde a troqué son estafette contre une Ford Mustang. Il conduit trop vite et à contre sens. C’est donc parce qu’il n’en a jamais assez que Gekko va se faire coincer. Bud Fox est puni pour avoir pris le mauvais chemin.

Gordon Gekko est condamné au nom d’un système qui tourne sur la tête. La prophétie de Loo Mannheim peut se réaliser: face au vide qu’il laisse, l’homme se retrouve seul avec lui-même. C’est ce qui lui permet de savoir qui il est vraiment.

Man looks in the abyss, there’s nothing staring back at him. At that moment, man finds his character. And that is what keeps him out of the abyss.

À ceci près que ni Gordon Gekko ni Bud Fox ne finissent sous les barreaux dans la vraie vie (cf Inside job). Ils sont bien trop importants et font gagner d’argent à trop de monde pour que leurs fesses finissent en prison.

S’ils pensent passer au travers des gouttes, ils ne pourront pas éviter le tsunami qui leur fonce dessus.

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

14 commentaires

Commentez ou partagez votre explication

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.