HARCÈLEMENT

HARCÈLEMENT

Barry Levinson, 1994

LE COMMENTAIRE

Dans le monde impitoyable de l’entreprise capitaliste telle qu’on la connait, les hommes et les femmes collaborent parfois de manière assez tendue, faute de place pour les ego. Les hommes aiment bien jouer aux alpha male en transformant leurs réunions en foires à l’empoigne, en parlant fort et en inspirant la peur (cf Berberian Sound Studio). Tandis que les femmes ne sont pas en reste. Leur approche est sensiblement différente, quelque part entre douceur et détermination froide. Elles aiment donner le baiser de la mort à leurs victimes.

LE PITCH

Un homme voit une femme lui barrer la route.

LE RÉSUMÉ

Tom Sanders (Michael Douglas) est manager chez Digicom, une entreprise dans le secteur des nouvelles technologies. Il compte bien être promu au moment où la compagnie dirigée par Bob Garvin (Donald Sutherland) s’apprête à être rachetée. Contre toute attente, il apprend qu’il s’est fait griller la priorité par Meredith Johnson (Demi Moore), une ancienne petite amie. Elle a mieux manoeuvré pour aider Bob à faciliter la fusion. La nouvelle championne, c’est elle.

Tom est sur la touche, tout comme Stephanie Kaplan (Rosemary Forsyth), une autre employée ambitieuse qui n’a pas su se frayer un chemin à travers la politique interne. Plus que d’avoir raté une promotion, Sanders craint d’avoir perdu son job.

This is the worst day of my life.

Le soir, Meredith demande à Tom de rester pour faire le point. Elle propose du vin et fait de nombreuses références à leur relation. Puis elle passe à l’attaque en l’embrassant. Il lui dit non. Elle le débraguette et prend les choses en mains.

Just lie back and let me be the boss.

Il tente de résister. Une fellation plus tard, Tom parvient à éviter la pénétration. Il quitte la pièce suscitant la colère de sa nouvelle patronne.

Get back here and finish what you’ve started or you’re fucking dead!!

Le lendemain, il est effectivement sur la sellette. Meredith a révélé l’histoire au responsable juridique Philip Blackburn (Dylan Baker) qui veut à tout prix étouffer l’affaire pour ne pas compromettre la fusion. Tom refuse se réaffectation. Il consulte une avocate spécialisée en la matière, recommandée par un mystérieux ami.

La première médiation se passe mal pour Tom car Meredith l’accuse de harcèlement. Malheureusement pour lui, certains faits l’accablent. Heureusement pour lui, il retrouve un enregistrement téléphonique qui le disculpe. Digicom accepte de négocier.

Le lendemain, Tom doit faire une intervention anodine de quelques minutes lors d’une conférence déterminante pour la fusion. Le soir même, il découvre qu’il s’agit d’un coup monté de Meredith qui espère bien le discréditer le lendemain. Tom passe la nuit à trouver des preuves de la malhonnêteté de Meredith qui a comploté dans son dos pour le faire tomber.

La conférence est une boucherie. Tom dénonce intelligemment les agissements peu scrupuleux de Meredith qui tente de riposter mais ne fait que s’enfoncer devant tout le monde. Garvin prend la décision qui s’impose et nomme Stephanie Kaplan à la tête de la division.

Ce qui ne semble pas gêner Tom qui lorgnait pourtant sur le poste. Il sait qu’il doit une fière chandelle au fils de Stéphanie qui était le mystérieux ami.

L’EXPLICATION

Harcèlement, c’est s’en sortir grâce au travail et pas autre chose (cf Promotion Canapé).

Nous vivons aujourd’hui dans une économie de la spéculation (cf Inside Job). Les bulles gonflent un peu partout. Ce qui compte ce sont les cours! (cf The Game). On peut faire beaucoup d’argent sur quelque chose qu’on ne possède pas alors que dans le passé, on était rémunéré pour une production. Désormais, c’est fini. La bourse est devenue extrêmement sensible au sens du vent.

Maybe it’s just a rumor…

Rumors are always true.

La possibilité de faire de l’argent facile, sans avoir à se salir les mains, a attiré de nombreux opportunistes qui ont soigné leur ambition plus que n’importe quelle autre compétence (cf le loup de Wall Street).

Tom fonctionne un peu sur ce modèle. Obsédé par sa carrière. Sa carte de visite est sa carte d’identité (cf American Psycho). On comprend mieux ce qu’une promotion représente à ses yeux. C’est pratiquement tout ce qui compte pour lui.

Dans cette économie de la spéculation et de l’ambition, la réalité est que nous sommes tous logés à la même enseigne. C’est ce que rappelle cette sombre histoire de harcèlement. Il y a évidemment tout un débat sur le fait que les hommes eux aussi, pauvres diables, peuvent être victimes de harcèlement.

Oui, on peut bander et être forcé malgré tout. Un homme peut aussi se laisser faire, contre sa volonté. Il peut avoir honte d’en parler. C’est un taboo. Le fait est que les femmes peuvent être largement aussi bêtes que les hommes (cf Working Girl, Je ne suis pas un homme facile).

The only thing you have proven is that a woman in power can be every bit as abusive as a man!

Il faut donc dépasser les clichés. La conclusion la plus importante reste que les hommes et les femmes sont dans la même galère et qu’ils utilisent les mêmes armes pour arriver à leurs fins. Ils se donnent coups pour coups et tous les coups sont permis. Nothing personal comme on dit. Ce n’est pas une histoire de revanche. Juste une question de pouvoir.

Sexual harassment is not about sex. It’s about power.

À ce jeu d’échecs, on essaie souvent de faire chanter les autres, les pousser à la faute ou jouer sur leurs faiblesses. Meredith connait Tom. Elle le met face à ses contradictions.

You stick your dick in my mouth and then you get an attack of morality??

Elle appuie là où cela fait mal en opposant la vie bien rangée de Tom à ses désirs encore brûlants. Il a beau dire que les choses ont changé.

You have a lot more to lose than I do…

Dans cette tempête, on peut décider de jouer le jeu de la politique à ses risques et périls. Ou on peut décider de la fermer et se mettre au boulot. C’est l’exemple de Mary Anne Hunter (Suzie Plakson):

I studied engineering for 8 years, I was the only woman in that department. You know what I did? I worked.

Alors Tom se bat pour prouver son innocence, ce qui n’est pas suffisant. Il risque de se planter salement car on lui a savonné la planche. Au contraire, il doit continuer de bosser. Tout le temps. C’est le conseil que lui donne son ami.

Solve the problem.

C’est en travaillant dur toute la nuit qu’il va réussir à sauver ses fesses.

Dans cet environnement, le leadership a un rôle d’arbitre essentiel. Lorsqu’il ne pense qu’au profit, il essaie de manoeuvrer pour étouffer l’affaire. Un refus de prendre ses responsabilités. Il tente de préserver le status quo tout en oeuvrant en coulisses au sabordage de ses propres équipes. À la surface, tout va bien évidemment. On préserve les apparences.

Just one big happy family.

Tout cela conduit au désastre.

Lorsque le leadership joue enfin son rôle, alors les choses rentrent dans l’ordre. Meredith est écartée. Stephanie Kaplan peut être nommée, pour les bonnes raisons. Le leadership créée les conditions du succès lorsqu’il valorise le travail.

I have probably focused too much on breaking the glass ceiling and finding a woman to run things up here while what i should have been looking for is the best person to run things up here.

Le climat est assaini. Tom a muri. Il n’est pas amer de cette décision, il est même content. Cette expérience lui a beaucoup appris. Son assistante (Jacqueline Kim) s’est plaint de son comportement parfois déplacé. Il a retrouvé sa femme – en pyjama.

Toute cette aventure lui a permis de faire la paix avec lui-même et redéfinir ses intentions. Il n’est plus consumé par son ambition. Rejoindre sa famille est sa priorité. Le travail n’est plus une manière de faire fortune tout en flattant son ego ; cela ne redevient qu’une manière de gagner sa vie et faire vivre sa famille, conformément à la vision des Sept Nains dans Blanche Neige.

LE TRAILER

Cette explication de film n’engage que son auteur.

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