LES DIAMANTS SONT ÉTERNELS
Guy Hamilton, 1971
LE COMMENTAIRE
Les hommes du siècle dernier avaient une fâcheuse tendance à considérer la femme comme leur objet (cf Barbie). Ils pouvaient par exemple glisser une cassette audio dans la petite culotte d’une femme et s’attendre à ce qu’elle se mette à jouer de la trompette, moyennant une petite tape sur les fesses.
LE PITCH
Un agent secret au service de sa majesté remonte la filière.
LE RÉSUMÉ
James Bond (Sean Connery) pense être venu à bout de Ernst Stavro Blofeld (Charles Gray). Il retourne en Angleterre où on le met sur la piste d’un trafic de diamants (cf Blood Diamond). Aux Pays-Bas, il rencontre Tiffany Case (Jill St John) pour convoyer 50,000 carats vers les États-Unis.
Bond est suivi à la trace par deux tueurs : M. Kidd (Putter Smith) et M. Wint (Bruce Glover).
Dans le Nevada, Bond échappe une fois de plus à la mort car par chance les diamants qu’il transportait était faux. Après quoi, il fait un tour au casino où il s’installe à la table de Abondance Delaqueue (Lana Wood).
As La Rochefoucauld observed, « humility is the worst form of conceit. » I do hold the winning hand. Why don’t you let me take you on a little tour of our facilities. Your chance to see the real tape once again.
Celle-ci est retrouvée morte dans une piscine quelques temps plus tard.
Curious… how everyone who touches those diamonds seems to die.
Tiffany Case révèle où elle a planqué les diamants. Ils sont utilisés par Tectronics, une société de Willard White (Jimmy Dean), à la fabrication d’un laser.
Bond est fait prisonnier par les hommes du SPECTRE. L’organisation criminelle de Ernst Stavro Blofeld cherche à s’emparer du laser pour détruire les armes nucléaires partout dans le monde, de façon à prendre le pouvoir. Car Ernst Stavro Blofeld le mégalomane n’est pas mort. Il a des doubles prêts à mourir à sa place et qui créent la confusion.
Blofeld commence à mettre son plan à exécution.
Case trahit Blofeld.
Sa base est localisée et son laser est neutralisé.
Sur le bateau qui le ramène de Baja, Bond se débarrasse de Kidd et Wint en les passant par dessus bord. Il peut à présent profiter de sa croisière avec Tiffany Case. Pour combien de temps ?
L’EXPLICATION
Les Diamants sont éternels, c’est ce qui ne change pas.
Rien n’est permanent, sauf le changement disait Héraclite d’Ephèse. Les Grecs, on a beau ne pas tous les connaître très bien, force est de reconnaître que leurs punchlines en imposent drôlement. Clairement plus impactant que les slogans politiques de certains anciens présidents en tout cas : le changement c’est maintenant!
Il est de fait que la vie change en permanence. L’environnement en est une preuve. Les Grecs n’avaient donc pas tort de ce point de vue. Le changement fait que l’on ne peut pas se reposer sur ses acquis. Avec le temps qui passe, les technologies évoluent sans cesse (cf A.I.), et avec elles les mentalités : parité, diversité, inclusion, etc… Le nouvel ordre remplace l’ancien (cf Le Parrain 3). Il faut donc nécessairement se repenser, s’adapter – ou mourir (cf Le Stratège). Chaque mission de 007 est un nouveau chapitre (cf Mission : Impossible).
Cependant, il s’agit d’une troublante vérité qui n’est pas à la portée de tout le monde. Cela implique en effet d’accepter de devoir recommencer, encore et encore. Pas forcément repartir de zéro à chaque fois, mais vivre un peu comme un·e gitan·e – constamment en mouvement.
On comprend mieux toute la difficulté que représente cette situation pour les personnes qui se sont sédentarisées dans leur pouvoir, leur succès ou leur patrimoine (cf Indiana Jones). Celles et ceux qui ont atteint leur plafond. Ces personnes là ne trouvent a priori aucun intérêt à ce que les choses changent.
Puisque l’on ne peut pas lutter contre le progrès, la seule possibilité qui s’offre à celles et ceux qui n’aiment pas l’idée de changement est de se rassurer en s’appuyant sur des choses qui donnent l’impression de ne pas changer, comme les diamants – qui sont éternels.
Tout comme le crime qui refait immanquablement surface : Ernst Stavro Blofeld est increvable. On croit en venir à bout mais il revient sans cesse. C’est pratique. Le fait qu’il ait plusieurs visages le rend insaisissable, comme une idée (cf V for Vendetta). Et les idées sont éternelles aussi (cf Inception).
Le fait que Ernst Stavro Blofeld soit toujours là est bien commode pour James Bond car il rend sa présence nécessaire et légitime. Le méchant implique un gentil. Comme le yin et le yang (cf The Dark Knight). Pour quelle raison Ernst Stavro Blofeld se met soudainement à bavarder quand il a l’occasion de tuer James Bond ? Que pourrait bien faire James Bond sans Ernst Stavro Blofeld ? Du jardinage (cf The Master Gardener) ? Il serait toujours James Bond, mais il ne serait certainement plus 007.
James Bond est confiant également sur le fait que le patriarcat ne disparaitra jamais (cf OSS 117). Cela ne fait pas de mal de l’entretenir de temps en temps par le biais de petites remarques qui n’étaient pas encore considérées comme sexistes à l’époque.
I tend to notice little things like that – whether a girl is a blonde or a brunette. (…) That’s quite a nice little nothing you’re almost wearing. I approve.
On se rassure avec les formules indémodables.
Ashes to ashes.
Dust to dust…
Les mêmes têtes qui reviennent inexorablement, les mêmes questions, les mêmes réponses… Parce qu’on a un besoin vital de nos repères. En quelque sorte, rien ne doit plus ressembler à un James Bond qu’un autre James Bond (cf Goldeneye).
You just killed James Bond!
Well, just goes to show no one’s indestructible.
Donc finalement, on rentre dans des cycles. Cette vision des choses est beaucoup plus simple, pour peu que l’on se satisfasse que les choses sont ce qu’elles sont. Car elles reviendront sans cesse. L’éternel retour du même.
Ne reste plus alors qu’accepter son destin, et devenir ce que l’on est – selon la formule de Pindare, un autre poète grec.
Donc, cela change mais cela ne change pas.
On s’est encore bien moqué de nous. Le serpent se mord la queue. Il y avait vraiment à boire et à manger en Grèce…