WORLD WAR Z

Marc Forster, 2013

LE COMMENTAIRE

Les petites mesquineries du quotidien nous transforment, sans que nous nous en rendions compte nous-mêmes. Nous sommes tous bienveillants, jusqu’à ce que nous ne le soyons plus. C’est pourquoi il est vital d’apprendre à se défendre – contre les agressions de ses collègues de bureau notamment. On en arrive à devoir cracher comme un chat quand quelqu’un nous demande de lui rendre un service. L’homme devient parfois un vrai zombie pour son prochain.

LE PITCH

Un ancien inspecteur des Nations-Unies fait le tour du monde pour le sauver des zombies.

LE RÉSUMÉ

Gerry (Brad Pitt) et Karin Lane (Mireille Enos) pensent être bloqués dans les embouteillages de Philadelphie, comme d’habitude, quand une horde de zombies les sort soudainement de leur torpeur. Avec beaucoup de courage et un peu de chance, ils parviennent à rejoindre Newark d’où ils sont évacués par hélicoptère.

Les survivants se retrouvent sur des porte-avions de l’armée. Les places y sont rares et chères.

There is no room here for non-essential personnel.

Gerry doit reprendre du service pour garantir la sécurité de sa famille. Il va escorter un scientifique jusqu’en Corée à la recherche du patient zéro. La mission n’aboutit pas. Gerry ira jusqu’à Jérusalem pour apprendre que chercher le patient zéro ne sert à rien. Rattrapé par les zombies, il parvient à détourner un avion pour faire route vers le Pays de Galle où se trouve un laboratoire de l’Organisation Mondiale de la Santé.

Gerry a remarqué que les zombies ne s’attaquent pas aux handicapés et aux mourants. Ayant trouvé cette faille dans le virus, il s’inocule une maladie mortelle – mais pas incurable – qui va lui permettre de se protéger des zombies, gagner un peu de temps et peut-être même de trouver un vaccin.

Il retrouve sa famille dans une zone de sécurité, au Canada. La guerre ne fait que commencer.

Be prepared for anything.

L’EXPLICATION

World War Z, c’est peut-être la prochaine guerre mondiale.

Le monde a la capacité de retourner à l’état primitif. On revient à Hobbes et son l’homme est un loup pour l’homme. Dans ce monde, l’enfer ne vient pas de l’espace (cf Skyline). Elle vient de l’autre qui n’est ni le Nazi (cf Inglourious basterds) ou le Nord-Coréen mais le semblable. Il faut se méfier de tout le monde. Le monde entier se retourne contre lui-même.

En période de conflit, il faut savoir faire des alliances. Gerry a le bras long. Rappelons quand même que Gerry s’en sort grâce à son contact haut placé aux Nations Unies. Être pote avec Karl Lagerfeld n’aide pas à se sortir d’une invasion zombie. La longueur du bras de Gerry ne suffira pourtant pas.

En l’absence de nouvelles, les militaires n’hésiteront pas à débarquer sa petite famille du porte-avion. On ne peut plus faire confiance à personne! En période d’invasion zombie, c’est chacun pour soi (cf Dernier train pour Busan). Le monde revient à l’état sauvage (cf The Road), c’est à dire à son état naturel. Et la nature on la connaît…

Mother Nature is a serial killer.

Dans ce monde où la galanterie n’a plus lieu d’être, l’homme ne fuit pourtant pas ses responsabilités. Il a une famille à charge. Et c’est à lui qu’incombe d’affronter les dangers extérieurs. Gerry c’est l’homme qui met sa cravate le matin et qui monte dans le RER en direction de la Défense pour aller y gagner son salaire.

La guerre on la vit au quotidien. Les morsures prennent d’autres formes. Et il faut lutter constamment pour ne pas être contaminé par la bêtise de ses collègues ou des personnes autour de soi. Déjà qu’il faut lutter constamment contre sa propre bêtise…

Le plus désagréable, c’est qu’on ne sait pas pourquoi. Il n’y a pas plus de réponse que d’origine à cette épidémie. Les zombies sont comme des terroristes. Il y a une profonde injustice dans le fait de voir son monde s’écrouler et son confort disparaitre aussi brutalement. En douze secondes, on passe d’artiste à survivant comme Szpilmann (cf Le Pianiste). Le monde était bestial, l’aurait-on oublié? On se repose un peu trop sur les autorités pour nous défendre alors qu’elles font cruellement défaut.

The president is dead. Four of six joint chiefs, VP missing.

Aujourd’hui, les chômeurs vivent dans ce contexte tous les jours (cf La Loi du Marché). Tout le monde y aura bientôt droit: les catastrophes naturelles qui se multiplient, Fukushima (cf Pandora), le désert qui avance, la glace qui fond, Ebola, la grippe A, le Covid, la pollution en Chine, les migrants, les gilets jaunes.

Si on met ces indices face à la crise du religieux (cf Spotlight), les déroutes du capitalisme (cf Inside Job), la démission du politique, les bateaux de réfugiés qui coulent, on a toutes les raisons du monde d’être sceptique. Le monde s’effondre. Malgré tout, on reste serein… ou dans le déni.

Most people don’t believe something can happen until it already has.

Faire ses courses au supermarché comme si de rien n’était. Regarder le SDF à la sortie avec un air plus désolé que lui alors qu’on a plein de petite monnaie dans les poches. On est tous un peu comme des premières classes à bord du Titanic. La présentatrice météo se réjouit du réchauffement climatique, trop heureuse de porter un t-shirt en plein hiver et s’enorgueillit de faire l’histoire grâce à ce mois de décembre record.

Alors qu’on se demande quels signaux peuvent encore virer au rouge, certains n’attendront pas pour partir se planquer en Suisse. N’oublions pas que même les murs de Jérusalem ne résistent pas longtemps. Et que la misère escalade les murs barbelés aussi. Personne n’est à l’abri.

Dire qu’on préfère regarder Top Chef alors qu’on devrait déjà être en train prendre des notes devant Koh Lanta (cf Jusqu’au déclin)! On s’est moqué de ces cancres qui suivaient ce qu’on pensait être une voie de garage du lycée technique alors que demain, ils seront les seuls survivants d’un monde qui n’aura plus rien à faire des traders (cf Le Loup de Wall Street).

Ainsi les derniers seront les premiers. Et si Dieu existait finalement?